| PAGE1, subst. masc. A. − 1. Jeune garçon, jeune homme généralement d'origine noble, attaché au service d'un roi, d'un seigneur ou d'une grande dame (dont il portait la livrée), pour servir d'escorte, effectuer le service d'honneur et apprendre certaines fonctions civiles et militaires. Beau, jeune page; page de la reine, de la chambre du roi, de la musique, de la vénerie; brevet de page; appartenir au corps des pages. Wallstein fut placé comme page à la cour du margrave de Burgovie, prince de la maison d'Autriche, qui le fit voyager dans presque toute l'Europe (Constant,Wallstein,1809, p.179).Dégoûté à neuf ans du collège, il [Ronsard] devint page de cour, passa près de trois ans en Écosse au service du roi Jacques (Sainte-Beuve,Tabl. poés. fr.,1828, p.63): . Cécile (...), après avoir mené durant de longues années une vie honnête et chaste, et déjà sur le retour, s'éprit de Jean Violle, le petit page de madame la comtesse de Maubec, qui habitait l'hôtel du Paon sur la Grève. Il n'avait pas encore dix-huit ans; sa taille et sa figure étaient très mignonnes.
A. France,Île ping.,1908, p.392. − [Dans un cont. métaph.] Une reine, l'imposture, avec pour pages le vol et le crime, à ses pieds (Montherl.,Maître Sant.,1947, i, 4, p.614). − [P. allus. à l'insolence proverbiale des pages] ♦ Effronté*, hardi* comme un page (de cour). ♦ Tour de page. Farce, espièglerie. Une diatribe plaisante sur les tours de page joués par le ministre à tel président du conseil (Stendhal,Rossini,1823, p.179). − Être hors de page, sortir de page. Avoir effectué son temps de service dans le corps des pages. Au sortir de page, on devenoit écuyer et la religion présidoit toujours à ces changemens (Chateaubr.,Génie,t.2, 1803, p.486).La mère de Comminges a donné au roi des détails (...). Ils expliqueraient comment un si redoutable champion a succombé si facilement sous les coups d'un enfant à peine sorti de page (Mérimée,Chron. règne Charles IX,1829, p.131). ♦ Au fig., vieilli. Être indépendant, affranchi de toute tutelle. Le voilà hors de page, [Bonaparte] empereur demain, maître absolu sur nos têtes. Eh! bien, dès avant demain il a commencé de tomber (Sainte-Beuve,Volupté,t.2, 1834, p.57).Dites à Leroux que j'élève Maurice dans son Évangile. Il faudra qu'il le perfectionne lui-même, quand le disciple sera sorti de page (Sand,Corresp.,1839, p.128). 2. P. anal., vx. Jeune homme servant d'aide ou de commissionnaire dans différents métiers. Synon. vx gamin.De quatorze à dix-sept ans, il fut le Séide de Séchard, qui le mit sous la direction d'un des plus habiles ouvriers, et qui en fit son gamin, son page typographique (Balzac,Illus. perdues,1843, p.559). 3. MODE, empl. adj. inv. [En parlant d'un article de bonnet.] De la plus petite dimension qui se fasse pour hommes. Caleçon, chaussettes page. (Ds DG, dict. xxes.). B. − MODE, vx. Petite pince suspendue à la ceinture et permettant de relever le bas d'une jupe, d'une robe sans avoir à la tenir à la main. (Ds Littré). [Comme 1erou 2eélém. de mot comp.] Agrafe-page (rem. s.v. agrafe) ou page-agrafe. Nous ne devons pas oublier de rappeler le page-agrafe, si commode par temps de pluie (...). Le page-agrafe, qui se place dans la ceinture, soutient merveilleusement la jupe (J. femmes,1847, p.43). C. − VÉN., vieilli. Jeune cerf (synon. écuyer), jeune sanglier qui en accompagne un vieux (d'apr. Duchartre 1973). Prononc. et Orth.: [pa:ʒ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1225 «jeune valet» (Gautier de Coinci, Miracles Nostre-Dame, éd. V. F. Koenig, II Chast 10, 12); b) 2emoitié xives. «jeune garçon, généralement de famille noble, attaché au service d'un prince, d'un seigneur» (Jean d'Outremeuse, Geste de Liège, 26297 ds A. Scheler, Gloss. philol.); 1456 estre hors de paige «être en âge de cesser d'être page» (A. de La Sale, Jehan de Saintré, éd. J. Misrahi et Ch. A. Knudson, p.65); 1532 au fig. être hors de page «être affranchi de toute dépendance» (Rabelais, Pantagruel, Prol., éd. V. L. Saulnier, p.7); 2.1847 mode page-agrafe (J. femmes, loc. cit.); 1868 page (Littré); 3.1874 vén. «jeune cerf dont un vieux s'accoste pour donner le change» (Lar. 19e). Orig. incertaine. Un empr. à l'ital. paggio (dep. 2emoitié du xives., Filippo Villani ds Tomm.-Bell.), qui serait issu du gr. π
α
ι
δ
ι
́
ο
ν par l'intermédiaire d'une forme romanisée páidiu (Diez3p.232; Bl.-W.4-5; FEW t.7, p.475a) fait difficulté en raison de l'antériorité du mot fr. (cf. aussi angl. page, dep. 1300 d'apr. NED, empr. au fr.). F. Holthausen (ds Anglia, Beiblatt t.14, p.336), suivi par DEI, propose comme étymon le lat. pathicus «sodomite passif» (ds OLD), lui-même empr. au gr. (v. Liddell-Scott), mais cette hyp. fait difficulté du point de vue hist. (v. REW3no6150 et Cor.-Pasc., s.v. paje). L. Spitzer (ds Z. rom. Philol. t.42, pp.340-342) propose un lat. *pagicus «paysan» (dér. de pagus) mais cette hyp. ne convient ni du point de vue sém. (v. FEW, loc. cit.) ni du point de vue phonét. (v. Cor.-Pasc., loc. cit.); un lat. vulg. *pageus, lui aussi dér. de pagus (C. A. Rice ds Language t.9, pp.309-310) est tout aussi invraisemblable. Bbg. Lenoble-Pinson (M.). Le Lang. de la chasse. Bruxelles, 1977, p.68, 337, 338. |