| ORIPEAU, subst. masc. A. − Vieilli 1. Lame très mince de laiton ou de cuivre, ayant de loin l'éclat et l'apparence de l'or. On fond le minerai de zinc pour le convertir en oripeau (Code pharm., 1821, p.23). 2. Étoffe, broderie constituée de fils ou d'ornements de faux or ou de faux argent. [Le danseur de corde] d'un bond s'établit debout, près du haillon passementé d'oripeaux qui décore les bâtons en forme d'X (Gautier, Italia, 1852, p.9).[Le clergé italien] est très fort en latin, très barbare en fait de goût. Il gâte les églises avec sa manie d'oripeaux et de dorures (Valéry, Corresp.[avec G. Fourment], 1887, p.43). 3. Au fig. Ornement trompeur, faux éclat. −Alors, tu ne crois pas, en somme, à la théurgie, à la magie blanche? −Non, c'est de la blague! C'est un oripeau qui sert aux gaillards tels que les rose-croix, à cacher leurs plus répugnants essais de magie noire (Huysmans, Là-bas, t.2, 1891, p.220): 1. L'homme [Louis Bonaparte] une fois déshabillé du succès, le piédestal ôté, la poussière tombée, le clinquant et l'oripeau et le grand sabre détachés, le pauvre petit squelette mis à nu et grelottant, peut-on s'imaginer rien de plus chétif et de plus piteux?
Hugo, Nap. le Pt, 1852, p.212. B. − De nos jours, le plus souvent au plur. 1. Vêtement défraîchi, démodé, ayant un reste de splendeur et donnant un aspect théâtral ou ridicule. Léopold, vêtu de ses oripeaux d'évêque vintrasien, au milieu de son petit peuple épouvanté et ravi, alliait à sa figure très nette de visionnaire quelque chose d'un roi de la foire (Barrès, Colline insp., 1913, p.262).Entra une vieille négresse rabougrie, vêtue des plus criards oripeaux (Benoit, Atlant., 1919, p.174): 2. Quand j'aurai dit l'amour de Clarisse pour les défroques de jadis, entr'ouvert ses armoires sur des collections de chaussures anciennes (...) des uniformes militaires, oripeaux de théâtre, loques brillantes, chiffons (...), je n'aurai pas fait comprendre encore tout ce que je veux expliquer.
Morand, Tendres stocks, 1921, p.54. 2. Au fig. Ornement trompeur, faux éclat masquant la réalité. Jean Racine, le premier chez nous, osa regarder en face les passions de l'amour; le premier, il dépouille l'amour de ses oripeaux (Mauriac, Vie Racine, 1928, p.76): 3. ... M. Paul Bourget (...) c'est bien le philosophe, le poète, le moraliste qui convient à la nullité prétentieuse, au toc intellectuel, au mensonge de cette catégorie mondaine, où tout est factice: l'élégance, l'amour, (...) le vice lui-même qui, sous prétexte de politesse et de littérature, s'affuble d'oripeaux mystiques et se couvre de masques sacrés...
Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p.358. Prononc. et Orth.: [ɔ
ʀipo]. Att. ds Ac. dep. 1718. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1200 oripel «lame de cuivre ou de laiton qui présente l'apparence de l'or» (Raimbert de Paris, Ogier le Danois, 9016 ds T.-L.); b) α) 1564 ouripeau «étoffe, broderie ou ornement de faux or ou de faux argent» (Inventaire du Puy-Molinier, fo163 vods Gay);
β) 1659 [éd.] «faux éclat, apparence brillante et trompeuse» (Scarron, Epistre chagrine, Paris, p.7); 2. 1544 plur. «haillons» (Marot, D'un moyne et d'une vieille, 5 ds Epigrammes, éd. C. A. Mayer, p.303). Comp. à l'aide de l'a. adj. orie «doré» (ca 1050, Alexis, éd. Chr. Storey, 581), empr. au lat. aureus «d'or» et de pel, v. peau. Le changement de genre (du fém. au masc.) est dû à l'infl. du suff. -eau*, le mot n'étant plus senti comme un comp. de peau. Fréq. abs. littér.: 89. Bbg. Dauzat Ling. fr. 1946, p.40. |