| OPPOSITION, subst. fém. A. − 1. Position de (deux) choses placées face à face. Synon. symétrie. 2. Spécialement a) ANAT., PHYSIOL. Propriété du pouce humain, lui permettant d'être en contact avec n'importe quel autre doigt (d'apr. Lar. Méd. t.2 1972). b) ASTRON. Distance angulaire de 180oentre deux astres. Lune en opposition avec le soleil. Les tables astronomiques nous mettent à même de prédire, pour une époque très éloignée de la nôtre, les éclipses, les conjonctions, les oppositions des planètes (Cournot,Fond. connaiss.,1851, p.448).Le soleil a, dans le travail qui le chasse à travers l'étendue, à surmonter avec son propre poids l'opposition des planètes qui l'étreignent et le «remontent» (Claudel,Art poét.,1907, p.137). c) SPORTS ♦ ALPIN. ,,Technique d'escalade comprenant toutes les attitudes dans lesquelles le grimpeur adhère au rocher en faisant agir deux forces symétriques opposées`` (Gautrat 1970). Opposition des jambes, des mains, des pieds; monter en opposition. ♦ ÉQUIT. Faire des oppositions. Employer simultanément, mais de façon opposée, les mains et les jambes pour diriger un cheval (d'apr. Tondra Cheval 1979). B. − 1. Effet de contraste résultant de choses très différentes, placées face à face. Synon. discordance; anton. concordance, harmonie.Opposition choquante; opposition de couleurs; être en opposition. Le nombre de ces points de vue ou de ces faces de l'esprit humain est limité à un certain nombre, dont les systèmes les plus divergents en apparence ne peuvent s'écarter. La comparaison réfléchie de ces systèmes fait reconnaître un fonds identique et commun, malgré toute la différence et l'opposition des formes (Maine de Biran,Journal,1817, p.19).L'heureuse opposition d'un blanc mat contrastait avec les couleurs de la rose du Bengale (Balzac,Langeais,1834, p.211): 1. Pour me faire comprendre certaines oppositions d'ombre et de lumière qui avaient été «l'enchantement de sa matinée», il me citait certains tableaux que nous aimions l'un et l'autre et ne craignait pas de faire allusion à une page de Romain Rolland...
Proust,Temps retr.,1922, p.754. ♦ Loc. adv. prép. Par opposition (à). Par contraste (avec), de manière opposée (à). L'école que l'on appelle historique ou traditionnelle, et l'école que, par opposition, l'on appelle rationnelle ou théorique (Cournot,Fond. connaiss.,1851, p.445).À mes yeux, le seul moyen de faire l'apologie des sciences philologiques, et en général de l'érudition, est donc de les grouper en un ensemble, auquel on donnerait le nom de sciences de l'humanité, par opposition aux sciences de la nature (Renan,Avenir sc.,1890, p.211). 2. Rapport d'antinomie établi entre deux choses opposées. Synon. désaccord; anton. conformité, accord.L'opposition entre le volontaire et l'involontaire est d'abord une opposition pour l'entendement (Ricoeur,Philos. volonté,1949, p.325).V. acheteur ex. 4: 2. ... l'opposition entre le maître et l'esclave se développe de façon que le maître perd toute pensée réelle, et que l'esclave, au contraire, forme toute pensée réelle.
Alain,Propos,1932, p.1077. − LING. ,,Rapport qu'on établit entre deux éléments homogènes d'un système linguistique, et qui permet de faire ressortir les différences existant entre eux`` (Mar. Lex. 1951). Opposition distinctive, fonctionnelle; oppositions binaires; oppositions corrélatives et disjonctives. En phonologie et en grammaire, on constate aussi des oppositions bien établies et d'autres qui ne le sont pas (E. Coseriu, Sémantique diachronique structuraleds Trav. Ling. Litt. Strasbourg t.2 no1 1964, p.156). − LOG. Opposition (des propositions). ,,Caractère des propositions ayant même sujet et même prédicat mais différant: soit en quantité ou extension, soit en qualité, soit en qualité et en quantité à la fois`` (Foulq.-St-Jean 1962). C. − 1. [Correspond à opposer II B] Rapport de lutte entre deux/des personnes. Synon. antagonisme; anton. entente.Opposition d'intérêts; entrer en opposition avec qqn; faire de l'opposition (systématique): 3. Beaucoup d'entre eux restent encore sous l'influence de la psychologie de l'âge précédent, alors même que, sur le terrain de la métaphysique et de la physique, ils se savent en opposition absolue avec leurs aînés.
Béguin,Âme romant.,1939, p.80. − PSYCHOL. ,,Ensemble des attitudes et réactions qu'un sujet peut présenter à l'occasion des sollicitations du monde extérieur`` (Psychol. Enfant 1976). Ce complexe d'opposition se traduit par une brusquerie d'attitude, des dispositions combatives, un comportement extraversif (Mounier,Traité caract.,1946, p.97). 2. Action de faire obstacle à, de lutter contre quelque chose. Synon. objection, obstruction, rejet, refus; anton. adhésion, approbation, participation.Peu à peu, et avec le temps, toutes les oppositions étaient tombées (Hugo,Misér.,t.1, 1862, p.210).En tant qu'homme de science, je crois devoir faire acte d'opposition, et de protestation (Teilhard de Ch.,Phénom. hum.,1955, p.339).Ainsi, bien qu'il n'y eût pas encore d'opposition directe à mon action, je voyais à l'horizon s'amonceler les nuages (De Gaulle,Mém. guerre,1959, p.103). 3. Spécialement a) DROIT ♦ ,,Voie de recours de droit commun et de rétraction ouverte sous certaines conditions au défendeur défaillant`` (Barr. 1967). Procès-verbal tendant à saisie, et contenant opposition à cette saisie par la Demoiselle Coralie (Balzac,Illus. perdues,1843, p.596). ♦ Opposition à mariage. ,,Mesure préventive consistant en un acte par lequel certaines personnes qualifiées défendent à l'officier de l'état civil, en raison de l'existence d'un motif légal, de procéder à la célébration du mariage`` (Barr. 1967). Le droit de former opposition à la célébration du mariage, appartient à la personne engagée par mariage avec l'une des deux parties contractantes (Code civil,1804, art.172, p.34). ♦ Opposition sur titres. Procédure spéciale en cas de perte ou de vol de titres au porteur. Voici le plus gros actionnaire du Gil-Blas : il y a opposition sur ses titres (Renard,Journal,1891, p.105). b) ÉCON. Acte par lequel un créancier arrête entre les mains d'un tiers (le banquier tiré) les sommes dues à un débiteur. Faire opposition à un chèque (Gestion fin.1979). c) POL., DR. CONSTIT. ,,Ensemble des partis politiques ou des personnes qui sont opposées d'une manière active au Gouvernement`` (Barr. 1974). Synon. opposants.L'opposition parlementaire. Je vous disais que j'étais dans l'opposition, non dans une opposition démagogique, mais cependant très ferme (Tocqueville,Corresp.[avec Henry Reeve], 1840, p.63).M. Rochefontaine, l'ancien candidat de l'opposition (Zola,Terre,1887, p.363): 4. [Les nationalistes] réclament quotidiennement l'état de siège à Berlin, l'arrestation de tous les chefs de l'opposition, l'interdiction des meetings pacifistes!... Peu importe! Ils ne seront pas les plus forts... Partout, dans toutes les villes de l'Allemagne, le prolétariat s'agite, proteste, menace...
Martin du G.,Thib.,Été 14, 1936, p.418. REM. 1. Oppositif, -ive, adj.a) Bot., vx. Qui peut être placé en face de quelque chose. Étamines oppositives (Littré, Guérin 1892). b) Ling. Qui peut être mis en opposition avec quelque chose. Les phonèmes sont avant tout des entités oppositives, relatives et négatives (Sauss.1916, p.164). 2. Oppositionniste, subst.Membre de l'opposition. Gavarni nous avait dit qu'il y avait une belle chose à faire: une série contre le prêtre; que cela était difficile, qu'il ne fallait pas avoir l'air d'être de la bande des oppositionnistes et des aboyeurs (Goncourt,Journal,1853, p.107). Prononc. et Orth.: [ɔpozisjɔ
̃], [o-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. 1176 «réplique qui a le caractère d'une objection» (Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 4365); 2. fin xiies. «position d'une chose vis-à-vis d'une autre» (Evrat, Genèse, B.N. 12456, fo112 rods Gdf. Compl.); 1269-78 astron. (J. de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 18906). B. 1. 1370-72 «contrariété entre deux choses, différence considérable dans la manière de sentir... de plusieurs personnes» (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, p.169) ; 2. 1567 rhét. «antithèse» (Amyot, Demosth., 14 ds Littré); 1868 log. (ibid.); 1951 ling. (Mar. Lex.). C. 1. 1474 dr. (Ordonnances des rois de France, XVIII, 17 ds Bartzsch); 2. ca 1480 «résistance, obstacle, empêchement» (Mystère du V. Testament, éd. J. de Rothschild, II, 169); 3. 1745 «le parti politique de Grande Bretagne qui s'oppose au parti au pouvoir» (Abbé Le Blanc, Lettres d'un François ds Mack., p.169); 1772 «en France, partie d'une assemblée nationale qui s'oppose à la partie dominante» (L'Ambassadeur de Suède en France à Gustave III ds Fr. mod. t.34, p.97). Empr. au lat. oppositio «opposition, contraste, antithèse», le sens pol. C 3 est dû à l'infl. de l'angl. opposition (1793 ds NED). Fréq. abs. littér.: 2744. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 4724, b) 2849; xxes.: a) 2282, b) 4739. Bbg. Dub. Pol. 1962, p.356. _ Maulnier (Th.). Le Sens des mots. Paris, 1976, pp.165-166. _ Quem. DDL t.11; 1 (s.v. oppositionniste). |