| NULLITÉ, subst. fém. A. − Au sing. Caractère de ce qui est nul (v. ce mot I B 2 a). 1. [En parlant d'une oeuvre, d'une activité hum.] Manque total de valeur. Dans la masse des oeuvres du passé, ce sont encore celles qui n'ont pas de valeur qui font la meilleure figure: leur nullité les protège contre la critique (Larbaud, Barnabooth, 1913, p.347): . Comme gâtées par la nullité de la vie mondaine, l'intelligence et la sensibilité de Mmede Guermantes étaient trop vacillantes pour que le dégoût ne succédât pas assez vite chez elle à l'engouement...
Proust, Guermantes 2, 1921, p.471. 2. [En parlant d'une pers.] Absence de toute qualité, et particulièrement d'intelligence. Synon. bêtise, stupidité, faiblesse, incapacité, incompétence.Et eux aussi!... Tout le monde est donc pour lui?... un homme qui est la nullité même!... (Scribe, Camaraderie, 1837, iii, 2, p.288).Il sait parfaitement mentir, mais a pleine confiance en sa nullité, en son rien (Goncourt, Journal, 1890, p.1269). SYNT. Nullité intellectuelle, morale, de pensée; nullité complète, parfaite, profonde; nullité déplorable, lamentable, prétentieuse. − En partic. Nullité en + subst. désignant un domaine.Absence complète de compétence (dans ce domaine). Sa nullité en mathématiques est notoire (Lar. Lang. fr.). Je pense que vous ne vous faites pas d'illusions sur votre nullité en musique (Colette, Cl. école, 1900, p.65). B. − P. méton., au sing. ou au plur. 1. Fam. Personne nulle (v. ce mot I B 2 b), dépourvue de toute capacité ou connaissance. Synon. nullard (fam. dér. s.v. nul), zéro.Ce sont des gens qui substituent mais en fonction de l'impression unique. Le terme substitué n'est quelconque que chez les nullités ou les faiseurs de réclame (Alain-Fournier, Corresp.[avec Rivière], 1906, p.360).Pour une fois d'ailleurs il donnait sa faveur à quelqu'un qui était loin d'être une nullité et qui pouvait retenir l'attention (Proust, Temps. retr., 1922, p.790). 2. Vieilli. Chose(s) nulle(s) (v. ce mot I B 2 a), sans aucune valeur. Synon. ineptie(s), stupidités.Mais que de nullités, que de non-sens dans ces phrases détachées (Vigny, Journal poète, 1852, p.1302).Elle pleure en rentrant, tant il lui a fallu digérer de bêtises et de nullités sous les formes distinguées de ce monde aristocratique (Goncourt, Journal, 1862, p.1087). C. − DR. et DR. CANON., au sing. ou au plur. [Correspond à nul I B 1 c] Absence de validité d'un acte juridique résultant de l'absence de l'une des conditions de fond ou de forme requises. Nullité absolue, expresse, relative, virtuelle. Ne peuvent se rendre adjudicataires, sous peine de nullité, ni par eux-mêmes, ni par personnes interposées, les tuteurs des biens de ceux dont ils ont la tutelle (Code civil, 1804, art. 1596, p.294). ♦ Acte entaché de nullité. Acte auquel s'attache une cause de nullité. La fameuse lettre sera entachée de nullité pour immoralité, et le tribunal refusera le divorce (Montherl., Démon bien, 1937, p.1281). ♦ Frapper de nullité un acte. Condamner pour nullité un acte. La loi frappe de nullité tout jugement rendu par un tribunal composé d'autres magistrats que ceux ayant siégé à la première audience (Courteline, Client sér., 1897, 3, p.38). ♦ Nullité(s) de mariage. Cause d'absence de validité juridique d'un mariage célébré légalement, mais en l'absence d'une des conditions essentielles de sa validité (défaut de consentement, bigamie, inceste, impuberté, clandestinité et incompétence de l'officier d'état-civil). J'ai supposé cette blessure pour ne point faire un faux, pour ne pas introduire de nullité dans les actes du mariage (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p.660). ♦ Action en nullité. ,,Droit d'ester en justice pour obtenir la déclaration d'une nullité de plein droit`` (Foi t. 1 1968). L'action en nullité peut être intentée par tous ceux qui y ont intérêt (Code civil, 1804, art. 184, p. 37). − THÉOL. Absence de validité d'un sacrement qui l'empêche d'exister. Elles n'y virent que des causes de nullité [à une dernière sommation ou monition canonique], par l'omission de quelques formalités (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 5, 1859, p.549). D. − INFORMAT. ,,Guillemets utilisés dans des tableaux pour remplacer les chiffres absents`` (Comte-Pern. 1963, 1974). REM. Nullitude, subst. fém.,hapax. État, caractère de ce qui est nul. Nullitude du monde, cette fange éphémère (Suarès, Voy. Condottière, t.3, 1932, p.391). Prononc. et Orth.: [nyl(l)ite]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1405 pronuncier de nullite «déclarer sans valeur légale» (Ann. de Bretagne, 4, 57 ds Fonds Barbier); 1747 «caractère de ce qui est nul, sans valeur» (Gresset, Le Méchant, IV, 4 ds Littré); 1812 «personne nulle» (Mozin-Biber). Empr. au lat. médiév. nullitas «nullité, invalidité» (1332 ds Latham). Fréq. abs. littér.: 336. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 802, b) 484; xxes.: a) 487, b)191. Bbg. Gohin 1903, p.302. |