| NOBLEMENT, adv. A. − 1. À la manière des nobles, des gentilshommes. Chacune de ses soeurs a été richement dotée, noblement mariée (Balzac, Mais. Nucingen, 1838, p.595). − Être né noblement. Être noble de naissance. (Dict. xixeet xxes.). − DR. FÉOD. Tenir noblement une terre. La tenir en fief. Terre tenue noblement (DG). − Vivre noblement. Vivre sur ses terres (ou à la ville) en jouissant de ses biens et sans exercer d'activité autre que celle des armes. Synon. vivre en gentilhomme*.C'était une race militaire et fort riche que celle de mes pères. Fort peu courtisans, en général, ils quittaient l'armée pour se marier et vivaient noblement et largement dans leurs terres, faisant du bien et fort aimés de leur province (Vigny, Mém. inéd., 1863, p.41).Je l'entends souvent (...) vanter l'existence du gentilhomme fermier, (...) du grand seigneur qui vit noblement sur ses terres (Feuillet, Veuve, 1884, p.20): 1. On accordait ce droit [de pigeonnier] aux vieux possédants, vivant noblement sur le sol, et dont les terres étaient assez vastes pour donner pâture à des pigeons, qui volent loin, sans dommage pour le voisin.
Pesquidoux, Livre raison, 1925, p.VII. 2. D'une manière qui exclut ce qui n'est pas noble. Une armée si noblement composée (Michelet, Hist. romaine, t.2, 1831, p.263). B. − Avec noblesse. 1. [Sur le plan de l'impression que donne une pers.: en parlant des traits, de l'allure, des manières] D'une manière qui en impose par sa distinction, son élégance. M.Dupuy, qui parlait sans cesse (et jamais trop) de Condillac et de sa logique, n'avait pas l'ombre de logique dans la tête. Il parlait noblement et avec grâce, et il avait une figure imposante et des manières fort polies (Stendhal, H. Brulard, t.1, 1836, p.255).Le moindre mendiant est drapé noblement dans son manteau comme un empereur romain dans sa pourpre (Gautier, Tra los montes, 1843, p.34): 2. ...c'était un visage qui avait été beau. Cinquante années de misère l'avaient émacié, mais les traits étaient demeurés droits et fins, et la barbe encore blonde l'allongeait noblement et donnait à Gilbert Cloquet l'air d'un homme du Nord, scandinave ou normand...
R. Bazin, Blé, 1907, p.9. 2. [Sur le plan moral: en parlant d'un comportement, d'une attitude] Avec des sentiments élevés; avec grandeur, dignité, générosité; sans bassesse ni vulgarité. J'aimerais mieux le voir noblement mort, qu'en vie et traître à son devoir (Ponsard, Lucrèce, 1843, iv, 1, p.68).Copernic (...) était un modeste médecin, ami de l'humanité et ami de la science, consacrant sa vie entière à l'étude de la nature, noblement indifférent pour la fortune comme pour la gloire (Flammarion, Astron. pop., 1880, p.431).M. Ballmeyer père accorda noblement des délais (G. Leroux, Parfum, 1908, p.57). 3. [Sur le plan esthétique: en parlant de la forme ou de l'expression] Avec un caractère de beauté sévère, pure; dans un style noble; sur un ton noble. Deux autres pièces (...) servaient chacune de vestibules à des constructions spacieuses, greffées de part et d'autre sur le bâtiment central, dispositif qui nous avait frappés dès le premier jour parce qu'il amplifiait noblement les façades (Duhamel, Désert Bièvres, 1937, p.88).Les parties haute et basse de la serrure sont revêtues d'une ornementation de feuillage de tôle du plus bel effet; enfin une poignée noblement dessinée sert à tirer la grille (Fillon, Serrurier, 1942, p.21): 3. ... la France n'a jamais plus beau visage que lorsqu'elle se tait. Sa grandeur est monumentale, bien plus qu'oratoire: l'oratoire, l'éloquence est toujours au contraire son danger. C'est qu'elle a le silence le plus noblement expressif qui soit, −l'inverse même du silence morne et mort de mes pourtant si chers amis anglais.
Du Bos, Journal, 1926, p.71. Prononc. et Orth.: [nɔbləmɑ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1140 «de manière digne, convenable» (Voyage de Charlemagne, éd. P. Aebischer, 348); 1370-72 (Oresme, Ethiques, Prol., éd. A. D. Menut, p.100: ... latin est le plus habile pour mieulx exprimer et plus noblement son intencion); 2. xves. [souvent daté à tort 1301] dr. tenir noblement [une terre] (Ordonnance dite de Jean II de Bretagne des Etablissements de St Louis, éd. P. Viollet, t.3, p.196, §XII); 1469 (doc. A. Eure ds Gdf. Compl.). Dér. de noble1*; suff. -ment2*. Fréq. abs. littér.: 408. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 842, b) 595; xxes.: a) 494, b) 399. Bbg. Duch. Beauté 1960, p.134. |