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NAVET, subst. masc.
A. −
1. Plante bisannuelle à racine pivotante de la famille des Crucifères, comprenant de nombreuses variétés. Navets fourragers, potagers; un champ de navets. Je vous avais promis (...) de vous envoyer d'excellentes graines de navets. (...) Mais j'ai appris que 1 il était beaucoup trop tard pour semer des navets... (Flaub., Corresp., 1868, p.390).[Au Danemark] les seules surfaces non destinées au bétail sont consacrées aux navets, à la betterave sucrière et aux pommes de terre (Wolkowitsch, Élevage, 1966, p.139).
P.méton. Racine renflée et comestible de cette plante, à chair blanche ou jaune et de saveur douce et sucrée. Canard, potage aux navets; purée de navets; manger des navets; être blanc comme un navet. On vient de trouver en Prusse l'art de tirer des navets un sucre abondant et excellent (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p.127).Carottes et navets rapés, chou rouge (...) doivent entrer dans les rations alimentaires à côté des salades (R. Lalanne, Alim. hum., 1942, p.102).
P.compar., en appos. avec valeur adj. [P.réf. à la couleur la plus fréq. de cette racine] Blanc navet. Sa peau de rouquin, d'abord d'un blanc navet, passa par un rouge d'écorché (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.152).
Arg. Champ de navets, v. champ1ex.6.
2. P.anal. Faux navet, navet du diable. Racine de la bryone. Bryone (...). Fleurs d'un blanc verdâtre à cinq pétales divisés. Baie rouge, vénéneuse. Plante dioïque. La racine ou Navet du diable a des propriétés médicinales (R. Blais, Flore pratique, Paris, P.U.F., 1945, p.257).
B. − P.anal. ou au fig.
1. [En parlant d'une pers.]
a) Fam. (Sang, jus) de navet. Anémique et, p.ext., qui manque d'énergie, de courage, de combativité. Pauvre petite institutrice de rien du tout! pauvre petite larve bien pensante; avec son sang de navet, ses petites mains et ses petits pieds bien propres (Anouilh, Répét., 1950, iv, p.106):
. ... un de ces bons orchestres parisiens, à sang de navet, aussi incapables de jouer de la musique populaire espagnole qu'ils sont incapables de jouer la neuvième symphonie. Montherl., Pte Inf. Castille, 1929, p.662.
Souvent en loc. verb. Pour moi tous les héros de tragédie (...) n'ont que du jus de navet au lieu de sang dans les veines (Mérimée, Jacquerie, 1828, p.318).
b) Arg. et pop., parfois en emploi adj. (Personnage) niais, sot, imbécile. Et le regardant sous le nez: −Pourquoi qu't'es navet comme ça? (Benjamin, Gaspard, 1915, p.132).−On verra bien, eh navet! que j'ai même encore eu le temps de lui crier (Céline, Voyage, 1932, p.15).
2. Pop., vx. Des navets! [Interjection exprimant un refus mêlé de mépris, une incrédulité ou le fait qu'on n'est pas dupe de ce qui vient d'être dit] Synon. des nèfles! mon oeil!Tous les bas mots de voyou: des navets! et ta soeur! oh là, là!, tout cela semble écrit par ces ronds de jambe, qui font la grâce crapuleuse (Goncourt, Journal, 1865, p.143).Auprès des femmes, faut être rupin et avoir de l'os, sans ça, des navets! (Avenel, Calicots, 1866, p.133).
3. [En parlant d'une réalisation artist. ou littér.]
a) Mauvais tableau. Synon. croûte.Un navet! tous répétaient le nom avec conviction, ce mot qu'ils jetaient d'habitude aux dernières des croûtes, à la peinture pâle, froide et plate des barbouilleurs (Zola, OEuvre, 1886, p.305).
b) OEuvre d'art, spectacle sans valeur; très mauvais film. Ce navet inouï, Théodora, où l'on chantait dans la coulisse, en l'honneur de l'impératrice débauchée, et même débouchée (L. Daudet, Brév. journ., 1936, p.54).Et vous en faites un autre [film] (...) on a annoncé cela dans les journaux (...) un autre qui va être aussi un navet (Vialar, Tournez, 1956, p.79).
REM.
Naveau, naviau, subst. masc.,var. région. (Centre et Canada) de navet au sens A. Colladan (à son fils): Et des naviaux! faites-vous des naviaux [à Grignon]? Sylvain: des naviaux? mais oui (...) nous en faisons par-ci par-là... (À part) Qu'est-ce que ça peut être? Colladan: Bonne chose les naviaux!... mais faut de l'engrais (Labiche, Cagnotte, 1864, II, 3, p.70).
Prononc. et Orth.: [navε]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Fin xiies. (Audigier, éd. O. Jodogne, 480: Hersoir menja navéz et civotee); 1269-78 exprime une valeur minime (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 17878, cf. Fr. Möhren, Le renforcement affectif de la négation par l'expr. d'une valeur minimale en a. fr., p.171); 1843 des navets! exprimant un refus (Ch. Dupeuty et P.Cormon, Les cuisines parisiennes, vaudeville ds J.-M. Klein, Le Vocab. des moeurs [...] sous le second Empire, 1976, p.140); 1867 plur. peint. (Delvau). Dér., à l'aide du suff. -et*, de l'a. fr. nef «navet» (1174-76 Guernes de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, 3617 ds T.-L.), issu du lat. napus «navet». Cf. le dér. en -el (-eau*) a. fr. navel (ca 1200 Graindor de Douai, Antioche, éd. S. Duparc-Quioc, 1372; 1260 plur. naviaus Etienne Boileau, Métiers, 334 ds T.-L.: oignons, poiriaus, naviaus...). Fréq. abs. littér.: 159. Bbg. Quem. DDL t.7, 19, 20.