| MÉNAGEMENT, subst. masc. A. − Vx. Art de bien diriger, de bien conduire quelque chose. Il soutenait la guerre par le simple fruit des économies, et le ménagement habile du crédit (Staël,Consid. Révol. fr., t.1, 1817, p. 63). B. − [Correspond à ménager1I C] 1. Attitude, manière d'agir avec beaucoup d'égards, de réserve envers quelqu'un. Parler avec/sans ménagement; dire, exposer, raconter qqc. sans ménagement; céder par ménagement aux vues de qqn; gouverner qqn sans ménagement. Je suis donc pamphlétaire? Je ne vous l'eusse pas dit par égard, ménagement, compassion du malheur; mais c'est la vérité (Courier,Pamphlets pol., Pamphlet des pamphlets, 1824, p. 210).«Ne gratte pas tes boutons, ne tourne pas ton nez», me répétait mon père. Sans méchanceté, mais sans ménagement, il faisait sur mon teint, mon acné, ma balourdise, des remarques qui exaspéraient mon malaise et mes manies (Beauvoir,Mém. j. fille,1958, p. 103): 1. ... par excès de précaution pour la sensibilité d'Emma, Charles avait prié M. Homais de lui apprendre avec ménagement cette horrible nouvelle. Il avait médité sa phrase, il l'avait arrondie, polie, rythmée; c'était un chef-d'oeuvre de prudence et de transition, de tournures fines et de délicatesse...
Flaub.,MmeBovary, t. 2, 1857, p. 96. − P. anal. [En parlant d'un inanimé concr.] Il arrive, salue tout le monde et cherche une place pour son chapeau melon qu'il traite avec ménagement, comme un attribut sacré de la personne joséphienne (Duhamel,Terre promise,1934, p. 171). 2. Au plur. Actes, procédés, attentions particulières dont on use envers quelqu'un afin de ne pas le choquer, le peiner, de ne pas lui déplaire. Répondre sans ménagements; être traité sans ménagements; user de ménagements. Les droits de la critique sont de dire nettement et clairement son avis; de juger impitoyablement un livre, sans considérations aucunes, sans ménagements, sans égards aux réclamations de l'auteur (Chateaubr.,Martyrs, t. 1, 1810, p. 110).Il parlait vivement et sans retenue, disant toute sa pensée avec ignorance des ménagements (Maupass.,Contes et nouv., t. 2, Ami Jos., 1883, p. 1263): 2. Les femmes citaient monsieur le premier président comme un des hommes les plus délicats, le plaignaient et allaient jusqu'à souvent accuser la douleur, la passion d'Eugénie, mais comme elles savent accuser une femme, avec les plus cruels ménagements.
Balzac,E. Grandet,1834, p. 254. − En partic. [En parlant d'une pers. âgée ou malade] Soins particuliers, attentions particulières destinées à éviter des soucis, de la fatigue à quelqu'un. Santé qui demande des ménagements. Le froid est si vif que je gèle sous ma couverture. Je suis arrivée à un âge où j'ai besoin de ménagements (Balzac,E. Grandet,1834p.189).Laura était très fatiguée et (...) son état (elle commence son troisième mois de grossesse) exigeait beaucoup de ménagements (Gide,Faux-monn.,1925, p.1067): 3. Les deux médecins répétèrent une fois encore qu'il fallait de grands ménagements. On ne pouvait trop prendre de précautions avec ces affections chloro-anémiques, qui favorisent le développement de tant de maladies cruelles.
Zola,Page amour,1878, p. 950. Prononc. et Orth.: [menaʒmɑ
̃]. Ac. 1694, 1718 mesnagement; dep. 1740 ménagement. Étymol. et Hist. 1. 1551 «gouvernement de la maison» mesnagement de notre mestairie [Cotereau, trad. de Columelle, XI, 1 ds Hug.); en partic. a) 1587 «bon exercice de l'administration domestique» bon mesnagement (La Noue, Disc. polit. et milit., XX, p. 429, ibid.); b) début xviies. «mesure et économie dans la gestion et le comportement» (D'Aubigné, Lettres Familieres, X ds
Œuvres, éd. Réaume et de Caussade, I, 361); 2. 1665 «mesure, réserve dont on use envers quelqu'un» un ménagement réciproque d'intérêts (La Rochefoucault, Réflexions ou sentences et maximes morales, LXXXIII ds
Œuvres, éd. M. D. L. Gilbert, I, 66). Dér. de ménager1*; suff. -(e)ment1*. Fréq. abs. littér.: 538. Fréq. rel. littér.: xixes.: a)1131, b) 809; xxes.: a) 579, b) 540. |