| MÉDAILLE, subst. fém. A. − 1. Pièce de métal généralement circulaire, fabriquée en l'honneur d'un personnage illustre, dont elle porte l'effigie, ou en souvenir d'un événement, d'une action mémorable. Minos, fils et disciple de Jupiter, a, dans les médailles, les mêmes traits que son père (Staël,Allemagne,t.2., 1810, p.71).On peut supposer, avec vraisemblance, qu'il est exécuté [le François Ierde Titien] d'après quelqu'une de ces médailles que la Renaissance savait si bien modeler (Gautier,Guide Louvre,1872, p.75): 1. Au coin de la rue Saint-Florentin, un épicier libéral le harangua et lui décerna une médaille de bronze à l'effigie de La Fayette.
A. France,Pt Pierre,1918, p.186. SYNT. Médaille d'or, d'argent, de cuivre, de bronze; médaille à fleur de coin; médaille antique; cabinet des médailles; collection de médailles; médaille commémorative, consulaire, impériale; frapper, fondre, couler, mouler une médaille; le module, le coin, le poinçon, la matrice d'une médaille; le corps, le champ, l'exergue, la légende, l'avers, le revers d'une médaille. − Locutions ♦ Le revers* de la médaille. ♦ Frappé en médaille. Aux traits, aux contours fortement marqués. Laissons Tacite avec sa manière à lui et son génie. Les hommes ne sont pas faits généralement pour être ainsi frappés en médaille d'un coup et coulés en bronze (Sainte-Beuve,Nouv. lundis,t.8, 1864, p.230).Il est peu d'orateurs dont on puisse citer autant de phrases [de Lacordaire] frappées en médaille (Thibaudet,Hist. litt.,1936, p.261). ♦ Profil, tête de médaille. Profil, tête dont les traits ont la régularité et le caractère marqué de ceux des médailles. Il était bien, lui, un Latin de la conquête avec sa tête de médaille aux larges méplats sur les joues, et son teint chaud (A. Daudet,N. Roumestan,1881, p.97).Brun, à peine grisonnant, bien qu'il touchât à la cinquantaine, il avait une grosse tête, au profil de médaille, avec des yeux vifs et clairs (Zola,Vérité,1902, p.114).Véronique (...) est une bonne vieille, très brune, suivant le type de l'île, avec un calme visage et un profil de médaille (Loti,Chât. Belle-au-bois-dorm.,1910, p.16). ♦ Tourner la médaille (vx). Regarder l'autre face de quelque chose. (Ds Littré, Guérin 1892). ♦ Vieille médaille (vx). ,,Vieille femme. C'est une vieille médaille`` (Ac. 1798-1878). − P. métaph. Médaille de + subst.Des petites médailles d'écume blanche se détachent d'un bouillon et s'en vont à la dérive, au fil de l'eau (Renard,Journal,1889, p.26).[La chatte] s'assit sur la petite table du déjeuner, parmi les médailles de soleil (Colette,Chatte,1933, p.29). 2. P. anal. a)
α) NUMISM. Pièce de monnaie antique (grecque, romaine). C'est la même ignorance que nous trouvions (...) chez ces pauvres enfants qui nous vendirent des médailles romaines arrachées à ces terrains déserts (Barrès,Homme libre,1889, p.105). ♦ Médaille restituée*, fruste*, fourrée*, incuse*, saucée*. ♦ Médaille inanimée. Médaille qui n'a point de légende. (Ds Littré, Guérin 1892, Rob.). ♦ Médaille encastrée. Médaille fabriquée par les faussaires à partir de deux pièces antiques en joignant l'avers de l'une au revers de l'autre (Ds Littré, Guérin 1892, Rob.). ♦ Médaille martelée. Médaille dont on a martelé le revers qui était commun pour frapper à la place un revers rare. (Ds Ac., Littré, Guérin 1892, Rob.). ♦ Médaille éclatée. Médaille dont les bords se sont fendus lorsqu'on l'a frappée. (Ds Littré, Guérin 1892, Rob.).
β) Arg., vieilli. Pièce de monnaie. [Parlant ainsi, il montrait] quatre pièces de cinq francs à l'auditoire anxieux. Voilà ma part, dit l'opinant en jetant les médailles dans son képi (A. Camus,Bohèmes,1863, p.113). b) ARCHIT., vx. Petit bas-relief circulaire présentant généralement un portrait ou une effigie. Synon. médaillon.Sans doute le bas-relief et les figures des médailles, qui appartiennent à l'architecture, furent d'abord l'oeuvre du temps (Alain,Beaux-arts,1920, p.180). B. − 1. Petite pièce de métal de forme diverse, frappée d'un sujet de dévotion, qu'on porte sur soi ou sur ses vêtements. Médaille pieuse; médaille de la Vierge; médaille de première communion. J'ouvre la boîte et je vois sur un lit d'ouate cinq médailles bénites (Mirbeau,Journal femme ch.,1900, p.285).Des médailles de sainteté que sa mère le force à porter (Gide,Faux-monn.,1925, p.1097): 2. La dame avait fouillé dans son sac et en avait sorti une médaille de saint Christophe, en argent: d'un côté, le patron des accidentés avec l'enfant Jésus sur l'épaule, traversant un fleuve, de l'autre une route avec un soleil couchant et une automobile qui se heurte contre un arbre.
Aragon,Beaux quart.,1936, p.413. 2. P. anal. Petite pièce de métal représentant des sujets divers qu'on porte, parfois comme amulette, en breloque ou à une chaîne de cou. À côté, un camelot vendait je ne sais quelles médailles (Larbaud,Barnabooth,1913, p.196).Madame mère (...) saisit également tous objets de valeur en notre possession: timbales d'argent de nos baptêmes, chaînes de cou à médailles d'or (H. Bazin,Vipère,1948, p.58). C. − 1. Pièce de métal précieux donnée en prix au lauréat d'un concours, d'une exposition ou au vainqueur d'une compétition, et gravée en l'honneur de ce prix. Médaille d'or, d'argent, de bronze; médaille de vermeil; médaille de l'Exposition universelle; médaille olympique; médaille du pentathlon; obtenir, gagner, rafler, laisser échapper une médaille; moisson de médailles. Le jury central, appréciant le mérite d'une pareille fabrication, lui a décerné une médaille d'argent (Nosban,Manuel menuisier,1857, p.97).M. Roll a exposé, en 1877, je crois, une scène d'inondation qui lui valut une médaille (Huysmans,Art mod.,1883, p.27).La médaille de bronze du quatre fois cent mètres masculin peut s'entendre comme le signe d'un progrès en profondeur (Jeux et sports,1967, p.1232). − P. méton., loc. Être médaille d'or, d'argent, (à, de qqc.). Avoir obtenu la médaille d'or, d'argent pour une victoire, une réussite, dans tel ou tel domaine. Être médaille d'or au slalom. P. ext. Être le premier, le meilleur dans son genre, son domaine. En étudiant leur mentalité, Adam Smith II trace des Américains d'aujourd'hui un portrait psychologique dont la portée dépasse les milieux boursiers et qui fait la joie de ses concitoyens puisque «The Money Game» est actuellement médaille d'or des best-sellers (Anouilds Réalités,déc. 1968, p.121, col.2). − SPORT DE GLACE (patin. artist.). ,,Test que le patineur doit passer s'il veut faire de la compétition et dont la réussite est symbolisée par une petite plaque ronde et un diplôme`` (M. Bassegoda v. bbg. infra, p.145). Médaille préliminaire, préparatoire, pré-bronze, de bronze, d'argent, petit or, d'or, grand or. (M. Bassegoda v. bbg. infra, p.146-148). 2. Distinction accordée à titre honorifique à une personne qui s'est signalée par ses mérites professionnels ou civiques, pour ses actes de courage, pour sa conduite aux armées ou sa participation aux opérations de défense nationale. Médaille du travail, de la famille française; médaille du Tonkin, des déportés, de la Résistance; obtenir, recevoir, arborer, remettre, refuser une médaille. Il donna une chiquenaude à sa médaille coloniale. «Je vas vous montrer des photos de mes campagnes, hein?...» (Dabit,Hôtel Nord,1929, p.178).Il comptait plus ses médailles. Sur son costard le dimanche, ça lui faisait comme une carapace... (Céline,Mort à crédit,1936, p.402): 3. M. Léo Larginer pensait déjà, en ce temps-là, à être un jour décoré de la Légion d'honneur. Il ne disait pas: quand j'aurai la croix. Non. C'eût été trop plat. Il disait: quand j'aurai la médaille. Comme un vieux grognard, quoi.
Léautaud,Théâtre M. Boissard,1943, p.131. − En partic. ♦ HIST. Médaille de Sainte-Hélène (Ac.). Médaille commémorant les opérations militaires ayant eu lieu sous la Révolution et l'Empire (1792-1815). ♦ Médaille militaire. Médaille instituée par décret du 22 janvier 1852 pour honorer les soldats et sous-officiers qui se sont distingués lors de campagnes ou lors d'opérations militaires. On lui remit (...) les lettres, les certificats et la boîte contenant la médaille militaire (Loti,Pêch. Isl.,1886, p.168): 4. Le brancardier Roger Vanier, du 101erégiment, a reçu la médaille militaire pour sa conduite au Bois Sabot les 26, 27 et 28 février 1915, avec ce motif: «A fait preuve d'un dévouement et d'un courage héroïques. (...)».
Bordeaux,Fort de Vaux,1916, p.251. − Par dérision. Médaille en chocolat. ,,Médaille de Sainte-Hélène, − dans l'argot des faubouriens, par allusion à sa couleur de bronze noir`` (Delvau 1883). P. ext. Toute distinction honorifique. − Loc. fig. Obtenir la médaille. Avoir la préférence. Comme proposition qui me plaît, la vôtre obtiendrait la médaille (A. Gill,Let. à Vallès, juill.-août 1872ds Quem. DDL t.6). D. − Plaque de métal numérotée dont le port est requis dans certaines professions. Médaille de porteur, de garde-champêtre. Qu'il prenne le numéro de la médaille de cet homme [de ce charbonnier], je porterai mes plaintes à la police [Scène datée 1818, Paris] (Vidocq,Mém. Vidocq,t.4, 1828-29, p.150). E. − BOT. Médaille (de Judas). Synon. de lunaire. (Dict. xixeet xxes.). Prononc. et Orth.: [medaj]. Passy 1914: [-a-] ou [-ɑ-]. Ac. 1694, 1718: me-; dep. 1740: mé-. Étymol. et Hist. 1. 1496 «monnaie d'or en usage en Italie et au Levant» (Commynes, Mém., VII, 11, éd. J. Calmette, t.3, p.67) − 1554, Thevet d'apr. FEW t.6, 1, p.572a; 2. 1536 «pièce de métal frappée à l'effigie d'un personnage illustre ou pour commémorer un événement et servant d'ornement» (Inv. de Charles Quint ds La Curne); 1561 medalle «id.» (Inv. des meubles du château de Pau, 67 ds IGLF: une medalle d'or d'un Christ au vif); 1640 au fig. le revers de la medaille «le contraire d'une chose» (Oudin Curiositez, s.v. revers); 3. 1540-50 medalle «cartouche rond sculpté» (Comptes des bâtiments du Roi, éd. L. de Laborde, t.1, 192 ds IGLF); 4. 1758 «pièce de métal précieuse donnée en récompense de certains mérites» (Voltaire, lettre du 22 janv. à M. d'Argental ds Corresp., éd. Th. Besterman, t.33, p.70); 5. 1828-29 «plaque de métal constituant le signe distinctif obligatoire d'une profession» (Vidocq, loc. cit.). Empr. à l'ital. medaglia, attesté au sens «monnaie ancienne valant environ un demi-denier, en usage dans le Nord de l'Italie, dans les États pontificaux, à Malte, etc.» dep. la 2emoitié du xiiies. (Guittone d'Arezzo) et au sens 2 dep. fin xve-début xvies. (Léonard de Vinci ds Batt.), de même orig. que maille2*. Fréq. abs. littér.: 803. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 946, b) 1143; xxes.: a) 1456, b) 1118. DÉR. 1. Médailleur, subst. masc.Artiste qui grave les coins servant à fabriquer les médailles ou les monnaies. Synon. médailliste (infra).Il m'arrive encore de recevoir (...) des articles (...) où l'on cite comme preuve de ma sottise mes meilleures pages, tu sais, sur les médailleurs italiens (Larbaud,Barnabooth,1913, p.345).La belle tête paisible de Carl-Gustav Carus a inspiré peintres, sculpteurs et médailleurs (Béguin,Âme romant.,1939, p.124).Il faut attendre la fin du XVesiècle pour voir resurgir le portrait monétaire, en Italie (...). Ce qui y fait suite, c'est toute la numismatique moderne, et jusqu'à nos jours les portraits des chefs d'État, où s'évertue le talent des médailleurs officiels (L'Hist. et ses méth., 1961, p.361).− [medajoe:ʀ]. Att. ds Ac. 1935. − 1reattest. 1812 (Boiste); de médaille, suff. -eur2*. 2. Médailliste, subst. masc.a) Artiste qui grave les coins des monnaies ou des médailles. Synon. médailleur (supra).Il entrait dans un atelier de médailliste, où se creusaient des coins, où on incisait le métal (Goncourt,Journal,1894, p.587).En dépit des réalisations de David d'Angers, les médaillistes ne produisent plus que des oeuvres impersonnelles, indifférentes et sans vie (Kunstler,Art. XIXes. Fr.,1954, p.129).b) Vx. Collectionneur ou connaisseur de médailles. Grand, habile, fameux médailliste (Ac.1798-1878).− [medajist]. Même cas que médaillier en ce qui concerne yod. Att. ds Ac. 1694-1878; ds Ac. 1694 et 1718: medailliste; dep. 1740: médailliste. − 1resattest. a) 1609 médalliste «collectionneur, amateur de médailles» (P. de L'Estoile, Mémoires-journaux, 28 mars, éd. G. Brunet, A. Champollion, E. Halphen, etc., t.9, p.236: un nommé Menestrier [...] qui estoit en réputation partout d'un des plus grands antiquaires et médallistes de nostre temps), b) 1690 médailliste «graveur de médailles» (Fur.); de médaille, suff. -iste*. BBG. − Bassegoda (M.). Ét. du vocab. du patinage artistique... Nancy, 1980, pp.145-148. (Thèse). _ Hope 1971, p.44. _ Quem. DDL t.10, 11. |