| MUTILATION, subst. fém. A. − Ablation accidentelle ou volontaire, retranchement d'un membre ou d'un organe externe qui cause une atteinte grave et irréversible; résultat de cette action. Synon. amputation.Mutilation rituelle, sexuelle. Quand on l'eut sorti, il n'avait plus de jambes, il expira tout de suite, sans avoir su ni senti cette mutilation horrible (Zola,Bête hum., 1890, p.227): . Au début, on s'était apitoyé sur sa mutilation; mais il paraissait si joyeux, il montrait un tel oubli des horreurs de la guerre, disant: «Un bras, ça m'aurait embêté, parce que les mains, c'est bath pour farfouiller partout, mais une jambe! C'est si bête un pied!»
Benjamin,Gaspard, 1915, p.145. ♦ Mutilation volontaire. Synon. de automutilation.La mutilation volontaire pour s'exempter du service militaire est punie d'emprisonnement (loi du 21 Mars 1832, art.41), et, après l'expiration de la peine, le mutilé est envoyé faire son temps dans une compagnie de pionniers (Bouillet1859). − En partic. Synon. de castration.Baudoin propose heureusement de ne plus parler de complexe de castration, mais de complexe de mutilation (Mounier,Traité caract., 1946, p.146). − P. anal. Grave dommage apporté à la forme, à la croissance (d'un arbre). Tous les arbres appartenant à la commune sont impitoyablement amputés (...). Un vieux chirurgien-major de l'armée d'Italie (...) osa bien un jour se plaindre (...) de la mutilation périodique de ces beaux arbres (Stendhal,Rouge et Noir, 1830, p.8). B. − P. anal. 1. [Correspond à mutiler B 1] Dégradation, destruction partielle. Synon. détérioration, massacre (fam.).Mutilation d'un monument. La mutilation systématique et régulière des sculptures [du temple de Khons] ne peut être attribuée qu'aux premiers chrétiens (Du Camp,Nil, 1854, p.216).[Le musée] du Capitole, où les statues sont présentées dans la franchise de leur mutilation, de leur état incomplet (Thibaudet,Réflex. litt., 1936, p.204). 2. [Correspond à mutiler B 2] Synon. de altération, amputation.Quelque ennuyeuse et difficile que soit la tâche de corriger les mutilations et les déformations des textes cités (Lénine,Matérial. et empiriocritic., 1933, p.81). C. − Au fig. 1. [Correspond à mutiler C 1] a) Altération, déformation. Synon. fam. maquillage.Défaut des savants: ils croient qu'ils observent quand ils découpent des séries de faits en les isolant. Cet isolement est une mutilation (Bourget,Actes suivent, 1926, p.7). b) Réduction, suppression. [Le pouvoir de mal choisir] ne marque-t-il pas une diminution et comme une mutilation de la liberté elle-même? (Gilson,Espr. philos. médiév., 1932, p.115). 2. [Correspond à mutiler C 2] Suppression de quelque qualité essentielle. Synon. dégradation, diminution.La grossesse est surtout un drame qui se joue chez la femme entre soi et soi; elle la ressent à la fois comme un enrichissement et comme une mutilation (Beauvoir,Deux. sexe, t.2, 1949, p.307). Prononc. et Orth.: [mytilasjɔ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1340 «retranchement d'un membre ou autre partie du corps» (Lett. de Ph. de Val., A. N. JJ 73, fo250 vods Gdf Compl.); 2. 1559 «dégradation partielle d'une oeuvre d'art» (Amyot, Nic., 23 ds Littré); 3. 1773 «déformation d'un texte» (D'Alembert, Lettre au roi de Pr., 9 avr., ibid.); 4. 1865 fig. «altération sensible» (Proudhon, Pornocratie, p.46). Empr. au lat. mutilatio «mutilation». Fréq. abs. littér.: 143. |