| MUNITION, subst. fém. Gén. au plur. A.− 1. Vieilli. Approvisionnement en vivres et en armes d'une place forte, d'une armée. Les arsenaux du roi catholique regorgeaient de munitions de guerre. Rien que dans les trois salles d'armes de Lisbonne, il y avait des corselets pour quinze mille hommes de pied, et des cuirasses pour dix mille cavaliers (Hugo, Rhin,1842, p. 430): 1. Les produits matériels qui sont consommés dans l'intérêt du public, sont les munitions de guerre et de bouche, nécessaires à l'entretien des armées; les provisions que réclament les hôpitaux, les prisons, et en général toutes les personnes à l'entretien desquelles l'état pourvoit directement.
Say, Écon. pol.,1832, p. 476. − Au sing. ♦ Fusil de munition (v. fusil B). ♦ Pain de munition. Boule de pain que l'on distribuait aux soldats. Nous reçûmes chacun une miche de pain de munition et un billet de logement (Erckm.-Chatr., Conscrit1813, 1864, p. 70).Plusieurs soldats entendant des représentants dire qu'ils n'avaient pas mangé depuis le matin, leur offrirent de leur pain de munition (Hugo, Hist. crime,1877, p. 89). 2. P. anal. Provisions. On clouait chez Callé les rideaux aux fenêtres, on matelassait même au besoin les issues afin de ne point voir le jour et la fête durait jusqu'à l'épuisement total des buveurs et des munitions (Carco, Montmartre,1938, p. 140). ♦ Au sing. Ton offre de linge me fait grand plaisir. Je compte sur toi pour le linge de luxe, cravates, gants. Il m'en faut une munition (Renard, Corresp.,1886, p. 62). − Loc. fig. Faire munitions de tout (v. faire feu de tout bois, s.v. feu I B 1 a β; faire flèche de tout bois, s.v. bois II C 4 a).Il s'écarte un peu, tire son calepin et écrit ce qu'il vient de dire. Tout lui sert : il fait copie et munitions de tout. Rien ne se perd; tout fait livre (Goncourt, Journal,1862, p. 1058). B.− Usuel. Explosifs et projectiles, en particulier ceux qui sont nécessaires au chargement des armes à feu. Cyrus Smith (...) recommandait toujours de ménager les munitions, et il prit des mesures pour remplacer la poudre et le plomb (...) qu'il voulait réserver pour l'avenir (Verne, Île myst.,1874, p. 282).Chaque base comportait (...) un grand nombre de remorqueurs et d'allèges pour le transbordement des munitions, des vivres et du combustible apportés par des transports (Le Masson, Mar.,1951, p. 58).Les sociétés de tir dépendaient, jusqu'en 1939, du Ministère de la Guerre; elles avaient, entre autres missions, celle d'entraîner les réservistes et recevaient à cet effet des armes et des munitions gratuites, ce qui les aidait grandement (Jeux et sports,1967, p. 1454): 2. ... c'est vraiment à partir de ce moment que la question des munitions devint angoissante. Vers la fin de septembre, la dotation totale des armées tomba à 400 coups par pièce; les échelons des gares régulatrices étaient vides, les entrepôts n'avaient plus qu'une faible réserve : 30 lots (soit 45 coups par pièce). La production journalière n'était à ce moment que de 8 à 10 000 coups par jour.
Joffre, Mém.,t. 1, 1931, p. 429. SYNT. Munitions réglementaires; munitions à douille; munitions de 75; munitions d'artillerie, d'infanterie, de campagne, de chasse, de guerre; magasin, soute, voiture à munitions; bateau, caisse, convoi, dépôt, fourgon, stock, train, usine, wagon de munitions; approvisionnement, consommation de/en munitions; fabrication, répartition, transport de(s) munitions; dotation, ravitaillement en munitions; fabricant, marchand de munitions; ouvrière en munitions; fabriquer, fournir, amener des munitions; économiser, épargner, épuiser les munitions; manquer de munitions. ♦ Au sing., rare. Les pistolets, d'un calibre de 5,5 mm, utilisent la munition 22 court; cette munition, étant moins brutale au départ du coup, dépointe moins l'arme (Jeux et sports,1967, p. 1460). − P. plaisant. [Les gamins] occupaient une position stratégique très forte, embusqués derrière les arbres, tout près d'un tas de munitions préparé pour la réfection de la chaussée (Queneau, Pierrot,1942, p. 100). Prononc. et Orth. : [mynisjɔ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. xives. [post 1325] « fortification, ouvrage de défense » (Propriété des choses, II, 1, 1 ds T.-L.); 2. 1532 « provisions de bouche » (Rabelais, Pantagruel, XX, éd. V. L. Saulnier, p. 165); 1534 (Id., Gargantua, III, éd. R. Calder et M. A. Screech, p. 31 : bonne munition de jambons de Magence et de Baionne); spéc. 1562 pain de munition (Du Pinet, Hist. du monde de Pline Second, t. 2, p. 13); 3. 1552 « projectiles, poudre, cartouches » (Rabelais, Quart livre, Prol., éd. R. Marichal, 257). Empr. au lat. munitio, dans la lang. class. « travail de terrassement, de fortification; fortification, rempart »; à l'époque médiév. « provisions de bouche » (1180), « équipement d'un navire » (1198 ds Nov. gloss.). Fréq. abs. littér. : 503. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 358, b) 785; xxes. : a) 303, b) 1 229. DÉR. Munitionner, verbe trans.,vieilli. Approvisionner, pourvoir de munitions. Synon. munir (v. ce mot A).Munitionner une place (Littré). Part. passé adj. Dans tous les cas, la guerre contre des positions fortifiées va devenir de plus en plus notre lot (...). Qu'exige-t-elle? Une artillerie de siège, nombreuse, bien munitionnée, adéquate à la place visée (Foch, Mém.,t. 1, 1929, p. 249).− [mynisjɔne]. − 1resattest. 1562 chasteau munitionné (Du Pinet, Hist. du monde de Pline Second, VI, 11, t. 1, p. 208), 1587 (Hist. pit. du Prince Erastus, fol. 119 vods Gdf. : ayant munitionné et armé la galere); de munition, dés. -er. BBG. − Quem. DDL t. 10. |