| * Dans l'article "MONTRER,, verbe trans." MONTRER, verbe trans. I. − Emploi trans. A. − Faire voir, faire apparaître. 1. Exposer aux regards. a) [Le suj. désigne une pers.] Mettre sous ou devant les yeux. Synon. étaler, exhiber, présenter.Relevant un peu le drap de son lit, elle montra à l'artiste ses épaules, son cou et ses bras (Murger,Scènes vie boh.,1851, p.294).Il savait que j'allais l'entraîner dans ma chambre non pas pour lui montrer mes jouets mais pour lui en donner (Cendrars,Bourlinguer,1948, p.145): 1. ... à Paris, presque tout le monde a deux femmes, c'est presque un minimum. Mais on ne les montre pas en même temps. Généralement on montre sa femme et on cache sa maîtresse, ou bien, ça commence à se faire beaucoup, on montre sa maîtresse et on cache sa femme.
Flers, Caillavet,M. Brotonneau,1923, III, 5, p.22. SYNT. Montrer son livret, ses papiers, son passeport; montrer ses bijoux, ses vêtements; montrer un cheval, une vache à un connaisseur; montrer des animaux dressés, la lanterne magique, des marionnettes; montrer un malade ou une blessure à un docteur; montrer son derrière, ses fesses à qqn. − En partic. Faire visiter, faire connaître. Montrer une ville à qqn de passage; montrer sa maison à un ami. Il me reçoit, pourtant, de manière affable et me montre son atelier pendant une heure (Bloy,Journal,1893, p.89).Mrs Edith voulut nous montrer elle-même nos chambres. Elle nous fit traverser des salles aux plafonds effondrés, aux parquets défoncés, aux murs moisis (G. Leroux, Parfum,1908, p.41). − Loc. à valeur souvent fig. ♦ Montrer le poing à qqn/qqc. Faire un geste de menace (à quelqu'un, quelque chose); menacer (quelqu'un, quelque chose). La société recommença à s'impatienter, se fâcha contre l'orage, jurant et montrant le poing aux nuées (Zola,Assommoir,1877, p.440).De la tribune de la chambre à la tribune du Reichstag, des ministres, selon les jours, se montrent le poing ou se tendent les bras (J.-R. Bloch, Dest. du S.,1931, p.186). ♦ Montrer les dents/les gencives. Être menaçant. Vous serez forcé de montrer les dents à votre nouveau parti pour en tirer cuisse ou aile (Balzac,Illus. perdues,1839, p.515).Il se renfrogna pour tout de bon et montra les gencives (Cladel,Ompdrailles,1879, p.47): 2. ... je ne m'en servirai pas: il me suffira de montrer les dents. J'éprouvais pour la première fois de ma vie, le contentement d'être le moins mauvais. Je n'avais pas envie de me venger d'eux.
Mauriac,Noeud vip.,1932, p.188. ♦ Montrer les/ses griffes. Manifester de l'agressivité; menacer. Synon. sortir ses/les griffes*.Les gens trop bons, trop doux, trop patients, incapables de montrer les griffes et les dents, font mépriser la vertu au vulgaire (Amiel,Journal,1866, p.205). ♦ Montrer les talons. S'en aller, s'enfuir. Synon. tourner les talons.Comme je me mettais en frais de gestes et de démonstrations pour lui faire comprendre qu'il ne me manquait plus rien et lui épargner de nouvelles fatigues, il m'a montré les talons en gagnant le pays à la course (Nodier,Fée Miettes,1831, p.168). ♦ Montrer la lune en plein midi. Faire croire des choses invraisemblables. Synon. faire voir la lune* en plein midi, faire prendre des vessies pour des lanternes.Ce noble se fâche! Il nous montre la lune en plein midi (Cladel,Ompdrailles,1879, p.70). ♦ Fam. Montre voir. Synon. voyons voir.La religieuse: Montre voir. Mon petit soldat. Premier soldat: C'est trop sale et trop vilain pour vous (Claudel,Soulier,1944, épilogue, 2, p.1093). b) [Le suj. désigne une chose] Représenter, reproduire. La lithographie à l'aquarelle de ce numéro-spécimen (...) ne peut, dès maintenant, montrer les modes de septembre (Mallarmé,Dern. mode,1874, p.715).Les Libyens que nous montrent les monuments égyptiens de la dix-neuvième dynastie (Vidal de La Bl.,Princ. géogr. hum.,1921, p.128). 2. a) [Le suj. désigne une pers.] Faire voir au moyen d'un signe ou d'un geste qui attire le regard, l'attention. Synon. désigner, indiquer, signaler.Montrer qqc. avec/de son bras, doigt, index; montrer qqc. avec/de sa main, sa tête. Le suisse les conduisit jusqu'à l'entrée (...), leur montrant avec sa canne un grand cercle de pavés noirs (Flaub.,MmeBovary,t.2, 1857, p.86).Arrachant ses mains aux caresses de Gérard, elle lui montra son père avec un rapide signe des yeux (Theuriet,Mariage Gérard,1875, p.218): 3. − Vous pouvez me dire, dit Marie-Ange. On peut tout me dire. Ça entre par ici − elle désignait ses oreilles − et ça sort par là − elle montrait sa bouche.
Beauvoir,Mandarins,1954, p.184. ♦ Montrer un siège à qqn. Inviter quelqu'un à s'asseoir. Elle s'assit et me montra un fauteuil. Je vis l'effort qu'elle faisait pour parler (Musset,Confess. enf. s.,1836, p.235).Il se gardait bien de montrer un siège, sachant par expérience que, debout devant lui, les bras ballants, la gaucherie du pauvre prêtre doublait sa timidité naturelle (Bernanos,Soleil Satan,1926, p.215). ♦ Montrer la porte à qqn. Lui ordonner, lui enjoindre de sortir. Leur montrant la porte avec une autorité, une dignité, une majesté irrésistibles, elle prononça: «C'est à vous de sortir, maintenant» (Maupass.,Contes et nouv.,t.2, Marquis de F., 1886, p.72).Et maintenant sortez! Filez! Elle montrait la porte (Cocteau,Enfants,1929, p.31). ♦ Montrer qqn du/au (vx ou région.) doigt. Désigner (quelqu'un) à la réprobation, à la moquerie. La coupable Marguerite devient grosse, sa honte est publique, tout le quartier qu'elle habite la montre au doigt (Staël,Allemagne,t.3, 1810, p.106).On chuchotait sur son passage, on le montrait du doigt (Lacretelle,Silbermann,1922, p.122): 4. ... il faillit faire un crochet, ainsi qu'autrefois, pour prendre la ruelle derrière les maisons, comme s'il redoutait encore d'être montré au doigt par les gamins.
Martin du G.,Thib.,Mort père, 1929, p.1365. ♦ Montrer la voie à qqn. Être le premier, l'initiateur (de quelque chose). Je cesse avec celui-ci mes exemples, certain d'avoir montré la voie aux chercheurs d'équations poétiques nouvelles (Aragon,Crève-coeur,1941, p.79). b) [Le suj. désigne une chose] Indiquer, signaler. Flèche, pancarte, panneau qui montre le chemin. Mais le vaisseau a son âme, sa boussole, qui le conseille et lui montre toujours le nord (Hugo,Misér.,t.1, 1862, p.446). 3. Laisser voir, laisser paraître. Synon. découvrir, dégager, dénuder, dévoiler; anton. couvrir, camoufler (fam.). a) [Le suj. désigne une pers.] Montrer ses chevilles, ses jambes. Ses deux yeux retournés ne montrent que le blanc (Barbier,Ïambes,1840, p.197).Les plus grands saluent en se penchant en avant, (...) montrant toutes leurs dents dans un large sourire (Gide,Voy. Congo,1927, p.732). ♦ Montrer (le bout de) son nez. Apparaître, sortir. Un curé qui leur arrive passé minuit (...) et qui disparaît sans avoir seulement montré le bout de son nez (Bernanos,Crime,1935, p.816).J'aimais, au Paraguay, cette herbe ironique qui montre le nez entre les pavés de la capitale (Saint-Exup.,Terre hommes,1939, p.181). ♦ Montrer le bout de l'oreille. Se démasquer, dévoiler ses véritables intentions. Synon. laisser passer le bout* de l'oreille.Ici encore l'homme de parti montre le bout de l'oreille (Bremond,Hist. sent. relig.,t.4, 1920, p.477).Cela se passait sur la frontière italienne, où l'on ne faisait rien d'autre que de belles descentes. Pourtant, de temps en temps la guerre montrait le bout de l'oreille (Triolet,Prem. accroc,1945, p.30). b) [Le suj. désigne une chose] Robe qui montre les chevilles, les jambes, les épaules; paillasse qui montre son crin, sa paille; fourrure qui montre son cuir; tapis qui montre sa corde. Elle entra doucement dans l'eau son bras nu (...) dont la peau de soie montrait le bleuissement tendre des veines (Zola,Ventre Paris,1873, p.718).Le lit ouvert montrait des draps fins et brodés (Vercel,Cap. Conan,1934, p.71): 5. ... la plage entière est bordée de carcasses de vaisseaux naufragés (...); quelques-uns montrent encore leur haute proue fracassée...
Lamart.,Voy. Orient,t.2, 1835, p.57. ♦ Montrer que.Laisser voir (que), révéler. Ses yeux fatigués montraient qu'elle avait pleuré (Musset,Confess. enf. s.,1836, p.297).Un réseau très fin de petites rides (...) montrait qu'elle avait commencé de vieillir (Mille,Barnavaux,1908, p.238). 4. Faire voir, donner à lire (un texte, un document). Synon. communiquer, soumettre.Montrer des papiers, une lettre à qqn. Elles me montraient un jour (décembre 1820) leurs devoirs, avant l'arrivée de leur maître (Delécluze,Journal,1827, p.379).Il me montre un passage de la missive maternelle: «Quand tu recevras ma lettre, épèle-t-il...» (Barbusse,Feu,1916, p.94). B. − Au fig. Faire connaître. 1. Faire imaginer, représenter à l'esprit. a) [Le suj. désigne une pers., gén. un créateur, un artiste] Synon. décrire, évoquer, exposer, peindre, rapporter.Un auteur, un historien, un poète qui montre son époque dans son oeuvre. En vous développant le caractère de Valérie, en vous la montrant faisant mon bonheur (...), pourquoi suis-je ramené à ces terribles circonstances (...)! (Krüdener,Valérie,1803, p.231).Il montrait les mineurs exploités, supportant à eux seuls les désastres des crises (Zola,Germinal,1885, p.1378): 6. Mais avant même de revendiquer les droits de la vie, dans notre examen de l'oeuvre de l'artiste (...) il nous faut montrer l'erreur d'une vue superficielle qui attribue aux formes d'art une existence détachée de l'évolution générale de l'esprit humain, produit et facteur de la société.
Rolland,Beethoven,t.1, 1937, p.16. b) [Le suj. désigne une chose, gén. une création artistique] Synon. décrire, dépeindre, relater.Un livre dont le but est de montrer l'état d'un pays, de ses coutumes. Ce volume devait répandre la lumière, montrer l'évidence, amener la perfection, le bonheur (Volney,Ruines,1791, p.146).Léonard de Vinci s'extasie toujours sur ce pouvoir qu'a la peinture «de montrer un corps en relief et se détachant sur une surface plane» (Huyghe,Dialog. avec visible,1955, p.130). − En partic. Faire connaître ce qui était caché. Synon. révéler; anton. masquer.Parfois, ces effets dépendent d'une sorte de perspective et de groupements inconstants (...). Le temps même les montre ou les voile (Valéry,Variété[I], 1924, p.245). 2. Mettre en évidence, souligner. a) [Le suj. désigne une pers.] Synon. démontrer, établir, signaler.Montrer à qqn ses erreurs, ses torts. Il sera si facile de lui montrer sa propre ébriété idiote! (Valéry,Corresp.[avec Gide], 1894, p.206): 7. Je montrerai les inconvéniens du hachish (...) dont le moindre défaut, dis-je, est d'être antisocial, tandis que le vin est profondément humain, et j'oserais presque dire homme d'action.
Baudel.,Paradis artif.,1860, p.333. b) [Le suj. désigne une chose] Synon. attester, témoigner (de).L'expérience, l'histoire, l'observation, les statistiques montre(nt) la réalité de tout cela. Aurez-vous assez d'esprit pour bien exécuter toutes les choses que cet homme vif vous indiquera à demi-mot? C'est ce que montrera l'avenir (Stendhal,Rouge et Noir,1830, p.240).Un autre fait montre la nécessité d'un modus vivendi entre les États-Unis et nous (De Gaulle,Mém. guerre,1954, p.526). ♦ Montrer que.Démontrer, exposer que. Synon. établir.J'ai déjà montré plus haut que les nouvelles théories faisaient bon marché de ce principe (H. Poincaré, Valeur sc.,1905, p.190).L'histoire montre qu'il n'y a guère d'opposition économique plus clairement sentie que celle-ci (Sorel,Réflex. violence,1908, p.190). ♦ Montrer (combien/comment).Démontrer, exposer (combien/comment). Synon. faire sentir*.Elles nous serviront à montrer comment les heureuses combinaisons du hasard concourent (...) à une grande découverte (Condorcet,Esq. tabl. hist.,1794, p.176).Je n'ai donné les exemples précédents que pour montrer combien ces causes d'erreur peuvent être souvent imprévues et même invraisemblables (Cl. Bernard, Princ. méd. exp.,1878, p.237). 3. Faire preuve de. Synon. faire montre de (v. montre1A), manifester, révéler.Encouragé par cet accueil, je me mis donc de bon coeur à montrer mon savoir-faire aux maîtres ouvriers (Nodier,Fée Miettes,1831, p.108).Pluche montrait de la hardiesse dans le choix des consommations (Dabit,Hôtel,1929, p.40): 8. C'était l'aide de cantine, Joussiaume, qui, par excès de discrétion et pour montrer ses belles manières, se coulait comme une anguille par l'entrebâillement de la porte.
Courteline,Train 8 h 47,1888, 3epart., I, p.221. SYNT. Montrer du/son courage, du/son dévouement, du/son zèle; montrer ses connaissances; montrer de l'/son audace, de la/sa bienveillance, de la/sa bonté, de l'/son estime, de la/sa gaieté, de l'/son insolence, de l'indulgence, de l'initiative, de la justice, de l'obéissance, de la rage. ♦ Montrer (à qqn) que.Faire la preuve que. Mon dessein était de montrer que les intrigues politiques font quelquefois descendre les plus hauts personnages aux dernières bassesses (Lemercier,Pinto,1800, p.4).Non, murmura sa fierté révoltée, je leur montrerai que, malgré mes étourderies, je vaux mieux qu'eux tous! (Theuriet,Mariage Gérard,1875, p.155). 4. Laisser voir, laisser percer, parfois involontairement un état, un sentiment, une attitude psychologique ou mentale. Synon. manifester, marquer.Parfois il riait de bon coeur; jamais il ne montra le moindre signe d'humeur (Las Cases,Mémor. Ste-Hélène,t.1, 1823, p.306).Gravida montrait parfois un œil sombre étincelant (Jouve,Scène capit.,1935, p.114): 9. Tout à coup, leur visage brûlant, décomposé, montrant les plus terribles passions, grimacera de telle manière que les loups auront peur.
Lautréam.,Chants Maldoror,1869, p.144. SYNT. Montrer de l'embarras, de la gêne; montrer de la faiblesse, de la vanité; montrer de la douleur; montrer de la préférence; montrer son ignorance, sa nullité. ♦ Montrer + inf.Il colorie minutieusement et suavement chaque espace et heureusement n'a pas cru trop païenne la joie qu'il montre avoir prise au naïf agencement des couleurs (Gide,Feuilles de route,1896, p.60). 5. Enseigner quelque chose à quelqu'un par l'exemple ou par la pratique. a) Montrer qqc. (à qqn).Montrer les lettres de l'alphabet à un enfant. J'en ai cité qui montraient le français, la géographie (Sénac de Meilhan,Émigré,1797, p.1652).Mais Süzel, qui donc t'a montré la danse? (Erckm.-Chatr.,Ami Fritz,1864, p.196).Elle sourit au plus jeune, celui qui venait de lui montrer le maniement de la mitraillette (Vailland,Drôle de jeu,1945, p.27). b) Montrer à + inf. à qqn.Cette idée avait tourné à montrer à lire à un enfant (Hugo,Misér.,t.1, 1862, p.527).On lui montre à faire la révérence lorsqu'elle rencontre par hasard madame sa mère ou sa marraine (Boylesve,Leçon d'amour,1902, p.42).Un monsieur très bien nous montra à danser la chaîne anglaise et la leçon n'en finissait pas (Jacob,Cornet dés,1923, p.32). II. − Emploi pronom. A. − réciproque. La joie que témoignaient les deux enfants, enchantés de se montrer l'un à l'autre leurs cadeaux, parut importuner le comte (Balzac,Lys,1836, p.190).Elles se poussent du coude (...) pour se montrer mon luxe et mon chic (Mirbeau,Journal femme ch.,1900, p.58). B. − réfléchi 1. a) [Le suj. désigne une pers. ou p. ext. un animal] Se faire voir, se présenter aux regards. Synon. apparaître; anton. se cacher.Qui donc l'empêchait de se montrer à son bras, devant tout le monde (Flaub.,Éduc. sent.,t.2, 1869, p.94).Je le vis distinctement sur le faîte du toit, le papegai de la comtesse Michaud (...). Mais à peine s'était-il montré qu'il disparut (A. France,Pt Pierre,1918, p.164). b) [Le suj. désigne une chose] (Ap)paraître. Synon. poindre, surgir.La lune, le soleil se montre à travers les nuages. Le printemps se montre enfin, et les feuilles commencent à pousser (Napoléon ier, Lettres Joséph.,1807, p.145). 2. Se faire connaître (sous un certain côté de sa personnalité). Synon. se dévoiler.Je lui donnais occasion de se montrer dans un jour favorable (Musset,Confess. enf. s.,1836, p.307).C'est pourquoi je t'avertis de te montrer toujours tel que tu puisses plaire à Dieu (Billy,Introïbo,1939, p.136). 3. Se montrer + attribut.[Le subst. ou l'adj. attribut marque la catégorie du comportement] Apparaître comme tel aux yeux d'un observateur. Synon. s'avérer, se révéler. a) [Le suj. désigne une pers.]
α) Se montrer + adj.Le mercredi matin, Sara se montra plus chagrine que jamais: son âme était navrée de douleur (Restif de La Bret.,M. Nicolas,1796, p.164).Ils se fussent peut-être (...) ces grands larrons, montrés jaloux des états de service de leur trop digne petit-neveu (Cladel,Ompdrailles,1879, p.259): 10. ... on paraît ingrat et on se montre mufle parce qu'ayant oublié pendant des mois d'écrire à un bienfaiteur qui vient de perdre sa femme...
Proust,Guermantes 2,1921, p.403. SYNT. Se montrer affligé, à l'aise, désappointé, enthousiasmé; se montrer acharné, fort; se montrer prévenant.
β) Se montrer (un/le) + subst. (désignant une pers.).Se montrer un homme, un insensé. La demoiselle mannequin (...) qui (...) apparaît un instant comme une femme du monde, puis déshabillée, se montre la vraie femme qu'elle est (Goncourt,Journal,1888, p.847).L'homme des routes se montrait un bon travaillant capable de chaude amitié pour la terre (Guèvremont,Survenant,1945, p.62).
γ) Se montrer d'un(e) + subst. (désignant une qualité d'une pers.).Là-dessus, elle se montrait d'une énergie intraitable (Zola,Germinal,1885, p.1330). b) [Le suj. désigne une chose] La morale actuelle se montre, pour elles, indulgente, et ne renonce pas à les moraliser (Gobineau,Corresp.[avec Tocqueville], 1843, p.54).Sur la route de Droh, nous avons trouvé des pierres qui, brisées, se montraient à l'intérieur transparentes comme du verre (Gide,Feuilles de route,1896, p.82). Prononc. et Orth.: [mɔ
̃tʀe], (il) montre [mɔ
̃:tʀ]. Ac. 1694, 1718: monstrer; dep. 1740: montrer. Étymol. et Hist. A. «Mettre devant les yeux; exposer aux regards» 1. 1remoitié xes. part. passé (Jonas, éd. G. de Poerck, 215: poscite li qe cest fructum qe mostret nos habet qel nos conservet); ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 3314: Les escheles Charlun li ad mustrees); 1130-40 pronom. (Wace, Conception N.-D., 99 ds T.-L.: A cels de la nef se mostra [l'ange], E l'abé par nom apela); ca 1170 id. (Marie de France, Lais, Prol., éd. J. Rychner, 4: Qui Deus a duné escïence E de parler bone eloquence Ne s'en deit taisir ne celer, Ainz se deit voluntiers mustrer); xives. [ms.] id. le suj. désigne une chose (Chrétien de Troyes, Perceval, éd. A. Hilka, 7827, var. S: Et les enchantemenz ne coevrent, Ainz se moustrent lors et aperent); 2. «faire paraître de manière que l'on puisse voir» a) ca 1135 (Couronnement de Louis, éd. Y. G. Lepage, réd. AB, 345: Li quens se drece, monstre li le visage); ca 1210 (Robert de Clary, Constantinople, LXXI, éd. Ph. Lauer, p.71: avaloient leurs braies et moustroient leur leurs cus); b) ca 1180 mostrer bel semblant (Thomas, Tristan, éd. B. H. Wind, fragment de Turin, 53, p.71); 3. «désigner, indiquer de manière à attirer le regard» a) ca 1160 mostrer la veie [en parlant d'une étoile] (Eneas, 80, ds T.-L.); b) id. mostrer al dei (ibid., 917, ibid.); ca 1210 mostrer au doi fig. pour désigner comme objet de mépris (Herbert de Dammartin, Fouque de Candie, 5743, ibid.); 4. ca 1170 «faire visiter un lieu» (Marie de France, op. cit., Yonec, 493). B. «Exposer à l'esprit, à l'imagination» 1. fin xes. parfait 3 sing. «manifester, donner des marques de» (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 73: Los sos talant ta fort monstred [Jesus] Que grant pavors pres als Judeus); ca 1165 (Benoît de Ste-Maure, Troie, 27146 ds T.-L.: Moustré li a que mout l'amot); ca 1330 pronom. «se révéler sous un certain jour, pourvu de telle qualité» (Guillaume de Digulleville, Vie humaine, 144 ds T.-L.: bien se moustroit estre ami); fin xves. (Commynes, Mém., éd. J. Calmette, IV, X, t.2, p.66, 4: ... qui se monstroit avoir auctorité en ceste compaignie); 2. a) ca 1050 «exposer, expliquer» prés. 3 sing., part. passé fém. sing. (St Alexis, éd. Chr. Storey, 64: La mortel vithe li prist mult a blasmer, De la celeste li mostret veritét; 71: Quant sa raisun li ad tute mustrethe); ca 1150 (Wace, St Nicolas, 3 ds T.-L.: A ces qui n'unt lectres aprises... Deivent li clerc mustrer la lei); b) ca 1165 «démontrer, prouver» (Benoît de Ste-Maure, op. cit., 608 ds T.-L.); c) 1376 «enseigner» (Modus et Ratio, 150, 8, ibid.: vous m'aviés commandé et ordené de leur moustrer maniere de vivre, maniere de parler); 3. a) début xiies. «faire connaître, révéler» (Benedeit, St Brendan, 505, ibid.); 1130-40 (Wace, Conception N.-D., 268, ibid.); b) 1121-34 le suj. désigne une chose «signifier, exprimer» (Philippe de Thaon, Bestiaire, 168, ibid.: La trace del lëun Mustre incarnatïun Que Deus volt prendre en tere...); c) fin xves. id. pronom. «se révéler, se confirmer» (Commynes, op. cit., I, I, t.I, p.7, 10). L'a. fr. mostrer est issu du lat. mo(n)strare (de monstrum, montre*) «montrer à quelqu'un [un objet, son chemin], indiquer; faire voir, faire connaître; montrer [à faire quelque chose]; désigner, dénoncer; avertir, conseiller [quelqu'un, quelque chose; de]». La forme monstrer, d'apr. le lat. monstrare. Fréq. abs. littér.: 28076. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 38266, b) 42326; xxes.: a) 42534, b)38487. DÉR. Montrable, adj.Qui peut être montré(e). Si ton frère consent à se déranger pour cela, et qu'il pense qu'une lettre de moi à lui, une lettre montrable, soit utile, je la lui enverrai (Flaub.,Corresp.,1868, p.72).Évidemment, Augustin n'était pas remplacé, mais deux ou trois élèves, sa monnaie, faisaient encore figure de choses montrables (Malègue,Augustin,t.1, 1933, p.257).T'en souviens-tu les autres demeuraient entre eux ça te faisait tout misérable et tu comprenais bien que pour eux tu n'étais guère montrable même aujourd'hui d'y penser ça me tue (Aragon,Rom. inach.,1956, p.94).Emploi subst. Ce, celui, celle qui peut être montré(e). Ceux qu'étaient pas rafistolables, les invendables, les pas montrables, les pires horreurs (Céline,Mort à crédit,1936, p.61).− [mɔ
̃tʀabl̥]. Att. ds Ac. dep. 1878. − 1resattest. a) fin xiies. «que l'on peut montrer, désigner du doigt» (Clemence Barking, Ste Catherine d'Alexandrie, 833 ds T.-L.), b) 1508-17 «que l'on peut montrer produire» (Fossetier, Cron. Marg., ms. Brux. 10512, IX, III, 17 ds Gdf.); de montrer, suff. -able*. − Fréq. abs. littér.: 13. BBG. − Maunoury (G.). Analyse lexico-sém. d'un verbe. L'homon. de montrer. Cah. Lexicol. 1974, no25, pp.71-95. _ Verreault (Cl.). Les Adj. en -able en franco-québecois. Trav. de ling. québécoise: 3. Québec, 1979, p.214 (s.v. montrable). |