| MONARQUE, subst. masc. A. − Personne qui est à la tête de l'État dans une monarchie; en partic. roi, reine héréditaire. Monarque absolu; grand monarque. Le supplice qu'Élizabeth [1red'Angleterre] ordonne comme monarque (Staël, Allemagne, t.2, 1810, p.328).Pendant plusieurs semaines, Amaury fut l'hôte du monarque byzantin (Grousset, Croisades, 1939, p.205): 1. ... j'ai toujours eu une sympathie profonde pour ce grave et magnifique prince [Louis XIV] si bien né, si bien venu, si bien entouré, roi dès le berceau et roi dans la tombe; vrai monarque dans la plus haute acception du mot...
Hugo, Rhin, 1842, p.100. SYNT. Monarque constitutionnel, légitime, universel; infortuné, puissant monarque; jeune, nouveau, vieux monarque; monarque oriental; gloire, pouvoir du monarque; auprès du monarque; les monarques de l'Europe. B. − P. anal. (de position sociale, d'autorité). Vous qui représentez (...) un des monarques de la pensée et de l'amour humains (Mallarmé, Corresp., 1876, p.136).Qu'allez-vous faire du «Figaro»? C'est la question que tout le monde y compris M.Pompidou, pose au monarque de la presse, M. Jean Prouvost, 80 ans (L'Express,11 janv. 1965).V. aile ex. 5. − Littér. et poét., dans le domaine myth., relig.Nous citerons le Satan de Milton. Avant le poëte anglois, le Dante et le Tasse avoient peint le monarque de l'enfer (Chateaubr., Génie, t.1, 1803, p.498): 2. Vous tous, du divin Zeus, salut, enfants sans nombre,
De l'Olympe éthéré jusqu'à l'Érèbe sombre
Fruits de ses mille hymens, monarques étoilés
Qui régnez à ses pieds et brillez à son ombre,
(...). Salut, déesses, dieux! soyez-nous favorables...
Leconte de Lisle, Poèmes ant., 1852, p.185. ♦ Le monarque des dieux. Jupiter: 3. Levant le front, il [l'Amour] crie au monarque des Dieux:
«Toi, mûris mes moissons, de peur que loin des cieux
Au joug d'Europe encor ma vengeance puissante
Ne te fasse plier ta tête mugissante.»
Chénier, Bucoliques, 1794, p.26. − En emploi adj., littér. Arnauld esprit raisonneur toutefois plus que souverain, et Bossuet esprit monarque encore plus que guerrier (Sainte-Beuve, Port-Royal, t.5, 1859, p.380).[Jésus] allait hériter des princes débonnaires Et des princes cruels et du peuple monarque (Péguy, Ève, 1913, p.853): 4. Il y a un monde entre le Dieu monarque et solitaire de Job, d'Abraham, des Arabes, et ces grands poèmes panthéistes que nous révèlent les monuments de l'Égypte et de l'Assyrie.
Renan, Avenir sc., 1890, p.515. C. − Argot 1. Lang. des joueurs. Roi d'un jeu de cartes; en partic., celui dont la couleur retourne. [Partie d'écarté] Saint-Hippolyte: Je joue (...). Atout du monarque; je le marque (Villars, Précieuses du jour, 1866, p.44). 2. Pièce de cinq francs: 5. Jondrette fouilla dans son pantalon, et lui remit cinq francs.
− Qu'est-ce que c'est que ça? s'écria-t-elle. Jondrette répondit avec dignité:
− C'est le monarque que le voisin a donné ce matin.
Hugo, Misér., t.1, 1862, p.928. Prononc. et Orth.: [mɔnaʀk]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1370-72 monarch (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, livre III, chap.14, note1: ... les roys qui sont monarchs en leurs royaumes); 1372-74 adj. monarche (Id., Politiques, éd. A. D. Menut, p.315, fo273 vo); ca 1480 subst. (Myst. du V. Testament, éd. J. de Rothschild, 11509); 1548 subst. monarque (Th. Sebillet, Art poétique françoys, éd. F. Gaiffe, p.162). Empr. au gr.
μ
ο
́
ν
α
ρ
χ
ο
ς «souverain» adj. et subst., formé de μ
ο
ν(o)-, de μ
ο
́
ν
ο
ς «seul, unique» et de -α
ρ
χ
ο
ς, de α
̓
ρ
χ
ο
́
ς «celui qui conduit», d'où «guide» et «chef», de α
̓
ρ
χ
ω «guider» d'où «commander»; cf. le lat. tardif monarchus «monarque, chef unique» (vies. ds Latham); on trouve aussi monarche «monarchie» comme subst. fém. (fin xiiies., Jean de Meun, Testament, 919 ds Rose, éd. Méon, t.4, p.47). Fréq. abs. littér.: 937. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 3563, b) 508; xxes.: a) 551, b) 340. Bbg. Dub. Pol. 1962, p.346. |