| MILLE1, adj. inv. et subst. inv. I. − Emploi adj. inv. A. − Adj. numéral cardinal. Dix fois cent. Période de mille ans; billet de mille francs; somme de mille écus, de mille francs; avoir mille livres de rentes; à mille mètres d'altitude. Cassell avait reçu mille chèvres, il en avait expédié quatre cents, il devait lui en rester six cents (Maurois,Silences Bramble,1918, p.228). Rem. V. cent1I A rem. − [Avec ell. du subst. déterminé] Billet de mille (francs). Avec ses mille [volontaires], au coeur de Palerme, sous le ciel de Sicile, Garibaldi (Cladel,Ompdrailles,1879, p.354). ♦ Expédition des Mille. Expédition de Garibaldi et de ses volontaires contre la Sicile en 1860. Giuseppe Garibaldi (...) débarque en Sicile le 11 mai [1860] avec l'expédition des Mille, occupe l'île et entend instaurer un régime démocratique (Encyclop. univ.t.91972, p.251).V. aussi supra ex. de Cladel. B. − P. ext. Un très grand nombre (v. cent1, trente-six). Il sentit (...) mille pointes aiguës lui déchirer les entrailles (Sue,Atar-Gull,1831, p.11).Un des mille et mille tours de mon imagination excessive, grossissante et romanesque (Mirbeau,Journal femme ch.,1900, p.35).L'analyse pure nous ouvre mille chemins différents où nous pouvons nous engager en toute confiance (H. Poincaré, Valeur sc.,1905, p.27): 1. Le digne homme est incessamment en partance, requis par mille soins, mille soucis, sermons, congrès, visites de pauvres et de malades.
Gide,Faux-monn.,1925, p.1123. SYNT. (Envoyer à qqn) mille amitiés, baisers, bénédictions, choses aimables, compliments, excuses, félicitations, grâces, mercis, pardons, remerciements, respects, tendresses; avoir mille choses à faire; rencontrer mille difficultés; faire mille folies; inspirer mille inquiétudes; endurer, souffrir mille maux, morts, supplices; être digne de mille morts; prendre mille précautions; dire mille sottises; de mille manières; mille fois plus; mille diables! mille dieux! mille sabords! mille tonnerres! ♦ (Être) à mille lieues* (de). ♦ Mille et un. Il éprouvait le besoin de toucher à tout et de commettre mille et une sottises plutôt que de rester tranquille (Boylesve,Leçon d'amour,1902, p.77).Cela nous valut mille et une aventures (Ponchon,Muse cabaret,1920, p.182). − [Avec ell. du subst. déterminé] En un mot comme en mille; un exemple entre mille. Ces malheureux républicains (...) ne sont qu'une poignée et font du bruit comme mille (Stendhal,L. Leuwen,t.3, 1835, p.69).Grand, châtain, souriant. Ces trois mots vagues font de lui un portrait si précis que vous le reconnaîtriez entre mille (Giraudoux,Siegfried,1928, ii, 2, p.86). ♦ Fam. Je vous le donne (à deviner*) en mille. V. donner ex. 44. C. − Adj. numéral ordinal. [Déterm. postposé d'un ensemble numéroté] Qui occupe le rang marqué par le nombre mille. Numéro, page mille; guerre de mil neuf cent quatorze. Les foules de l'an mil avaient cru à la fin du monde (J.-R. Bloch, Dest. du S.,1931, p.198).Un de nos ancêtres, expirant en l'an mille, a pu croire à la fin du monde (Bachelard,Poét. espace,1957, p.53). II. − Emploi subst. inv. A. − [Sans art.] Le nombre mille. Diviser, multiplier par mille. Je vais compter jusqu'à mille, cela fera bien un quart d'heure (Dorgelès,Croix de bois,1919, p.97). ♦ Pour mille. [Précédé d'un nombre cardinal, indique que le rapport entre deux grandeurs dénombrables est exprimé par une fraction ayant mille pour dénominateur] Pour mille unités (abrév.
‰
). Le taux de mortalité varie selon les populations et les époques de 5‰ à 30‰
(Encyclop. Sc. Techn.t.41970, p.267). B. − P. méton. Ensemble de mille unités, millier. Cet ouvrage a atteint le centième mille (Ac.1935).L'ouvrier compositeur reçoit tant par mille de lettres composées, le pressier tant par mille de feuilles imprimées (Proudhon,Propriété,1840, p.223).Des capsules de métal à quatre-vingt-dix francs le mille (Hamp,Champagne,1909, p.181).Supposons une infiltration d'étrangers par centaines de mille (Alain,Propos,1921, p.277): 2. Sur la grande table à rallonges s'empilaient les derniers mille de faire-part, d'enveloppes, que l'on venait de livrer.
Martin du G.,Thib.,Mort père, 1929, p.1325. − En partic. ♦ ARITHM. Unité du quatrième ordre dans la numération décimale. V. dizaine ex. 1. ♦ JEUX. Centre d'une cible, case valant mille points. Pomadour, achevant de lancer son dernier palet: C'est incroyable (...) je ne peux pas mettre dans le mille (...) toujours dans le dix (Labiche,29oà l'ombre,1873, 1, p.175).Le mille de la cible (...) est un point déterminé au centre d'une circonférence (Jankél.,Je-ne-sais-quoi,1957, p.116).Au fig., fam. Mettre, taper dans le mille. Atteindre son but, tomber juste. Ah! c'est un fait; pour un novice, je n'avais pas raté le coche; j'avais mis dans le mille tout de suite (Courteline,Ah! Jeun.,1894, p.17): 3. Or, cet enchantement [du théâtre], personne au monde n'en exploite mieux les ressources que Christian Bérard, lorsqu'il oppose au réalisme et aux stylisations, ce sens de la vérité en soi, d'une vérité qui dédaigne la réalité, méthode inimitable n'ayant d'autre objectif que de mettre dans le mille à chaque coup.
Cocteau,Machine infern.,1934, p.7. ♦ Fam. Beaucoup, une grande somme. Sans gagner des mille et des mille, sa position n'était pas mauvaise (A. France,Crainquebille,A. Buquet, 1904, p.192).Des mille et des cents*. Prononc. et Orth.: [mil]. Homon. mil. Att. ds Ac. dep. 1694. Inv. cinq mille francs, des mille et des cents; inv. quand mille désigne un ensemble de mille objets de même nature: deux mille de blé (= deux mille bottes de blé, comparer avec deux cents de blé). Selon Lar. Lang. fr.: ,,on trouve parfois l'accord au pluriel``. Dans les dates de l'ère chrétienne, on écrit mil devant un autre nombre, mille en finale, selon une règle fixée par Oudin et qui s'impose au xviiies.: ,,L'an mil sept cent`` (Ac.), ,,L'an deux mille`` (Rob.). Mais cette règle n'est pas respectée par les aut. qui emploient indifféremment les 2 formes en finale (supra J.-R. Bloch et Bachelard). Dans les dates étrangères à l'ère chrétienne on écrit toujours mille: ,,L'an mille cinq cent avant J.-C.`` (Grev. 1964, §704). Les mots constr. avec mille ont tendance à se souder. Ac. 1935, Rob.: mille-pertuis, millepertuis; Lar. Lang. fr.: millepertuis; Rob. : mille-raies; Lar. Lang. fr.: milleraies, etc. Étymol. et Hist. 1. Ca 1050 adj. numéral cardinal signifiant «dix fois cent», ici dans la composition d'un multiple cent mil signifiant «un très grand nombre, beaucoup de», plur. mil (Alexis, éd. Chr. Storey, 595); ca 1100 plur. milie (Roland, éd. J. Bédier, 548); début xiies. mil e mil (St Brendan, 7 ds T.-L.); ca 1145 plur. mile (Wace, Conception ND, éd. W. R. Ashford, 1620); 1208 plur. mille (Villehardouin, Conquête Constantinople, éd. E. Faral, 21); 1360-70 sing. mille (Baudouin de Sebourc, IX, 400 ds T.-L.); 2. a) ca 1100 le nombre mille, p. ell. du subst., ici, sing. mil (Roland, éd. J.Bédier, 177); b) 1611 précédé de l'art. pour reduire le mille en un «pour résumer» (Larivey, La Constance, III, 6 ds Hug.); c) 1636 «quantité de mille objets, millier» (Monet); d) 1690 «chiffre (représentant le nombre mille)» (Fur.); e) 1866 mettre dans le mille «réussir» (Delvau, p.251), cf. aussi Littré Suppl. 1877: Populairement, mettre dans le mille, réussir en plein; locution tirée du jeu de tonneau, où le palet qui tombe dans la gueule de la grenouille figurée sur la table du jeu, amène le mille, qui est le plus fort numéro. Du lat. mille, dont le plur. milia est à l'orig. de mille, forme plur. qui l'a gén. emporté dans l'usage tout en prenant la prononc. du sing. mil. COMP. Mille-fleurs, subst. fém. a) ,,Composition de plusieurs fleurs distillées`` (Ac. 1935). Rossolis de mille-fleurs (Ac. 1835, 1878). b) ,,Eau de mille-fleurs. Urine de vache reçue dans un vase pour être prise en remède. Eau de mille-fleurs, huile de mille-fleurs. Eau, huile extraite de la bouse de vache, par distillation`` (ibid.). − [milfloe:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1718. Pt Rob.: millefleurs. Plur. inv. − 1resattest. 1663 eau de mille-fleurs (La Rochefoucauld, Lettres ds
Œuvres, éd. D.L.Gilbert et J. Gourdault, t.3, p.159); 1718 Rossoli de mille fleurs (Ac.); comp. de mille1et de fleur* (pour eau de mille fleurs parce qu'on pensait que le liquide ainsi obtenu avait les propriétés des fleurs consommées par les vaches).BBG. − Quem. DDL t.11, 15, 16, 17, 19. _ Soltész (J. A.). Nombre gramm. et syst. du nombre en fr. Cah. Ling. Montréal. 1978, no7, pp.117-118. |