| MIDI, subst. masc. I.− [Désigne une notion de temps] A.− [Avec l'idée d'une certaine durée] Milieu du jour, moment intermédiaire entre le matin et l'après-midi, période où le soleil est le plus haut et le plus chaud. En plein midi, le moment de midi; matin, midi et soir; chaleur, soleil de midi; la pause de midi. Les quotidiens parisiens de midi et du soir, les journaux régionaux et étrangers sont distribués, dans diverses tournées, au cours de la journée (Civilis. écr.,1939, p. 42-2): 1. Soudain il s'arrêta sur le seuil, stupéfié par la lumière immense des midis de la terre africaine. La rue devait être blanche et les maisons blanches aussi, mais la flamme du soleil perpendiculaire lavait les surfaces éclatantes...
Louÿs, Aphrodite,1896, p. 227. − Proverbe. Midi ciel vilain, minuit ciel serein (Chass. 1970). − [En parlant de l'heure du déjeuner] Repas de midi ou, p. ell., midi. Je sais (...) que vous êtes arrivé par le train de dix heures, que vous avez pris votre repas de midi à l'hôtel de l'Univers (Bernanos, Crime,1935, 1repart., 3, p. 765).Je ne les ai guère que pour le dîner. Au midi, j'ai seulement M. Daniel et MmeJenny, avec le petiot (Martin du G., Thib.,Épil., 1940, p. 823). − [Dans des tournures fam.] Ce midi, ça a semblé fait exprès (Giono, Colline,1929, p. 126). ♦ Chercheurs de midi (vx, fam.). Voleurs qui s'introduisaient dans les habitations au moment où le couvert était mis pour le repas de midi, afin de dérober l'argenterie (d'apr. France 1907). 1. Par personnification. Midi, roi des étés, épandu sur la plaine Tombe en nappes d'argent des hauteurs du ciel bleu (Leconte de Lisle, Poèmes ant.,1852, p. 224). 2. P. métaph. Il faut plus de soleil, il faut un grand midi d'amour pour faire de la petite racine amère de notre pitié une chose illuminée de fleurs (Milosz, Amour. initiation,1910, p. 218): 2. Que m'importent à moi ces grâces fugitives de la vie que l'âge décolore et détruit, et qui effeuillent leurs roses passagères au courant de toutes les brises, et au midi de tous les soleils?...
Nodier, Fée Miettes,1831, p. 119. 3. P. anal. C'est le midi de l'année, la saison haute et immobile! Bonheur, bonheur! voici l'été (Camus, État de siège,1948, 1repart., p. 205). 4. Expr. parfois fig. a) En plein midi ♦ Faire qqc. en plein midi. Faire quelque chose ouvertement, publiquement. Synon. au grand jour*.Les habitants de Pistoie (...) ont trouvé dans cette affaire une petite occasion d'égorger tous leurs chanceliers en plein midi, au milieu des rues (Musset, Lorenzaccio,1834, v, 2, p. 257).Je ne m'aventurais pas sur le versant du Lycabète sans penser à cette pauvre MmeDaraud qui y fut dévalisée en plein midi (About, Roi mont.,1857, p. 21). ♦ Faire voir, montrer des étoiles*, la lune* en plein midi. ♦ Ne pas voir clair en plein midi; nier le jour, la lumière en plein midi. Contester un fait évident. (Dict. xixeet xxes.). b) Le midi (de la vie). Le milieu de la vie, l'époque correspondant à la maturité de l'existence humaine, au plein épanouissement des possibilités physiques, intellectuelles. Gandrax était alors absorbé par une de ces passions furieuses qu'il n'est pas rare de voir éclater au midi de la vie de l'homme, surtout dans un cœur et dans un sang vierges (Feuillet, Sibylle,1863, p. 292): 3. ... je ne veux parler (...) que de l'Homère de la jeunesse et celui du déclin, de l'Homère à son matin et en plein midi dans l'Iliade, et de celui que Longin a comparé, pour les tons plus doux de l'Odyssée, à un soleil couchant.
Sainte-Beuve, Virgile,1857, p. 323. ♦ Le démon de midi. V. démon B 3. B.− [Avec l'idée d'un moment précis dans le temps] Douzième heure du jour, à partir de minuit. (Il est) midi juste, passé, midi et quart, et demi(e); midi sonne; l'heure de midi, les douze coups de midi, sur les coups de midi. Le moment où cette ombre [projetée sur le sable par la baguette] atteindrait son minimum de longueur serait le midi précis (Verne, Île myst.,1874, p. 132).Il m'est arrivé, m'étant décidé à six heures du matin, de me trouver à midi et demi, au bar de chez Prunier, devant des huîtres (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 258): 4. Je suis à côté de Féval. C'est un paysan breton, qui parle du nez, un paysan bourgeoisifié, logeant rue Saint-Maur-Popincourt, ayant enfants, de vie réglée; écrivant tous les jours, de huit heures à midi, faisant des feuilletons comme on vend du bois...
Goncourt, Journal,1865, p. 126. 1. ASTRON. Midi moyen*. Midi vrai*. 2. Proverbe. [P. réf. à la manière ancienne de diviser les heures] Chacun voit midi à sa porte. De génération en génération, le père apprenait à son fils à mesurer la marche du temps. De là l'antique proverbe gascon : « Chacun voit midi à sa porte ». Rien qu'en mettant le pied sur le seuil (Pesquidoux, Livre raison,1932, p. 9). − Au fig. ,,Chercher et voir son intérêt avant toute autre considération`` (M. Lis, M. Barbier, Le Dict. du gai parler, Paris, Mengès, 1980, p. 369). 3. Expr. parfois fig. ♦ Chercher midi à quatorze heures. Chercher des difficultés là où il n'y en a pas, compliquer les choses à plaisir. Tiens, Birotteau, sais-tu ce que je pense en t'écoutant? Eh! bien, tu me fais l'effet d'un homme qui cherche midi à quatorze heures (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 13).Elle (...) ne se souviendra que de ce qu'elle aura compris... Les enfants sains ne cherchent pas midi à quatorze heures... (Gyp, Souv. pte fille,1928, p. 73): 5. Il eût mieux aimé qu'Adélaïde fût avantagée de tous les côtés, mais puisqu'elle était sa femme il n'allait pas chercher midi à quatorze heures, il l'aimait comme ça.
Aymé, Jument,1933, p. 65. ♦ C'est midi (sonné)! (pop.). C'est impossible, il n'y a rien à faire. Tu comprends bien que pour pagnoter au quartier, là-bas au patelin, à Saint-Mihiel, c'est macache et midi sonné (Courteline, Train 8 h 47,1888, 1repart., 7, p. 77).Vous avez dit à plusieurs camarades : « Les gars du Palais de Glace, ils savent y faire et ce sera midi pour les paumer ». Vous les connaissez donc? (Vercel, Cap. Conan,1934, p. 107). ♦ Marquer midi (arg.). Éprouver une forte érection. Si mon sexe reverdi Se prend à marquer midi Au baiser d'une peau fraîche (Richepin, Bombarde,1899, p. 86). II.− [Désigne une notion d'espace] A.− Un des quatre points cardinaux. Synon. sud.Le vent du midi est chaud, parce qu'il vient de la zone torride; et le vent opposé du nord est froid, parcequ'il souffle du pôle (Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 375).Ce lac [le lac Majeur] parallèle au lac de Côme, et qui court aussi du nord au midi, est situé à une vingtaine de lieues plus au couchant (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 145): 6. ... les musulmans assemblés devant leurs mosquées, se lavaient les mains, les pieds, se taillaient les ongles, se peignaient la barbe; puis étendant par terre des tapis, et se tournant vers le midi, les bras tantôt ouverts et tantôt croisés, ils faisaient des génuflexions et des prostrations...
Volney, Ruines,1791, p. 81. − En partic. [À propos de l'exposition (d'un lieu, d'un édifice) en face de ce point] C'est un filon de la Champagne voisine qui, sur ce coteau exposé au midi, produit des vins rouges et blancs qui ont encore assez de feu (Nerval, Filles feu,Angélique, 1854, p. 585).Les plantes alpines sont toutes petites. Et il faut, pour que je choisisse les espèces, que vous me disiez si vous les exposerez au nord ou au midi (A. France, Pt bonh.,1898, 1). B.− [Avec ou sans majuscule] Partie d'un pays, d'un ensemble géographique qui est la plus proche du sud. Le midi de l'Europe. Dans le midi de la France, des provinces entières se réunirent pour adopter une doctrine plus simple, un christianisme plus épuré (Condorcet, Esq. tabl. hist.,1794, p. 104).Tout le Midi français s'épanouissait là [au café Malmus], dans ses nuances diverses : Midi gascon, Midi provençal, de Bordeaux, de Toulouse, de Marseille, Midi périgourdin, auvergnat, ariégeois, ardéchois, pyrénéen... (A. Daudet, N. Roumestan,1881, p. 20). − Emploi abs. [Avec une majuscule] Le Midi. Le sud de l'Europe. Climat, lumière du Midi; dialectes, peuples du Midi. En général, la langue allemande et ses dialectes sont beaucoup plus transpositifs que les langues du Midi (Bonald, Législ. primit.,t. 1, 1802, p. 345).Un beau garçon pâle, d'apparence flexible, à la peau de femme. De jolis cheveux ondulés naturellement, des narines frémissantes, il avait la beauté du Midi (Jouve, Scènes capit.,1935, p. 215): 7. Cette impossibilité de se tirer d'affaire dans toutes les circonstances habituelles de la vie commune que Goethe attribue au Tasse est un trait de la vie méditative et renfermée des écrivains du Nord. Les poètes du Midi n'ont pas d'ordinaire une telle incapacité; ils ont vécu plus souvent hors de la maison, sur les places publiques...
Staël, Allemagne,t. 3, 1810, p. 62. ♦ En partic. Le sud de la France. Accent, ville du Midi. Elle est perdue, dit Lia. Elle s'en va dans le Midi, aux îles d'Hyères (Goncourt, Journal,1861, p. 908).Il y a chez Jaurès un épais verbalisme du Midi, de la pensée et du travail fait à la grosse (Barrès, Cahiers,t. 5, 1907, p. 177): 8. Un cafard de Paris, comme il y en a tant parmi ces garçons qui, sous prétexte d'admiration et de l'intérêt qu'ils portent à votre œuvre et à votre travail, viennent vous rendre visite à la campagne et vous relancer jusque dans le Midi quand on n'habite plus la capitale...
Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 64. Prononc. et Orth. : [midi]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1100 « milieu du jour » (Roland, éd. J. Bédier, 1431; b) 1585 p. ext. « le milieu de (quelque chose) » (Noël du Fail, Contes d'Eutrapel ds
Œuvres, éd. J. Assézat, t. 2, p. 238 : puis que vos ans ont passé le midi de bien loin); c) 1585 cercher midy à unze heures (Cholières, 1ereMatinée, p. 18 ds Hug.); 1622 cercher midy à quatorze heures (Tabarin, Rec. des questions ds
Œuvres, éd. G. Aventin, t. 1, p. 160); d) 1585 démon du midi (par opposition au démon des ténèbres) « tentation du milieu du jour » traduisant le lat. daemonius meridianus (Noël du Fail, Contes d'Eutrapel ds
Œuvres, t. 2, p. 243); d'où par spécialisation 1863 « tentation de nature affective et sexuelle s'emparant des humains vers le milieu de la vie » (Feuillet, Sibylle, p. 345); 2. a) ca 1140 « un des points cardinaux, le Sud » (Geffrei Gaimar, Hist. des Anglais, éd. A. Bell, 1643); b) 1308 « exposition qui est en face du soleil à midi » (Texte cité ds Dehaisnes, Doc. hist. A. Flandre, t. 1, p. 184); c) 1687 « les pays méridionaux » (La Fontaine, Epître à Mgrl'Evêque de Soissons ds
Œuvres, éd. Régnier, t. 9, p. 204); d) 1793 « le sud de la France » (Staël, Lettr. L. de Narbonne, p. 179); 3. 1866 arg. Midi! « trop tard! » (Delvau, p. 253); 1867 il est midi « méfie-toi! » (ibid., p. 254). Comp. de l'a. fr. mi (du lat. medius) « qui se trouve au milieu » (ca 1100 Roland, éd. J. Bédier, 700), v. parmi1et mi-et de l'a. fr. di (du lat. dies) « jour » (842, Serments de Strasbourg ds Henry Chrestomathie, p. 1); au sens 1 d cf. a. fr. diable meridien (mil. xiies., Psautier Oxford, éd. Fr. Michel, 90, 6, v. T.-L.), v. aussi Rey-Chantr. Expr. Fréq. abs. littér. : 5 756. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 9 568, b) 9 716; xxes. : a) 7 244, b) 6 751. Bbg. Pauli 1921, p. 99. − Quem. DDL t. 10, 12, 19, 20. |