| MATRICE, subst. fém. I. − [La matrice est un moule naturel] A. − ANAT. Organe de l'appareil générateur de la femme et des mammifères femelles, situé dans la cavité pelvienne, destiné à contenir l'embryon et le foetus jusqu'à son complet développement. Synon. utérus.Col, ligaments, orifice de la matrice; chute, ulcère de la matrice. Dans les matrices à cornes les changemens de forme diffèrent suivant qu'il y a plusieurs petits dans chaque corne, ou qu'il n'y en a qu'un dans une corne, ou que l'unique foetus est contenu à la fois, comme dans la vache, dans une des cornes et dans le col (Cuvier, Anat. comp., t.5, 1805, p.151): 1. Si à la suite d'un accouchement laborieux les vidanges s'arrêtent par quelque imprudence, il survient une inflammation, et souvent à cette inflammation de matrice succèdent des obstructions de ce viscère.
Geoffroy, Méd. prat., 1800, p.302. ♦ P. plaisant. Au matin, à peine l'époux choisi comme un moindre mal avait-il pris son petit déjeuner, qu'Angélique retournait à la matrice [chez sa mère] jusqu'à l'heure du coucher (Morand,Homme pressé, 1941, p.81) B. − P. anal. − Milieu où quelque chose prend racine, se développe, se produit. La sphère est la matrice et le cercueil des formes. Tout en sort. Tout y revient (Faure, Hist. art, 1909, p.128): 2. ... la plupart du temps la nature est, à elle seule, incapable de procréer des espèces aussi malsaines et aussi perverses; elle fournit la matière première, le germe et le sol, la matrice nourricière et les éléments de la plante que l'homme élève, modèle, peint, sculpte ensuite à sa guise.
Huysmans, À rebours, 1884, p.125. − Matrice de l'ongle. ,,Partie du derme sous-unguéal qui répond à la lunule et à la racine de l'ongle`` (Lov.-Veill. 1954). L'ongle de son pouce se cassa contre ses dents. Tu n'as pas des ciseaux? Il s'était mal cassé, de travers, jusqu'à la matrice (Aragon, Beaux quart., 1936, p.136). − BOT. Matrice de girofle. ,,Fruit du giroflier parvenu à maturité`` (Bouillet 1859). − MINÉR. ,,Matériau fin, généralement sablo-argileux ou limoneux, emballant des éléments plus grossiers (galets ou blocs) dans une formation hétérométrique`` (George 1970). Les rochers du vallon n'avaient pas de formes humaines, comme parfois ça arrive. Ils étaient seulement des rochers, et tout à fait, avec des arêtes vives, comme fraîchement arrachés à la matrice, ou bien arrondis par le frottement des eaux (Giono, Eau vive, 1943, p.67). II. − [La matrice est un moule ou un cadre artificiel] A. − TECHNOLOGIE 1. Moule creux, en métal ou d'une autre matière, servant à donner une forme déterminée à un objet par compression, découpage, déformation ou emboutissage: 3. ... il retrouva les obus encore, un obus dont on avait coupé la chute de tête et la chute de fond, au sortir de la matrice, puis qu'on avait fixé à un tour, pour le calibrer extérieurement...
Zola, Travail, t.1, 1901, p.55. 2. MÉCAN. Outil de machine qui sert à imposer une forme à un matériau (d'apr. Rama 1973). 3. MÉTROL. ,,Nom donné aux étalons des poids et des mesures qui servent à étalonner les autres`` (Littré). 4. NUMISM. ,,Nom donné aux carrés originaux gravés avec le poinçon`` (Littré). Matrice d'effigie, de croix, d'écusson, de légende. La frappe des monnaies et des médailles ne présente que deux matrices nommées coins (Champly, Nouv. encyclop. prat., t.15, 1927, p.125). 5. TYPOGR. ,,Petit bloc de métal portant en creux l'empreinte d'un signe typographique et servant au moulage des caractères`` (Impr. 1977). Matrices de la linotype. La ligne de caractère est fondue d'un seul bloc à partir de matrices en creux. L'idée première en revient à Otto Mergenthaler (...). En juillet 1886, il faisait pour la première fois au New York Tribune la démonstration de sa machine à composer «Blower» fonctionnant à l'air comprimé. Les matrices étaient disposées dans une série de tubes verticaux rappelant un jeu d'orgues (Civilis. écr., 1939, p.8-4). B. − DR. FISCAL 1. Matrice des impôts sur le revenu. ,,Liste des contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu indiquant les bases d'imposition de chacun d'eux`` (Barr. 1974). 2. Matrice cadastrale. Relevé communal des parcelles de terrains par propriétaire, servant de base à la contribution foncière des propriétés (d'apr. Barr. 1974). C. − MATH. Arrangement de nombres sous forme d'un tableau rectangulaire ou carré comportant un certain nombre de lignes et de colonnes (d'apr. Olmi-July 1970). Calcul des matrices. Ces recherches ont, en particulier, mis en évidence le parallélisme existant entre la théorie des fonctions et valeurs propres et celle des matrices algébriques (Gds cour. pensée math., 1948, p.408). D. − Emploi adj. 1. Qui est considéré comme étant à l'origine de quelque chose. Couleur, pierre, taraud matrice. Dans les imprimeries où l'on traite (...) le zinc en vue de tirages (...), écrivains et graveurs exécutent (...) leurs travaux à l'endroit sur les planches matrices (Chelet, Lithogr., 1933, p.266). 2. LING. ,,En grammaire générative, la phrase matrice, ou suite matrice, est une suite dans laquelle une autre suite vient s'enchâsser au cours d'une opération d'enchâssement`` (Ling. 1972). Prononc. et Orth.: [matʀis]. Att. ds Ac. 1694. Étymol. et Hist. A. Subst. 1. a) ca 1268 anat. (Brunet Latin, Li Livres dou Tresor, éd. F.-J. Carmody, p.156), rare av. le xvies.; p. anal. 1858 matrice des ongles (Littré-Robin); b) 1770 fig. «milieu où quelque chose prend naissance» (D'Holbach, Système de la Nature, II, 162 ds Gohin); c) 1845 bot. matrice de gérofle (Besch.); 2. ca 1380 «matricule, registre» (Aalma, éd. M. Roques, t.2, 7284); 1804 la matrice du rôle de la contribution (Code civil, art. 2165, p.394); 3. a) 1520 impr. (La Librairie de Didier Maheu 204 ds Wolf (L.) Buchdruck 1979, 26); b) 1611 «carré original d'une médaille ou d'une monnaie gravé avec le poinçon» (Cotgr.); 4. 1881 math. matrix subst. masc. (Sylvester ds C.R. Académie des Sciences, t.93, p.367); 1882 matrice (id., ibid., t.94, p.396). B. Emploi adj. 1. 1530 la matrice eglise (Reg. cons. de Lim., I, 193, Ruben ds Gdf.); 1690 eglise matrice (Fur.); 2. id. couleurs matrices (ibid.); 3. id. langue matrice (ibid.). Empr. au lat. matrix, -icis terme d'anat. et «registre». En anat., la forme matrice a supplanté au xvies. les formes pop. marriz/marris fém. (1300, Roman d'Appolonius, ch. 25 ds Rom. Forsch. t.34, p.20) encore dans quelques parlers et amarri masc., issu du précédent par agglutination de l'art. (1538, Est.). Voir aussi mère et utérus. Fréq. abs. littér.: 214. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 503, b) 428; xxes.: a) 134, b) 170. DÉR. 1. Matriçage, subst. masc.,technol. Opération effectuée à chaud ou à froid, au pilon ou à la presse entre des matrices, afin d'obtenir une pièce forgée de forme et de dimensions aussi rapprochées que possible de celles de la pièce usinée définitive. Le matriçage au pilon fatigue bien plus les matrices que (...) le matriçage à la presse (Champly, Nouv. encyclop. prat., t.15, 1927, p.142).Dans le travail en série, on forge les pièces en matrice: au moment du matriçage, il se forme tout autour de la pièce une bavure de 1 à 3 mm d'épaisseur (Gorgeu, Machines-outils, 1928, p.271).− [matʀisa:ʒ]. − 1reattest. 1902 (Nouv. Lar. ill.); de matrice, suff. -age*. 2. Matricer, verbe trans.,technol. Reproduire une forme grâce à une opération de matriçage. [Les] (...) moutons et marteaux à planche permettent de matricer avec une épaisseur de bavure très faible (Gorgeu, Machines-outils, 1928p.314).Les essais de macrostructure ont pour objet de déceler l'hétérogénéité chimique des aciers. Par ce procédé, on peut reconnaître si une pièce a été coulée, laminée, ou bien si elle a été découpée au lieu d'être matricée, si elle a été soudée, etc... En un mot, cette opération permet de définir le mode de fabrication (Barnerias, Aciéries, 1934, p.24).− [matʀise]. − 1reattest. 1927 (Champly, op. cit., p.148); de matrice, dés. -er. |