| MATRAQUER, verbe trans. Donner des coups de matraque. Matraquer des grévistes, des manifestants. J'étais, en esprit, cet après-midi, avec le général de Gaulle contre ceux qui hurlaient: NON! − mais j'étais avec ceux-là, contre la police qui les matraquait (Mauriac, Nouv. Bloc-notes, 1961, p.99):. ... camarades lynchés... camarades marins des prisons maritimes... camarades emprisonnés... camarades indo-chinois de Poulo Condor... camarades matraqués...
Camarades... camarades...
C'est pour ses camarades qu'il veut gueuler le veilleur de nuit pour ses camarades de toutes les couleurs de tous les pays...
Prévert, Paroles, 1946, p.143. ♦ P. anal., domaine milit.Mitrailler, bombarder d'une façon intense (d'apr. Gilb. 1980). Les commandos K... sont encerclés par 15.000 hommes et matraqués par un bombardement et des tirs d'artillerie (Y. Courrière, Le Temps des léopards, 1969ds Gilb. Mots contemp. 1980). − P. méton. Il [général de Gaulle] demeure au contraire à nos yeux ce qu'il fut dès le premier jour: ce défenseur que la liberté trahie vit se lever tout à coup. En ce temps-là, sur la France matraquée, les Maurrassiens de Vichy, en tremblant de joie, essayaient enfin leur système (Mauriac, Bâillon dén., 1945, p.390). − Spécialement ♦ COMMERCE Imposer des prix considérés comme excessifs. Ces mesures qui «matraquent» les automobilistes ne suffiront pas à régler le problème de la circulation à Paris (L'Entreprise, 2 avr. 1971, p.27, col. 2).Baisser fortement les prix lors des soldes. De très grandes surfaces (...) n'hésitent pas à vendre des produits de très grande consommation, comme les lessives, à des marges nulles ou voisines de zéro, la vente à perte étant interdite. C'est cela qu'on appelle «casser», «écraser» ou «matraquer» un prix (Réalités,sept. 1972, p.56). ♦ MÉD. ,,Soumettre un organisme à des doses massives de médicaments`` (Gilb. 1971). L'organisme, matraqué par les techniques d'immunosuppression, reconstituait peu à peu ses défenses (L'Express,15 janv. 1968, ds Gilb. Mots contemp. 1980). ♦ Diffuser une émission, un disque, une information ou une annonce de façon répétitive pour imposer de force ce message au public. L'avènement sur les ondes des journalistes a constitué une véritable métamorphose. Il ne s'agit plus de matraquer, mais d'expliquer (L'Express,20 janv. 1969, p.50, col. 3). − Arg. Condamner. Les jurés des assises n'accordaient pas de circonstances atténuantes dans ces cas-là [un agent de police tué]. Ils matraquaient au maxi (2) (...) (2) Matraquer au maxi: condamner au maximum (Le Breton, Razzia, 1954, p.179). REM. Matraqué, -ée, part. passé et subst.Celui qui a reçu un coup de matraque. Le sang n'arrête pas de couler Où s'en va-t-il tout ce sang répandu Le sang des matraqués... des humiliés... Des suicidés... des fusillés... des condamnés (Prévert, Paroles, 1946, p.120). Prononc.: [matʀake], (il) matraque [-ak]. Étymol. et Hist. 1. 1927 fig. «assommer le client par une addition excessive» (s. réf. ds Esn.); 2. 1939 «frapper avec une matraque» (Montherl., Lépreuses, p.1476); 3. 1945 fig. «traiter durement, assommer» (Mauriac, loc. cit.); 4. 1952 «condamner au maximum» (s. réf. ds Esn.); 1954 (Le Breton, loc. cit.); 5. 1967 radio, télév. «soumettre à un matraquage publicitaire» (Écho de la Mode, 5 nov. ds Dict. 2 1971). Dér. de matraque*; dés. -er. DÉR. Matraqueur, -euse, adj.a) [En parlant d'une pers.] Qui matraque. On a vu par exemple dans (...) Mexico et retour une jeune milliardaire qui est insupportable parce qu'elle a des idées de gauche, et le jeune homme séduisant parce qu'il est un flic matraqueur d'étudiants révolutionnaires. L'homme épouse le magot, la femme épouse l'ordre personnifié... (G.Sadoulds Commune, nov. 1936, no39, pp.373-374 ds Quem. DDL t.15).Emploi subst. Celui qui matraque. Ils ne sont pas des hommes selon notre espèce et notre règle, et le seul espoir est placé dans les mitrailleuses de la guerre civile, mais voici qu'il faut penser que ces déchets humains, ces matraqueurs casqués aux joues rouges, font le même travail que les purs et vénérables penseurs auprès de qui nous avons grandi (Nizan, Chiens garde, 1932, p.183).P. anal. Joueur brutal. Jusqu'à ce que l'arbitre, un vendu, envoie les matraqueurs se calmer sur la touche (Comment parlent les sportifsds Vie Lang., 1953, p.176).b) [En parlant d'une chose] Qui est relatif au matraquage. Une publicité voyante, carrément matraqueuse (La Croix, 14 avr. 1970ds Gilb. Mots contemp. 1980).− [matʀakoe:ʀ], fém. [-ø:z]. − 1resattest. a) 1932 subst. «personne qui matraque» (Nizan, loc. cit.), 1936 adj. «qui matraque» (G. Sadoul, loc. cit.), b) 1953 «sportif brutal» (Vie Lang., supra); de matraquer, suff. -eur2*. BBG. − Quem. DDL t.18 (s. v. matraqueur). |