| MATERNEL, -ELLE, adj. et subst. I. − Adjectif A. − Qui, physiologiquement et psychologiquement, est propre à la mère, appartient ou est naturel à sa fonction et à son état. Affection, allaitement, coeur, étreinte, œil, orgueil, sein, sourire maternel(le). Les sentiments généraux qui composent le fond de l'humanité, la tendresse paternelle et maternelle, la piété filiale, l'amitié, l'amour, sont inépuisables (Chateaubr.,Mém., t.2, 1848, p.44).L'amour maternel fait voir dans ces cas-là sa science presque infaillible, lorsqu'il promène, câline ou berce le poupon (Alain,Propos, 1913, p.151): 1. Il me semble que je manquerais au quatrième commandement du décalogue: «Tes père et mère honoreras», et qu'un peu du tendre respect dont ma pensée enveloppe la chère image de ma mère s'évanouirait, si je me la représentais un seul instant hors de sa fonction maternelle et sans les premiers cheveux gris et les quelques rides qu'elle avait déjà, quand j'étais tout petit.
Coppée,Bonne souffr., 1898, p.90. − [En parlant des animaux] Le lait maternel est la première nourriture du jeune animal (Wolkowitsch,Élev., 1966, p.94). − En partic. ♦ Instinct maternel. Amour de sa progéniture, chez les hommes comme chez les animaux, dans ses tendances profondes, naturelles et instinctives. Il n'y a que l'instinct maternel, intuition admirable où entrent les souvenirs de la vierge et l'expérience de la femme, qui sache comment et de quoi doit être fait ce demi-jour (Hugo,Misér., t.2, 1862, p.83). ♦ MÉD. Mortalité maternelle. Le fait de mourir en couches: 2. Selon la définition de la Fédération internationale de gynécologie et d'obstétrique, le terme de «mortalité maternelle» concerne «la mort de toute femme succombant à n'importe quelle cause, que ce soit pendant la grossesse ou les quarante-deux jours suivant son issue, sans tenir compte de la durée ou du siège de la gestation». Or, la mortalité maternelle a décru, régulièrement dans notre pays, où elle est passée de soixante décès pour dix mille naissances au cours des années 1918-1929, à 5,9 décès sur dix mille pour la période 1961-1970.
L'Est Républicain, 29 mai 1981, p.19, col. 5. − P. anal. Qui est semblable à ce qui vient d'une mère ou évoque le comportement d'une mère vis-à-vis de son enfant. Attitude, geste, passion, pitié, protection, soin, sollicitude maternel(le). Alors, minute solennelle, Admirablement papelard, D'une main presque maternelle, Je mis à chacun un foulard (Rollinat,Névroses, 1883, p.289).Le supérieur, M.l'abbé Méyer, plaisait par sa douceur et sa distinction. Il me reste encore aujourd'hui l'idée que c'était un homme prudent, affectueux, maternel (A. France,Pt Pierre, 1918, p.249).La terre était maternelle et me faisait songer à d'idéales, profondes, et solennelles fosses − des fosses d'âmes, au déclin pâle d'un beau jour d'hiver (Valéry,Corresp.[avec Gide], 1942, p.44). − En partic. École maternelle. Établissement de première éducation accueillant les plus jeunes enfants après l'âge de la «crèche» et avant celui de la scolarité obligatoire. Il y a une place de femme de service d'école maternelle (Frapié,Maternelle, 1904, p.4).L'école maternelle, constituant généralement la première coupure avec la famille, joue un rôle privilégié dans le processus de socialisation. D'autres notions peuvent être dégagées de ce concept de socialisation (...): l'école maternelle a un rôle normatif. Elle fait pénétrer chez l'enfant, au sortir de la vie familiale, un certain nombre de valeurs en vigueur dans notre société, par le biais d'un modelage idéologique tendant à développer des attitudes communes (L. Lurçat,La Maternelle, Une école différente?Paris, Éd. du Cerf, 1977, p.8). ♦ Fam. et p. ell. La maternelle. Sans doute n'en est-on plus au niveau des bambins de la maternelle qui ne peuvent réussir à partir ni du même point ni en même temps! (Jeux et sports, 1967, p.112). B. − Qui, généalogiquement, a rapport à la mère, considérée comme celle qui transmet la vie. Aïeul, bien, famille, héritage, lignée, oncle, parenté, tante maternel(le). Chez les groupes du nord, les biens du De Cujus passaient au fils de sa soeur, méthode connue sous le nom de filiation matrilinéaire, ou descendance maternelle, tandis que celle des Salish était patrilinéaire ou paternelle (Page,Dern. peuples primit., 1941, p.117).Dans les grandes familles féodales, le nom constituait une propriété morale et (...) nul ne pouvait en revendiquer la possession s'il n'avait été porté avant lui par un de ses ascendants en ligne directe, tant du côté paternel que du côté maternel (L'Hist. et ses méth., 1961, p.708): 3. En d'autres cas, les circonstances concomitantes non seulement contribuent à former le noyau d'un clan, mais à y incorporer également les frères et les soeurs, créant ainsi le clan proprement dit. La filiation maternelle n'implique pas une position prédominante de la femme.
Lowie,Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p.291. − Langue maternelle. Première langue apprise inconsciemment par un sujet au contact de l'environnement familial immédiat. Il suffit donc à un enfant d'apprendre sa langue maternelle par l'usage, et la lecture des bons écrivains; il en étudiera les règles quand son jugement sera formé: en attendant, il fera de la prose, comme M. Jourdain, sans le savoir (Bern. de St-P.,Harm. nat., 1814, p.306).Qu'il me soit permis de m'étonner qu'il faille faire des exercices si douloureux pour apprendre une langue qu'on nomme maternelle et que ma mère m'apprenait fort bien (A. France,Livre ami, 1885, p.140). C. − Qui, socialement et juridiquement, concerne les mères. Statut maternel. − En partic. ♦ Maison maternelle. ,,Établissement public ou privé qui accueille des femmes enceintes, quelque temps avant et après l'accouchement`` (Littré). Aide sociale à l'enfance. − Établissements pouvant recevoir des subventions: foyers de pupilles de l'État; maisons maternelles; hôtels maternels (Fonteneau,Conseil munic., 1965, p.97).Centre de protection maternelle et infantile: 4. La politique sanitaire et sociale s'est reflétée dans plusieurs dispositions législatives d'ordre préventif: la loi Strauss, du 17 juin 1913, en faveur des femmes en couches, la loi du 9 mars 1922 et le décret du 8 octobre 1927 sur l'hygiène publique, puis trois ordonnances de 1945 relatives à la protection maternelle et infantile, créant un service d'hygiène scolaire et organisant des examens périodiques de santé.
Bariéty, Coury,Hist. méd., 1963, p.797. ♦ Société maternelle ou Société de protection maternelle. ,,Nom d'une association de femmes charitables dont le but est de recueillir des secours pour les femmes pauvres en couches`` (Littré). L'abbé Durieu conseilla d'ailleurs à Madame Baudouin d'éviter les allusions aux grandes dissensions, et de rester sur le terrain d'une fusion entre la société de la protection maternelle et celle de Saint-Vincent-de-Paul (Duranty,Malh. H. Gérard, 1860, p.170). II. − Emploi subst. fém., arg. A. − Vagin. «Ne te torche pas, qu'elle me dit, et baise-moi debout». Je remets ça; par la maternelle cette fois. À peine je l'enconne qu'elle me plante son index dans le gnon et qu'elle hurle: «Que c'est bon, que c'est bon!» (G. Guégan,Un Silence de mort, 1975, p.99 ds Cellard-Rey 1980). B. − [Dans l'arg. des écoles] Mère. Sa maternelle venait le voir tous les jeudis et lui laissait des friandises (Bruant1901, p.317). Prononc. et Orth.: [matε
ʀnεl]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1370-72 langage maternel «langue du pays où l'on est né» (Oresme, Ethiques, Prologue, éd. A. D. Menut, p.101); 1538 langue maternelle (Est.); 2. 1370-72 «qui appartient à la mère» (Oresme, op. cit., p.459: L'en doit [...] a la mere honeur maternel); 3. 1567 «du côté de la mère» (en parlant d'un héritage) (Coutumier Général, 2, 640b); 4. 1848, 28 avr. école maternelle (Hippol. Carnot, arrêté cité ds Cahiers du C.R.E.S.A.S., éd. I.N.R.D.P., no9, 1973, p.15 ds Quem. DDL t.22); 1904 La Maternelle (Frapié, titre d'ouvrage); 5. 1880 subst. fém. arg. «la mère» (Larch. Suppl., p.83). Dér. à l'aide du suff. -el* du lat. maternus «de la mère», ou peut-être empr. du lat. médiév. maternalis, dér. de maternus (ca 1380 ds Latham), mais vraisemblablement plus anc., l'adv. maternaliter datant de 1122 (ds Du Cange). V. FEW t.6, p.491a. Fréq. abs. littér.: 1589. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2322, b) 2603; xxes.: a) 2410, b) 1931. DÉR. 1. Maternalisme, subst. masc.Tendance abusive à imposer une protection maternelle ou de style maternel ou une domination féminine (d'apr. Gilb. Mots contemp. 1980). Elles tiennent une permanence dans leur librairie. Là elles sont «à l'écoute» des femmes qui passent, mais sans maternalisme (Le Point, 9 déc. 1974ds Gilb. 1980).−[matε
ʀnalism̭]. − 1reattest. 1964 (A. Sarrazin, L'Astragale, p.16); de maternel, suff. -isme*. 2. Maternellement, adv.Comme le fait ou le ferait une mère. Elle avait la voix tendre d'une grande soeur; il ne put retenir un sanglot. Elle s'assit sur le bord du matelas, passa le bras autour de son cou, et, maternellement, pour le consoler, − dernier argument de toutes les femmes − elle prit sa tête et l'appuya contre sa poitrine (Martin du G.,Thib., Cah. gr., 1922, p.642).− [matε
ʀnεlmɑ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. − 1reattest. 1368 maternalment (Miracles de Nostre Dame, éd. G. Paris et U. Robert, t.IV, p.234); de maternel, suff. -ment2*. − Fréq. abs. littér.: 51. |