| MANIÉRISME, subst. masc. Caractère, qualité de celui/de ce qui est maniéré. A. − 1. Dans le comportement. Maniérisme charmant, distingué, élégant; maniérisme féminin; maniérisme de la conduite. Son maniérisme, son afféterie, ses cheveux et ses ongles bien soignés, sa bouche vermeille (...) étaient sévèrement blâmés (Billy, Introïbo, 1939, p. 50).− Tu jonglais à que'que chose, je gage ben. À quoi c'est que tu jonglais ? − À toi, dit-il, sans espièglerie, sans maniérisme, tout simplement (Roy,Bonheur occas.,1945, p. 399): 1. ... cette étrange femme aux yeux peints et cernés jusqu'au milieu de la figure et dont le maniérisme galant vous fait penser aux petites femmes qui sont représentées sur les boîtes d'allumettes.
Goncourt, Journal,1878, p. 1264. − PSYCHOL. ,,Caractère affecté et précieux, donnant une impression d'inadéquation et d'inauthenticité des mimiques, des gestes, des propos et des écrits, parfois sur un fond hystérique ou banalement vaniteux mais surtout caractéristique de la schizophrénie`` (Thinès-Lemp. 1975). Maniérisme artistique: 2. ...qu'il ne soit plus soutenu par une pensée forte et attentive au réel, et (...) voici [le sens critique] qui tourne à la manie de la distinction, au maniérisme révélateur des attitudes de rupture avec le réel.
Mounier,Traité caract.,1946, p. 670. 2. ARTS, LITT. Maniérisme grandiloquent, tourmenté; maniérisme sans fadeur; maniérisme, d'un acteur, d'un auteur, d'un musicien, d'un texte; maniérisme des lignes; maniérisme d'époque; maniérisme 1900; style, talent qui tend au maniérisme, qui frôle le maniérisme. M. Félix Weingartner (...) ne mérite point les reproches d'affectation ou de maniérisme auxquels sont exposés certains de ses rivaux; son interprétation demeure simple et ferme, et loin d'altérer les oeuvres, a pour première qualité d'en rendre le sens et d'en respecter le caractère. (P. Lalo,Mus.,1899, p. 373).Or, l'affectation, le pire maniérisme verbal (...) c'est encore cela qu'on trouve chez les auteurs dont je m'occupe aujourd'hui (Léautaud,Théâtre M. Boissard,1926, p. 194).Un film esthétique jusqu'au maniérisme, subtil jusqu'au faisandage (Sadoul,Le Cinéma des orig. à nos jours,1949, p. 190): 3. La «manière» toutefois pourra dégénérer en «maniérisme», si elle devient consciente, puis cultivée, pratiquée. De l'art, on passe alors à l'artifice, qui commence là où le mécanisme se substitue à la création.
Huyghe,Dialog. avec visible,1955, p. 262. − En partic. Courant artistique particulièrement en honneur dans l'Italie du xviesiècle, entre la Renaissance et le baroque, qui exprime la recherche d'une manière personnelle dans la facture et une recréation du monde, d'après des images intérieures et des règles d'art plus ou moins raffinées (bella maniera) en opposition avec la règle d'imitation de la nature, et qui se manifeste notamment par l'allongement des formes (d'apr. Bég. Dessin 1978). [L]'émotion [de Michel-Ange] qui déborde, prépare la voie au maniérisme, qui voudra imiter les résultats sans avoir puisé aux mêmes sources (Ménard,Hist. B.-A.,1882, p. 123): 4. Après 1520 se développe le maniérisme que Busse serait tenté de confondre avec le baroque dans son livre Manierismus und Baroskstil (1911) et que Giuliano Brigante a spécialement étudié à propos de Tibaldi [Il manierismo di Pellegrino Tibaldi, 1945].
L. Hautecoeur,Formes et reflets, Paris, Club fr. de l'art, 1954, p. 5. B. − P. méton. Manifestation de maniérisme. C'est d'eux [des gens distingués] qu'elle tenait le maniérisme qui consiste à supprimer l'article ou le pronom démonstratif devant un adjectif qualifiant une personne (Proust,J. filles en fleurs,1918, p. 511).Les platitudes, les vulgarités, les maniérismes, les coq-à-l'âne qui parsèment habilement ces dialogues (Sarraute,Ère soupçon,1956, p. 123). Prononc. et Orth.: [manjeʀism̭]. Att. ds Ac. 1935. Étymol. et Hist. 1823 (Boiste: Manièrisme, système, façon, genre, style du maniériste; affectation de manières, peu usit.). Dér. de manière*; suff. -isme*; cf. en 1806 maniérisme dans un sens spéc. désignant un cour. artistique et littér. des xvieet xviies., indépendant ou forme du baroque (Millin, Dict. des B.-A., t. 2, p. 389, s.v. manièriste: Les Italiens diront d'un maître, qu'il introduit un maniérisme, c'est-à-dire, un genre qui, en quelque sorte, fait secte; expr. qui n'est point dans notre langue), empr. à l'ital. manierismo «id.» (fin xviiie-début xixes. ds Batt.), dér. de maniera désignant une certaine pratique artistique académique (ibid. no21), v. Dupré 1972 et FEW t. 6, 1, p. 282a, note 7. Fréq. abs. littér.: 44. Bbg. Brahmer (M.). Le Maniérisme - terme d'hist. littér. Acta litteraria Academiae scientiarum hungaricae. 1962, t. 5, p. 251. |