| MAIGRE1, adj. I. A. − [En parlant d'un animé] 1. [En parlant d'une pers., p. anal. d'un animal, notamment d'un mammifère ou d'un oiseau] Qui manque de graisse et même de chair par rapport à sa taille et à son ossature. Synon. amaigri, décharné, efflanqué, étique, sec, squelettique; anton. corpulent, dodu, gras, grassouillet, gros, obèse, replet, rondouillard (fam.).Maigre et chétif; maigre et décharné; maigre et sec. Le commandant Davis ressemblait un peu à ces grands oiseaux des mers arctiques, maigres, longs et chauves (Peisson, Parti Liverpool, 1932, p. 11).Trois chevaux maigres, si maigres qu'on aurait pu compter leurs côtes - de vraies haridelles (Guèvremont,Survenant, 1945, p. 213): 1. ... la beauté consiste surtout dans la rondeur des formes et la courbure gracieuse des lignes. (..) on dit assez communément que, à chaque épingle qu'elle ôte, une femme maigre, quelque belle qu'elle paraisse, perd quelque chose de ses charmes.
Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 240. − Locutions ♦ Courir comme un chat* maigre. ♦ Vaches* maigres. − Expr. compar. fam. ♦ Maigre comme un cent de clous. Très maigre. Maigre comme un cent de clous, elle était allongée comme ces interminables sucres d'orge (Huysmans, Soeurs Vatard, 1879, p. 41). ♦ Maigre comme un clou*, comme un coucou*. − Emploi subst. Anton. gras, gros.Il cita certains épisodes: Les gras, énormes à crever, préparant la goinfrerie du soir, tandis que les maigres, pliés par le jeûne, regardent de la rue avec la mine d'échalas envieux (Zola, Ventre Paris, 1873, p. 804).À l'orchestre, le sec Legouvé, le maigre Halévy, le bedonnant Meilhac, dont je vois sous les habits les anatomies, comme Daumier montre les gras et les maigres à l'école de natation (Goncourt, Journal, 1885, p. 452). ♦ Fausse maigre (fam.). Femme aux rondeurs cachées. Quel genre de femme est-ce? (...) Petite, noire, mince. Une fausse maigre (A. France, Orme, 1897, p. 255).Cette disposition (répartition de la graisse) réalise le type bien connu que l'on désigne sous le nom de «fausse maigre» (Richer, Nouv. anat. artist., t. 2, 1920, p. 93). 2. [En parlant (d'une partie) du corps] Qui a peu de graisse ou qui en est dépourvu; qui est peu charnu. Synon. décharné, osseux, sec, squelettique; anton. charnu, dodu, gras, grassouillet, gros, potelé, rebondi, rond.Bras, corps, cou, mollet, poitrine, visage maigre; profil maigre. Ses maigres jambes héronnières, son échine efflanquée, sa poitrine osseuse (Gautier, Fracasse, 1863, p. 306).Des épaules, des cuisses pas maigres du tout, monsieur, rondes et fermes comme des pêches! (Zola, Pot-Bouille, 1882, p. 191).Il vit venir à lui un sanglier. De soies rudes, de flancs maigres, l'animal avait l'air sauvage et affamé (Pesquidoux, Chez nous, 1921, p. 77). − Vieilli, fam. Maigre échine. Personne sèche et décharnée. (Dict. xixes.). B. − [En parlant d'un inanimé concr.] 1. [En parlant d'un aliment] Qui contient peu de graisse ou de matière grasse, ou qui n'en contient pas. Anton. gras.Côtelette, lait, lard maigre. Mettez dans une casserole à ragoût quelques émincés de jambon maigre (Gdes heures cuis. fr., Carême, 1833, p. 132).Préparez une farce de viande maigre de veau cru (Gdes heures cuis. fr.,L. Tendret,1896, p. 198).Les poissons à chair maigre, la sole, le merlan, le turbot, le brochet, sont plus digestibles que les poissons à chair grasse, saumon, thon, maquereau, anguille (Macaigne, Précis hyg., 1911, p. 231). ♦ En partic. Fromage, yaourt maigre. Qui est préparé avec du lait écrémé. Comme sources de protéines animales: La caséine, le lait écrémé, les fromages maigres (R. Lalanne, Alim. hum., 1942, p. 122). − Emploi subst. masc. sing. avec valeur de neutre. Partie d'une viande où il n'y a aucune graisse. Anton. gras.Je ne veux point du gras de ce jambon, je veux du maigre (Ac.1798-1878).Le maigre d'un jambon (Ac.1935). 2. En partic. [En parlant d'un mets; p .méton. d'un repas] a) Qui n'est pas à base de viande ou de graisse animale, qui ne comporte aucun aliment gras (v. ce mot II A 1 b). Anton. gras.Bouillon, farce, sauce, vol-au-vent maigre; cuisine, menu, régime, repas maigre. Ma maîtresse dit d'une soupe maigre, très maigre, qu'elle vient de manger chez une amie: «Il faudrait un fier maître d'armes pour crever les yeux à ce bouillon-là!» (Goncourt, Journal, 1859, p. 665).Elle commandait une tourte chez le pâtissier Magloire, et de préférence une tourte maigre, comme plus délicate. M. Bergeret se représenta donc (...) une tourte aux oeufs et au poisson, fumant dans un plat (A. France, Mannequin, 1897, p. 229). − RELIG. CATH. ♦ Jour(s) maigre (s). Jour(s) où la consommation de viande et d'aliments gras est interdite par l'Église. Cet hôtel, particulièrement renommé pour le poisson, ne suffisait pas à la foule des consommateurs qui s'y portaient les jours maigres et pendant toute la durée du carême (Jouy, Hermite, t. 3, 1813, p. 88).Je vous offre un lit et à souper. C'est jour maigre, mais j'ai vu là-haut que vous n'êtes pas catholique; ainsi nous vous restaurerons de notre mieux (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p. 379).Les étangs avaient été réempoissonnés et fournissaient de grenouilles, de tanches et de carpes pour les jours maigres (Pourrat, Gaspard, 1930, p. 17). ♦ Vx. Viande maigre. Chair du gibier d'eau, ne constituant pas pour l'Église un aliment gras. (Dict. xixeet xxes., Ac. 1935). V. macreuse. b) Emploi subst. masc. sing. avec valeur de neutre
α) Alimention qui ne comporte ni viande, ni mets accommodé au gras; manière d'accommoder les aliments sans graisse ni jus de viande. Son estomac ne peut supporter que le maigre (Ac.1935). − Loc. adj. ou adv. ♦ Au maigre. Sans graisse ni jus de viande. Anton. au gras.Potages (...) à la purée de marrons (...). L'on peut aussi faire ce potage au maigre, en prenant du bouillon maigre au lieu de bouillon gras (Viard, Cuisin. roy., 1831, p. 9).Donnez-moi un riz au maigre... Moi, je suis un homme du peuple. Je n'ai pas du tout d'argent (Duhamel, Nuit St-Jean, 1935, p. 105). ♦ Vieilli. En maigre. Sans viande ni aliment gras. Vous a-t-il traité en maigre ou en gras? (Ac.1798-1878).Le vendredi, sa table (de Granville) se trouva servie en maigre (Balzac, Double fam., 1830, p. 277).
β) RELIG. CATH. Pratique religieuse consistant à s'abstenir de viande et d'aliments gras, les jours où l'Église en interdit la consommation. Institution du maigre. Les chants, les cloches, l'encens, le maigre, l'abstinence, etc., étaient des institutions profondément sages (Joubert, Pensées, t. 1, 1824, p. 125).Les menus observent le maigre du vendredit saint (Gide, Journal, 1944, p. 267): 2. ... Ces jeûnes et ces maigres répétés m'excèdent: vrai, le brave saint Benoît aurait bien dû, à l'occasion de sa fête, nous permettre d'user d'aliments gras! Va te faire fiche, l'austère morue va, une fois de plus, sévir...
Huysmans,Oblat, t. 2, 1903, p. 43. − Loc. verb. Faire maigre, manger maigre. Respecter ces prescriptions. Ma cuisinière fait maigre le vendredi (Stendhal,Rouge et Noir,1830, p. 111).26 mars, Vendredi-Saint. Singulière chose de manger maigre le jour où on a mis en croix l'homme apocryphe des Écritures, quand on mange gras le jour où est morte votre mère (Goncourt, Journal, 1869, p. 507).Mgr Gibier, un nom prédestiné, évêque de Versailles, fit assavoir qu'il levait ce vendredi-là, pour toute la Seine-et-Oise, l'obligation de faire maigre (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 223). 3. P. anal. [En parlant d'une matière ou d'une solution] a) PEINT., VERNIS. Qui ne contient pas de corps gras; qui a une faible teneur en composants gras ou mous. Anton. gras.Les vernis à l'essence sont des vernis maigres. (...) ils ne contiennent pas d'huiles végétales (Coffignier, Vernis, 1921, p. 537): 3. On vend deux sortes de patines ou teintures: les patines grasses et les patines maigres, les premières (...) correspondant à la peinture à l'huile, les secondes à la peinture à l'aquarelle.
Closset, Travail artist. cuir, 1930, p. 41. b) BÂTIMENT Chaux maigre. Chaux qui se délaye avec une certaine quantité d'eau en une pâte courte et peu foisonnante, sans liant ni onctuosité (d'apr. Chabat 1881). Anton. chaux grasse.Le sable des mortiers de chaux grasse et de chaux maigre sert à augmenter la perméabilité de la chaux (Bourde, Trav. publ., 1928, p. 156).Mortier maigre. Mortier qui contient peu de liant (chaux ou ciment). Anton. mortier gras.Les murs de maçonnerie construits avec ces mortiers maigres sont d'autant plus perméables à l'eau que les pierres sont elles-mêmes plus compactes et plus dures (Cléret de Langavant, Ciments et bétons, 1953, p. 133). c) MINÉR. Charbon, houille maigre. Charbon, houille pauvre en matières volatiles et fournissant un combustible de qualité moyenne. Anton. charbon, houille grasse.Pour les charbons maigres on est obligé de recourir à un agglutinant spécial [pour les agglomérer] (Ser, Phys. industr., 1888, p. 76): 4. On a parfois dit que [la] richesse en gaz était en relation avec la nature grasse du charbon; il est incontestable cependant que certaines houilles maigres peuvent aussi dégager abondamment du grisou.
Haton de La Goupillière, Exploitation mines,1905, p. 709. d) PÉDOLOGIE Argile maigre. Argile riche en silice et peu plastique. Anton. argile grasse.V. gras II A 2 a α. ex. de Al. Brongniart, Arts céram., t. 1, 1844, p. 318.Sol, terre maigre. Sol, terre peu plastique où dominent les éléments siliceux (d'apr. Plais.-Caill. 1958). Les terres maigres, lorsqu'elles sont entièrement sèches, se réduisent facilement en poussière et peuvent être éparpillées par le moindre vent (Baudrillart, Nouv. manuelforest., t. 1, 1808, p. 80).Le rupestris du Lot [variété de vigne américaine] qui est très vigoureux dans les sols maigres et profonds, est à peine plus vigoureux que le riparia [variété de vigne américaine] dans les sols riches ou dans les sols peu profonds (Levadoux, Vigne, 1961, p. 70). e) Toile maigre. Toile d'emballage qui n'est pas enduite de substances bitumeuses. Emballage en toile maigre et en toile grasse (Nosban, Manuel menuisier, t. 2, 1857, p. 223). II. − P. ext. (de I A). [L'adj. est très fréq. antéposé et présente parfois une valeur dépréc.] A. − 1. Qui manque d'ampleur; qui est de forme grêle et étroite. Synon. délié, élancé, étroit, fin, grêle, mince.Peuplier, pin maigre; maigres cyprès; maigres lampadaires. Un élégant et maigre palmier (Michelet, Journal, 1842, p. 423).Les cours des fermes étaient pleines d'étranges guimbardes grises, hautes, maigres, crochues, pareilles aux animaux à longues pattes du fond des mers (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Père Amable, 1886, p. 230): 5. La primevère maigre, toute en tige, à corolle rudimentaire, tient encore, par une radicelle fragile, au pré où je cueillais des centaines de primevères...
Colette, Mais. Cl., 1922, p. 263. 2. Spécialement a) BEAUX-ARTS − [En parlant d'un élément architectural ou ornemental] Très allongé ou très menu; dont les proportions sont étriquées. Synon. étriqué, étroit, exigu, grêle, menu, mince.Maigre colonne, maigres moulures. Dalle noire, encadrée d'un maigre filet de cuivre (Hugo, Rhin, 1842, p. 72).[Aux] chapiteaux du portique de l'atrium de Saint-Clément, (...) on [ne] voit du corinthien que l'abaque et de maigres volutes d'angles (Lenoir, Archit. monast., 1852, p. 219).Ces pilastres, ces chambranles, ces maigres archivoltes, ces bandeaux, et ces sculptures prodiguées (Viollet-Le-Duc, Archit., 1872, p. 32). − [En parlant d'un dessin, d'une peinture; p. méton. de leur exécution] Qui manque d'ampleur (dans la composition), de moelleux (dans l'exécution); qui est d'une facture sèche et étriquée. Synon. sec; anton. ample, large, moelleux, nourri.Tableau, touche, trait maigre. Blondet félicita Raoul de rencontrer une femme qui n'était encore coupable que de mauvais dessins au crayon rouge, de maigres paysages à l'aquarelle (Balzac, Fille Ève, 1839, p. 110).Ses scènes de la vie des animaux, d'une fantaisie tarabiscotée et d'un dessin maigre, ont fait baptiser Grandville le fabuliste du crayon (Réau, Art romant., 1930, p. 182). ♦ Emploi subst. masc. Trait maigre. V. gras II A 2 b α ex. de E. de Goncourt, Mais. artiste, t. 1, 1881, p. 223. b) ÉCRITURE et IMPR. [En parlant d'un signe d'écriture, d'un caractère ou d'un filet] Dont le tracé est fin et ténu. Anton. gras.Majuscule maigre, filets maigres. Cette discipline de son esprit [de Péguy] se lisait tout de suite dans sa haute et maigre écriture (Tharaud, Péguy, 1926, p. 12).Sur le fond en grisaille des caractères maigres, le caractère noir se détache avec vigueur et netteté (E. Leclerc, Nouv. manuel typogr., 1932, p. 262).Une lettre est maigre par rapport à une autre, mais elle l'est aussi indépendamment de toute comparaison (Impr.1977). − Emploi subst. masc. Caractère d'imprimerie au tracé plus léger que celui du caractère normal. Composer un texte en maigre. La publicité, après avoir recherché le contraste en forçant sur les gras s'est intéressée aux maigres (Impr.1977). B.− 1. Peu fourni, peu abondant. Synon. clairsemé, pauvre; anton. dense, dru, épais, opulent, serré, touffu.Maigre(s) feuillage, buissons, forêts, récoltes; chevelure maigre; maigre fourrure, fumée. On se raillait de sa petite taille, de la pauvreté de sa mine, de sa barbe maigre et clair-semée, de son bégaiement (Barante, Hist. ducs de Bourgogne, t. 3, 1821-24, p. 146).De grandes étendues incultes où bleuit le chardon et foisonne la ronce. Peu de blé, une maigre vigne, et peut-être çà et là quelques amandiers (Bosco, Mas Théot., 1945, p. 60): 6. On traverse une maigre garenne, devant les communs. La terre ici n'aime pas les arbres; et les hommes. Eux non plus, ne les aiment pas. La terre, sèche et dure, les nourrit mal.
Mauriac, Journal 2, 1937, p. 106. a) En partic. [En parlant d'un repas ou d'une portion de nourriture] Peu copieux. Anton. copieux, plantureux.Un pauvre diable qui, après avoir mangé sa maigre pitance, achevait de dîner en dévorant des yeux le festin pantagruélique de son voisin (Hugo, Rhin, 1842, p. 235).À l'occasion de la centième, il y eut un maigre souper (L. Schneider, Maîtres opérette fr., Lecoq, 1924, p. 173). − Loc. verb., vieilli. Faire maigre chère. Manger une nourriture peu abondante et de médiocre qualité. Il était fort avare, faisant maigre chère chez lui (Barante, Hist. ducs de Bourg., t. 2, 1821-24, p. 84).Il faudra, continua Stephen faire maigre chère (Karr, Sous tilleuls, 1832, p. 77). − Expr. fam. C'est maigre. Il y a peu à manger. Qu'est-ce qu'il y a au menu? - C'est plutôt maigre aujourd'hui. Des fricandeaux... (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 274). b) [En parlant du débit d'un cours d'eau ou d'une canalisation, d'un fond] Peu abondant. Maigre filet d'eau. Nous remontons le cours du fleuve gris à quelques mètres de ses eaux maigres (Giono, Chron., Noé, 1947, p. 302).Il fallait être patient, chômer (...) lors des grandes eaux, des eaux maigres, des terribles galernées d'équinoxe (Genevoix, Routes avent., 1958, p. 130). − Emploi subst. masc. ♦ Période où le débit d'un cours d'eau est très faible. Synon. basses eaux, étiage. (Dict. xxes.). ♦ Endroit d'un cours d'eau où l'eau est peu profonde. Le Rhône bas, les maigres arrêtent la navigation (Arnoux, Rhône, 1944, p. 183). 2. Littéraire a) [En parlant d'un foyer de chaleur ou de lumière] Qui fournit peu de chaleur ou peu de lumière. Synon. faible.Une salle sordide (...) mal éclairée d'une lampe maigre (Hugo, N.-D. Paris, 1832, p. 411).L'âtre, où fume un maigre feu, juste bon à lui griller les tibias (Martin du G., Notes Gide, 1951, p. 1385). b) [En parlant d'un sol] Peu productif. Synon. improductif, pauvre, stérile; anton. fertile, productif, riche.Dans nos pays, plus les paroisses sont pauvres, de maigre sol, plus les communaux sont grands (Pourrat, Gaspard, 1930, p. 89). C. − Au fig. Peu important, insuffisant (en quantité ou en qualité). Synon. dérisoire, faible, insignifiant, insuffisant, médiocre, minime, pauvre, piètre; anton. considérable, gros, important, riche.C'est (un peu) maigre. 1. [En quantité pour de l'argent en particulier] Maigre gain; maigres ressources. La comparaison du profit que rend une bête bien logée, bien pansée, avec le maigre rapport d'un bétail mal soigné (Balzac, Méd. camp., 1833, p. 46).Les maigres émoluments que leur valent leurs fonctions ne peuvent suffire à assurer leur existence (Ce que la Fr. a apporté à la méd., 1946, p. 15). 2. [En qualité] Maigres raisons, résultats. Je ne savais plus ton adresse; je n'ai pu t'écrire la lettre de maigres consolations que je rêvais (Gide, Corresp.[avec Valéry], 1891, p. 129).Ses faibles moyens et sa maigre patience (Ricoeur, Philos. volonté, 1949, p. 393).Il y a une histoire économique dont la richesse fait honte, j'en suis sûr, à la très maigre et anémique sociologie économique (Traité sociol., 1967, p. 89). − [En parlant (du caractère) d'une oeuvre] Qui est d'un intérêt restreint; qui est d'une grande indigence (d'idées, de style, etc.). Maigre ouvrage, style, sujet. Le Ranz des vaches qu'on a tant célébré, est une maigre et chétive poésie, en face de la colossale épopée des Alpes (Michelet, Chemins Europe, 1874, p. 394). Prononc. et Orth.: [mεgʀ
̥]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. Adj. A. 1. 1174-87 «(d'un être vivant) qui a peu de graisse par rapport à son ossature» (Chrétien de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 1722: Une pucele meigre et pale); 2. a) ca 1225 «(d'une nourriture) sans graisse, cuit sans graisse» (Pean Gatineau, St Martin, 3220 ds T.-L.); b) 1771 p.anal. mortier maigre (Trév.); 3.fin xves. jour maigre selon le précepte catholique (Olivier de La Marche, Mém., éd. H. Beaune et J. d'Arbaumont, II, IV, t.3, p.180); 4.1611 p.ext. maigre chere (Cotgr.). B.1.Ca 1265 terre maigre (Brunet Latin, Trésor, éd. Fr. J. Carmody, I, CXXV, p.123); 2.1690 litt. maigre sujet (Fur.). C. 1. Ca 1265 d'un écrit, d'un style (Brunet Latin, op. cit., III, X, p.327: esgarde que ti dit ne soient maigre ne sech mais soient replain de jus et de sanc); 2.av. 1476 response maigre (Juv. des Urs., Charles VI, 1407 ds Littré); fin xves. maigres excuses (Commynes, Mém., éd. J. Calmette, IV, 2, t.2, 151, 12). D.1676 d'une pièce de bois, d'une pierre (Félibien, p.643: ... trop maigre, c'est-à-dire qu'elle ne joint pas juste, et qu'elle laisse du vuide); 1690 typogr. caractère maigre (Fur.). II.Subst. 1.ca 1175 Le maigre del dos (Benoît de Ste-Maure, Chron., 35921 ds T.-L.); 2.1559 «personne maigre» (Amyot, Hommes illustres, Brutus, IX, éd. G. Walter, p.1050); 3.1606 faire maigre (Nicot). Du lat. macer (acc. macrum) «maigre, chétif, mince; peu productif (d'une terre)»; la forme rég. maire ne se trouve que dans le nord-est (Mons) et dans quelques parlers franco-prov. des Alpes, -gr- attesté partout ailleurs, étant dû à un développement particulier analogue à celui de aigre*, ou représentant une forme demi-sav., macer ayant été en usage dans la lang. méd. et ecclés., FEW t.6, 1, p.8a; v.aussi t.24, p.99a. Fréq. abs. littér.: 3530. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2521, b)7160; xxes.: a)7513, b)4505. DÉR. 1. Maigrement, adv.[Correspond à maigre II] De façon maigre. a) Sans abondance. Synon. chichement, peu; anton. abondamment.Les mamelons déboisés ou maigrement ornés de vignes (Michelet, Journal, 1835, p.202).Et nos terres demeurent maigrement arrosées (...). Un maigre filet d'eau. De maigres terres (Péguy, Myst. charité, 1910, p.145).On vendangera tôt, mais maigrement (Colette, Naiss. jour, 1928, p.58).En partic. Anton. copieusement, plantureusement.Le dîner n'avait plus ce caractère d'abondance (...). Les plats (...) étaient maigrement servis, ils sentaient la portion congrue (Balzac, Illus. perdues, 1839, p.162).Nourrie maigrement de viandes de rebut, de légumes gâtés (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p.252).b) De façon insuffisante (en quantité ou en qualité). Synon. insuffisamment, médiocrement, pauvrement, petitement; anton. largement, grassement.Cet écrivain avait choisi un beau sujet, mais il l'a traité trop maigrement (Ac.1935).Il plaida de temps à autre, gagnant maigrement sa vie, sans paraître s'élever au-dessus d'une honnête médiocrité (Zola, Fortune Rougon, 1871, p.62).Au XVIIIesiècle, les seigneurs les plus fortunés de France et de Navarre rétribuaient maigrement une poignée de musiciens médiocres (Samuel, Art. mus. contemp., 1962, p.629).− [mεgʀ
əmɑ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. − 1reattest. ca 1274 «de manière restreinte, insuffisante» (Adenet Le Roi, Berte, éd. A. Henry, 1935 Maigrement les salue); de maigre, suff. -ment2*. − Fréq. abs. littér.: 28. 2. Maigret, -ette, adj.,vx. Un peu maigre [Correspond à (supra) I A]. Synon. usuel maigrelet.Jonquille [une fauvette] était donc une fillette fort gentille, encore maigrette et mal emplumée (Sand, Hist. vie, t.1, 1855, p.17).Son œil tremblote, et sa jambe maigrette Bat la mesure avec précision (Monselet, Poés.,1880, p.58).P. ext., littér. Peu abondant, peu fourni. Cette noire maison de pierre sèche, près du petit jardin indigent, maigret (Michelet, Journal, 1844, p.567).− [mεgʀ
ε], fém. [-εt]. Att. ds Ac. 1694-1878. − 1reattest. ca 1223 «maigre, chétif» (Gautier de Coinci, Miracles, éd. F.Koenig, 2, Mir. 13, 668); de maigre1, suff. -et*. BBG. −Grundt (L.-O.). Ét. sur l'adj. invarié. Bergen-Oslo-Tromsø, 1972, p. 220. |