| MADONE, subst. fém. A. − 1. Représentation de la Vierge. Fabrice, ayant l'air de marcher au hasard, s'avança dans la nef droite de l'église jusqu'au lieu où ses cierges étaient allumés; ses yeux se fixèrent sur la madone de Cimabué (Stendhal, Chartreuse, 1839, p. 198). 1. ... dans un cadre vermoulu, il y avait un tableau (...). C'était une madone tenant dans ses bras l'enfant Jésus. L'auréole d'or entourait le chaste front de Marie; ses cheveux tombaient sur ses épaules, et une tunique bleue à longues manches laissait voir dans l'attitude une grâce naïve et le tendre maintien d'une jeune mère.
Toepffer, Nouv. genev., 1839, p. 188. − En partic. En Italie, statuette de la Vierge placée dans une niche sur les voies publiques. [J']enfilai un vicoletto tortueux qu'éclairait seulement une lampe allumée devant la niche d'une madone (A. France, Bonnard, 1881, p. 305). Rem. Madone s'emploie surtout pour désigner les peintures ou sculptures italiennes, plus particulièrement les vierges à l'enfant. 2. P. compar. Tes chastes yeux sont bons comme ceux des madones (Moréas, Syrtes, 1884, p. 39): 2. Une jeune femme d'une beauté de madone se laisse capter par mon objectif. Elle porte un bébé chamarré comme un nino d'église, perdu dans une longue robe blanche et une coiffe à guipures, les manches raides de broderies, autour du cou un chapelet à grains énormes dont la croix d'orfèvrerie lui pend jusqu'au bas du ventre.
T'Serstevens, Itinér. esp., 1963, p. 251. 3. P. anal. ou p. métaph. Si j'avais à donner mon avis sur la suppression des tambours et des clairons, je proposerais de les remplacer dans chaque régiment par une jolie fille (...). Nom d'un nom, comme ça donnerait du vif au troupier, d'avoir une madone comme ça, une madone vivante à côté du colonel (Maupass., Contes et nouv., t.2, Idées colonel, 1884, p.253).Qu'elle était loin (...) de la jeune femme au sourire de saint Jean, qu'il avait retrouvée un soir, peu après son mariage, pour la reperdre aussitôt! De la petite madone ombrienne avait fleuri une belle romaine (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p.1446). − Emploi adj. Ce n'était pas Lucia mais une grande fille un peu madone et très contente de se montrer en chemise de nuit (Giono, Bonh. fou, 1957, p.449). − Madone des sleepings. [P. allus. au titre d'un roman pop. de Maurice Dekobra] Femme fatale cosmopolite. J'avais décidé d'aller à Berlin vers la fin de février (...). Quand je m'installai dans le rapide de Berlin, il me sembla entrer dans la peau d'une grande voyageuse internationale, presque d'une madone des sleepings (Beauvoir, La Force de l'âge, Paris, Gallimard, 1960, p.186). B. − La Madone (ou, dans les prières ou invocations, sans déterm.). En Italie, ou en Corse, la Vierge Marie. Clélia tomba à genoux fondant en larmes, et pria la Madone avec ferveur (Stendhal, Chartreuse, 1839, p. 360).Ha! Ors' Anton'! Ha! Ors' Anton'! s'écriait le berger, sang de la Madone! etc. c'étaient des imprécations sans nombre et sans fin, dont la plupart ne pourraient se traduire (Mérimée, Colomba, 1840, p.128).L'image en papier de la Madone suspendue au mur à côté de son lit (Lamart., Confid., Graziella, 1849, p.273). REM. Madonnette, subst. fém.Petite madone. Giambellino et Vivarini, les peintres aimés de Beppa, avaient confié au sourire de leurs madonnettes la naïve jeunesse de leurs coeurs (Sand, Lettres voy., 1834, p.97). Prononc. et Orth.: [madɔn]. Att. ds Ac. dep. 1798. Étymol. et Hist. A. 1. 1648 beaux-arts Madonne «représentaion de la Vierge Marie» Hugo, Han d'Isl., p.86: ne te borne pas, de grâce, à prier pour nos péchés, comme la madone que les Italiens invoquent en assassinant. B. 1801 p. ext. «femme» (Crèvecoeur, Voyage, t.3, p.12: je m'associai avec un Irlandais accusé de quelques irrévérences devant une madone de village). Empr. à l'ital. madonna, attesté dep. le xies. comme désignation de la Vierge Marie (Formula di confessione umbra ds Batt.), terme de beaux-arts dep. ca 1547 (Varchi, ibid.), proprement appellatif de respect donné aux femmes, composé de m(i)a «ma» et donna (dame1*). Fréq. abs. littér.: 352. Fréq. rel. littér.: xixes.: a)727, b)476; xxes.: a)685, b)208. Bbg. Kohlm. 1901, p.49. |