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LINGE, subst. masc.
A. − Au sing. [Précédé de l'art. déf. ou partitif]
1. Pièce de tissu de lin; p. ext. tout ou partie des pièces de tissu employées aux usages domestiques.
Linge de cuisine. Tabliers et torchons utilisés dans une cuisine. Linge de lit. Draps, taies d'oreiller et de traversins. Linge de maison. Draps, nappes, serviettes, torchons. Linge de table. Nappes et serviettes. Pour que leurs filles deviennent de bonnes ménagères, il convient qu'elles ne sachent que faire la soupe et compter le linge de cuisine (Senancour, Obermann, t. 2, 1840, p. 55).Des rayons se succédaient pour chaque sorte de linge, le linge de maison, le linge de table (Zola, Bonh. dames,1883, p. 783).Mrs Southey donna à Harriet, si incompétente en choses du ménage, de très bons conseils sur la cuisine et le blanchissage. Même elle lui prêta du linge de lit et de table (Maurois, Ariel,1923, p. 104).
SYNT. Linge de batiste, de chanvre, de coton, de linon, de nylon, de soie; linge brodé, damassé; battre, blanchir, bouchonner, égoutter, empeser, envelopper, essanger, encrer, étendre, laver, marquer, mouiller, rincer, savonner, sécher, tremper, tordre le linge; ouvrer, plier, raccommoder, ranger, ravauder, repasser, repriser du linge; linge blanc, douteux, éblouissant, frais, humide, propre, sale; linge fin; gros linge; ballot, paquet, pile, tas de linge; armoire, coffre, corde, panier, pince, sac à linge.
Loc. verb. fig.
Porter, prendre comme un paquet de linge sale. Porter, prendre sans ménagement. Un mort à la tête ensanglantée, que quatre hommes portent par les bras et les jambes, comme un paquet de linge sale (Goncourt, Journal,1871, p. 808).
Laver* son linge sale en famille.
2. Linge de corps et p. ell. linge. Vêtements de dessous et certaines pièces accessoires de l'habillement. Porter du linge fin; avoir du linge sale. Il (...) avait changé de linge, et mis une cravate de satin noir combinée avec un col rond, de manière à encadrer agréablement sa blanche et rieuse figure (Balzac, E. Grandet,1834, p. 53).Lui, si soigneux jusque-là dans le choix de son vêtement, marqua d'étranges faiblesses. Il tolérait les plis, les taches, la poussière. Il abandonnait au hasard et son linge et ses cravates (Duhamel, Terre promise,1934, p. 104):
... j'ai vu (...) deux petits garçons (...). Tous deux étaient en loques, sans linge, sans chaussettes, le visage hâve et non lavé, souriant quand même. Gide, Journal,1914, p. 465.
Fam. [Souvent à propos d'une femme] Avoir du (beau) linge. Être élégamment vêtu. Ils ont du beau linge, de la fierté, ils ne saluent point (Michelet, Journal,1835, p. 199).
Arg. et pop. [Le plus souvent à propos de femmes] Du beau linge. Une société élégante. Les convives (...) du beau linge (...) nanas parfumées, sapées (A. Boudard, Le Corbillard de Jules, Paris, La Table ronde, 1979, p. 236).
Vx. Ouvrière en linge. Synon. lingère.Mademoiselle Pinson, ouvrière en linge, qui était leur voisine (Musset, Mimi Pinson,1845, p. 219).
Loc. verb. Travailler en linge. Faire des travaux de lingerie. Elle travaillait en linge, rue Montmartre, elle a fait des chemises à ton père (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 188).
B. − Au sing. et au plur. [Précédé de l'art. indéf. (ou parfois déf.)]
1. Vieilli, région. Pièce d'étoffe employée à divers usages. Synon. usuels torchon, serviette, chiffon.Astiquer, essuyer, frotter, laver, nettoyer, tamponner avec un linge. Il me faut (...) un grand linge pour ensevelir une pauvre fille qui se meurt (Janin, Âne mort,1829, p. 199).Il est professeur de langues orientales à l'institut. Il se lève à trois heures du matin, et, quand sa tête éclate sur des hiéroglyphes, la bonne a l'ordre de lui envelopper le front dans un linge imbibé d'eau fraîche (Renard, Journal,1892, p. 123).Dévorant à belles dents (...) les œufs durs, le jambon froid apportés de chez soi, le pain bis enveloppé d'un linge blanc (Pesquidoux, Chez nous,1923, p. 87).
En partic. Pièce d'étoffe blanche utilisée dans la liturgie eucharistique. Linges d'autel; linge sacré. Sur le lit, tel qu'un linge sacré, offert à l'adoration des croyants, elle avait étalé le corsage en ancien point d'Alençon (Zola, DrPascal,1893, p. 165).Ils baisent le sol; les petites filles soulèvent pieusement les linges de l'autel (Barrès, Greco,1911, p. 77).
2. Expressions
a) Blanc, pâle comme un linge; d'une blancheur, d'une pâleur de linge. Extrêmement pâle. Son pauvre visage maigri, d'une pâleur de linge, dans le ruissellement noir de ses cheveux, dont les boucles tombaient jusqu'aux épaules (Zola, Page amour,1878, p. 960).
b) ,,Il n'a pas plus de force qu'un linge mouillé; c'est un linge mouillé. Il est d'une faiblesse extrême de corps ou de caractère`` (Ac.).
Prononc. et Orth. : [lε ̃:ʒ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1erquart xiies. « toile de lin, morceau de toile » (1etrad. fr. du Lapidaire de Marbode ds P. Studer et J. Evans, Agn. Lapidaries, 418); 1570 spéc. « morceau de toile, serviette pour essuyer, frotter » (Ch. Estienne et J. Liébault, Maison rustique, p. 189 d'apr. FEW t. 5, p. 357 a; cf. éd. 1591, p. 121 vo); 2. ca 1225 désigne le linge de corps (Guillaume le Maréchal, 9112 ds T.-L.); 1remoitié xiiies. « chemise » (Enfances Guillaume, éd. P. Henry, 2455); 1798 linge de corps (Ac.); 3. 1549 désigne le linge de table (Arch. nat. KK 286, fol. 130 vods Gay); 1688 linge de table (Arch. nat. KK 1004, no5, ibid.). Substantivation de l'adj. a. fr. linge « de lin, de toile » (1erquart xiies. linge drap, 1retrad. fr. du Lapidaire de Marbode, éd. citée, 407 - encore au xvies., Hug.), du lat. lineus « de lin, de toile »; cf. lange* adj. puis subst. en a. français. Fréq. abs. littér. : 2 489. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 749, b) 4 850; xxes. : a) 5 138, b) 3 403.
DÉR.
Lingé, -ée, adj.,fam. Habillé avec élégance. Le monsieur de toutes les fêtes et de toutes les villégiatures, (...) parfumé, lingé comme un dandy de Londres (Lorrain, Sens. et souv.,1895, p. 305).En entrant, j'aperçois un beau jeune garçon frisé, lingé, pommadé, peint et poudré. C'est Lucien Daudet (Renard, Journal,1910, p. 266).[lε ̃ ʒe]. 1resattest. a) 2emoitié xives. « de lin, de toile » cote ... lingee (Liv. du chev. de La Tour, C. CXXII, Bibl. Elzev. ds Gdf.), ex. isolé, b) 1850 arg. « bien vêtu » (d'apr. Esn.), 1878 id. être lingé « porter du linge blanc » (Rigaud, Dict. jargon paris., p. 203); de linge, suff. * (cf. aussi le m. fr. linger « de lin » 1408 ds Gdf.).
BBG. Sain. Arg. 1972 [1907], p. 250.