| LINCEUL, subst. masc. A. − Vx et région. Pièce de toile, en particulier drap de lit : J'ai vu, petit garçon, des toiles de Jouy (...) remplacer la nappe à un repas de métayers, et d'autres, l'été, couvrir les bœufs contre les mouches, en guise de draps, de « linceuls » de lin.
Pesquidoux, Livre raison,1925, p. 101. B. − Pièce de toile servant à ensevelir un mort. Synon. suaire (littér.).« Donnez-moi, dit-il à sa suite, donnez-moi mon couteau d'or fin, que je découse ce drap de lin! » Aussitôt délivrée de son linceul, la belle revient à la vie (Nerval, Filles feu, Chansons et légendes du Valois, 1854, p. 631).Un croquemort (...) écarta un peu le linceul, à la place de la tête (Léautaud, In memor.,1905, p. 217). − P. métaph. Je me coucherai, moi probe, dans un linceul d'infamie (Balzac, E. Grandet,1834, p. 63).Le linceul de la terre est partout étendu; Les vents roulent sur nous des collines de neige (Lamart., Jocelyn,1836, p. 650). REM. Linceulé, -ée, adj.,hapax. Recouvert comme d'un linceul. Fenêtres blanchement linceulées de rideaux mornes. Un lit d'acajou linceulé de cretonne bleue (P. Adam, Le Thé chez Miranda ds Plowert1968). Prononc. et Orth. : [lε
̃sœl]. Att. ds Ac. dep. 1694. ,,[Ce] mot a gardé dans l'écriture la forme primitive linceul, mais sa prononciation actuelle se ressent encore de l'ancienne hésitation`` (Buben 1935, § 202). Cf. les prononc. [-œ
λ] (ds Littré), [-œj] (ds DG, Passy 1914, Barbeau-Rodhe 1930, toujours à titre de var.). Plur. linceux ds Huysmans, Là-bas, t. 1, 1891, p. 184 et Pourrat, Gaspard, 1925, p. 241. Étymol. et Hist. 1. 1erquart xiies. [ms.] linçol « drap » (St Alexis, éd. Chr. Storey, 267, leçon du ms. L, corrigée en liçon « petit lit » par l'éditeur); ca 1140 linçoel (Pèlerinage de Charlemagne, 426 ds T.-L.); Trév. 1771 note ,,On le disoit autrefois de toutes sortes de tissus de toile. On le dit encore dans quelques provinces des pièces de toile qu'on met dans le lit`` [cf. FEW t. 5, p. 366 b]; 2. 2emoitié xiiies. [ms. xives.] « drap servant à envelopper un cadavre pour l'ensevelir » (Évangile de Nicodème, éd. G. Paris et A. Bos, trad. anonyme, C 767, p. 165). Du lat. līnteolum « petite pièce de toile de lin », dimin. de linteum « étoffe de lin », lui-même dér. de līnum « lin »; au Moy. Âge « linceul » (ca 876) et « drap de lit » (1096 ds Nierm.). Fréq. abs. littér. : 650. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 161, b) 1 516; xxes. : a) 904, b) 416. Bbg. Darm. Vie 1932, p. 159. - Delb. Matér. 1880, p. 190. |