| LIMER, verbe trans. A. − Polir, entamer avec une lime. Limer (les dents d') une scie pour l'affuter. Limer un canon de fusil, un ressort de pendule, une grille de fer (Ac.). Cisaillez les bords [de coquillages] très doucement pour qu'ils ne se brisent pas, puis vous limez avec une lime à ongles pour adoucir les angles (Rousset, Trav. pts matér.,1928, p. 172): 1. ... elle fit passer une lime. Un des barreaux de fer de la petite fenêtre de la prison fut silencieusement limé et remis à sa place.
Lamart., Confid.,1849, p. 41. − Emploi pronom. réfl. indir. Elle se limait les ongles avec un soin de ciseleur (Flaub., MmeBovary, t. 2, 1857, p. 26). − Emploi abs. Il se mit en apprentissage chez un constructeur de machines, et là, pendant près de dix ans, il lima et forgea de toute la force de ses mains rudes (Zola, M. Férat,1868, p. 25).Un apprenti doit apprendre à limer comme un ajusteur (Fillon, Serrurier,1942, p. 42). B. − P. ext., littér. User par frottement. Une marche au rebord limé, mangé par plusieurs générations de locataires (Duhamel, Confess. min.,1920, p. 125).Tous les torrents galopaient à gros bouillons terreux et enlevaient leurs graviers, limaient leurs fonds et leurs berges (Arnoux, Rhône,1944, p. 275): 2. ... ces rudes pierres (...) que les avalanches ont roulées dans le torrent, que le torrent a limées et polies pendant des siècles, qui sont devenues luisantes et douces au toucher...
Lamart., Confid.,1849, p. 330. − En partic. [Le plus souvent au part. passé; le compl. d'obj. désigne une étoffe, un vêtement] Synon. élimer.Vêtement limé jusqu'à la corde/limé par le temps, par l'usage; robe limée aux plis. Rideaux de soie (...) limés sur les plis par un long usage (Balzac, Cous. Bette,1846, p. 4).Je pouvais pas aller relancer les patrons en costard limé, rapiécé, frangé, les manches raccourcies à mi-bras (Céline, Mort à crédit,1936, p. 340). C. − Au fig. 1. Vx. Parfaire. Limer une épigramme, un bon mot, des vers. Je lime toujours mon Xénophon, qui est à peu près en état de paraître (Courier, Lettres Fr. et Ital.,1808, p. 764).Il [Collé] mit des années à faire cette comédie [Dupuis et Desronais], à la limer et relimer, à écouter et à peser les conseils (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 7, 1864, p. 366).V. affaiblir ex. 10. 2. Littér. User, affaiblir. Tu limes tes jours à des passe-temps vains (Amiel, Journal,1866, p. 457): 3. ... le converti neuf empêche les vieux illuminés de s'endormir dans leur ronron, les révèle à eux-mêmes à tout moment par sa gaucherie indiscrète, son zèle que l'accoutumance n'a pas limé.
Arnoux, Rhône,1944, p. 419. REM. Limailler, verbe trans.User sans cesse. [Ils étaient] syphilitiques sans doute (...). Le tréponème à l'heure qu'il était leur limaillait déjà les artères (Céline, Voyage,1932, p. 145). Prononc. et Orth. : [lime], (il) lime [lim]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Fin xiies. « user, égaliser avec la lime » (Vie St Edmond, 3140 ds T.-L.); b) 1833 « user comme avec une lime» (Gautier, Jeunes-Fr., p. 55); 2. 1532 « corriger avec soin, polir, perfectionner » (Marot, Préface des poésies de Villon, ds Œuvres, éd. A. Grenier, t. 2, p. 421). Du lat. limare « limer, frotter, polir, perfectionner », dér. de lima (lime1*). Fréq. abs. littér. : 90. DÉR. 1. Limage, Subst. masc.Action de limer. Le limage tend à se limiter à la finition et à la retouche de certaines surfaces (Boissier1975).En partic. Action de limer les pièces constituant un couteau. (Dict. xixeet xxes.). − [lima:ʒ]. Att. ds Ac. 1935. − 1resattest. a) α) 1467 « ouvrage d'un artisan » (J. Molinet, Faictz et Dictz, éd. N. Dupire, p. 58, 41),
β) mil. du xvies. lymaige « action de limer » (Théâtre mystique de P. du Val et des libertins spirituels, éd. E. Picot, p. 202), attest. isolée, de nouv. 1867 (Littré), b) av. 1525 « malice » (Cretin,
Œuvres poétiques, éd. Kathleen Chesnay, 164, 688); de limer, suff. -age*. 2. Limure, subst. fém.a) Vx. Action de limer. La limure de cette grille sera longue (Littré).b) État de ce qui est limé. La limure de ces pistolets est très fine (Ac.).c) Synon. rare de limaille. (Dict. xixeet xxes.).− [limy:ʀ]. Att. ds Ac. 1740-1878. − 1resattest. a) 2emoitié du xiiies. limëure « limaille » (Le Dit des Boulangiers ds Jongleurs et Trouvères, éd. A. Jubinal, p. 139), b) α) 1596 « action de limer » (Hulsius),
β) 1718 « état d'une chose limée » (Ac., Additions et corrections); de limer, suff. -ure*. BBG. − Lewicka (H.). Dat. de mots. Kwart. neofilol. 1954, t. 1, pp. 76-77. |