| LILLIPUTIEN, -IENNE, adj. et subst. I. − Adj. [P. allus. au pays imaginaire de Lilliput, peuplé de très petits hommes dans les Voyages de Gulliver de J. Swift] Relatif à Lilliput, de Lilliput. Le royaume lilliputien. ♦ MÉD. Hallucinations lilliputiennes. ,,Hallucinations de petits personnages colorés, observées dans les lésions nerveuses (pédonculaires), au moment de l'endormissement' (Pel. Psych. 1976). Il se répétait machinalement qu'il avait des hallucinations lilliputiennes (Nizan, Conspir., 1938, p. 247). Vos hallucinations lilliputiennes sont caractéristiques de l'alcoolisme (Bachelard, Poét. espace, 1957, p. 151). − P. ext. Très petit, minuscule. Taille lilliputienne. Ces objets sont une petite table, grande comme une boîte d'allumettes, un écran, une boîte à gants, un séchoir à serviettes, le mobilier d'une poupée lilliputienne (Goncourt, Journal,1874, p. 1004).Le pigeon voyageur à qui Dagron confiait pendant le siège de 1870 un petit rouleau de photographies lilliputiennes reproduisant 50 000 dépêches (Prinet, Phot.,1945, p. 89).Pour construire ces édifices lilliputiens que sont les maquettes (Prinet, Phot.,1945p. 102): 1. La sonnerie du téléphone retentit; c'est la petite couturière qui appelle. Le comte lui prodigue les plus tendres paroles, il l'appelle mon tout-petit rat, mon tout-petit lapin... En voilà assez avec cette ménagerie lilliputienne, dit la comtesse, furieuse.
G. Marcel, Heure théâtr.,1959, p. 121. − Au fig. Étriqué, médiocre. Esprit lilliputien. Une dame, de celles faites pour admirer les petits mots lilliputiens à la Ségur (Stendhal, Souv. égotisme,1832, p. 44). II. − Subst. Habitant de Lilliput. En Russie, on a fait un film : le nouveau Gulliver avec des poupées admirablement articulées qui jouent les rôles de Lilliputiens (Arts et litt.,1936, p. 34-7).Pour paralyser l'adversaire par mille liens de dissuasion, comme les Lilliputiens avaient su enchaîner Gulliver (Beaufre, Dissuasion et strat.,1964, p. 60). − P. ext. Être de très petite taille. Synon. nain.C'est un vrai lilliputien. Piano à la taille de nos salons de Lilliputiens, renfermant cependant un orchestre dans son étroite et sonore cavité (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 565): 2. Que ne songe-t-on alors, quand on change toute sa vie parce qu'on ne sait pas si une femme est passée rue de Berri ou rue Washington, que ne songe-t-on que ces quelques mètres de différence, et la femme elle-même, seront réduits au cent millionième (c'est-à-dire à une grandeur que nous ne pouvons percevoir) si seulement nous avons la sagesse de rester quelques années sans voir cette femme, et que ce qui était Gulliver en bien plus grand deviendra une lilliputienne qu'aucun microscope − au moins du cœur, car celui de la mémoire indifférente est plus puissant et moins fragile − ne pourra plus percevoir!
Proust, Prisonn.,1922, p. 179. Prononc. et Orth. : [lilipysjε
̃], fém. [-jεn]. Att. ds Ac. dep. 1878. Étymol. et Hist. A. 1. 1727 subst. « habitant, de dimensions très petites, du pays imaginaire de Lilliput » (Trad. Swift, Gulliver, p. 79 ds Bonn., p. 85); 2. 1765 « celui qui est minuscule, insignifiant » (Diderot, Essais sur la peinture, 46 ds Quem. DDL t. 12). B. 1779 emploi adj. « de très petite taille » amant Liliputien (Rutlidge ds Le Babillard, 20 janv. 1779, t. 4, p. 50 d'apr. Proschwitz ds St. neophilol. t. 36, p. 324). Empr. à l'angl.Lilliputian dér. de Lilliput, nom d'un pays imaginaire du roman de J. Swift, Travels into several remote nations of the world... by Lemuel Gulliver, 1726. Sur les hyp. concernant la formation du mot par J. Swift, v. J. Söderling ds St. neophilol. 1968, t. 40, no1, pp. 75-79. Fréq. abs. littér. : 36. Bbg. Bonn. 1920, p. 85. - Gohin 1903, p. 276. |