| LEÇON, subst. fém. A. − Vx. Action de lire, de réciter. (Ds Littré, DG, Lar. 19e-Lar. Lang. fr. et Rob.). 1. LITURG. Passage de l'Écriture ou des Pères que l'on chante ou récite à l'office des Matines. Les offices appelés grandes heures sont ainsi composés : (...) offices de la nuit. Les Matines qui comportent soit un, soit trois nocturnes ainsi composées : Invitatoire Hymne premier Nocturne : (...) Leçon Repons (M. Dupré, Manuel accompag. plain-chant grégor., s. d., p. 30).Dans la liturgie catholique [la leçon désigne la] péricope de la Bible ou d'un livre ecclésiastique, prescrite dans les divers offices. Les L[eçons] brèves sont celles des petites heures; les grandes sont celles des matines; elles sont chantées, les unes et les autres, sur des récitatifs spéciaux (Brenet, Dict. prat. et hist. mus.,1926, p. 221). ♦ Leçon des Ténèbres. ,,Office de matines des jeudi, vendredi et samedi saints`` (Mus. 1976). Voyez aussi (...) Leçon III du Jeudi Saint (D'Indy, Compos. mus., t. 1, 1897-1900, p. 66). 2. Manière de lire, d'interpréter un texte. L'université d'Oxford fit imprimer à ses frais et distribuer gratis aux curés un nouveau-testament, selon la leçon romaine (Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 525). − PHILOL. Texte ou fragment de texte tel qu'il a été lu par le copiste ou l'éditeur. Synon. variante.Voici la bonne leçon (Ac.). Ils soutiennent la première leçon; je défends la seconde, sans me fâcher néanmoins, car mon opinion est probable (Courier, Pamphlets pol., Au réd. « Censeur » 1819-20, p. 23). ♦ Littér. Manière de raconter un fait. Vous racontez ainsi l'aventure; mais il y a une autre leçon, une leçon différente (Ac.1935). B. − ENSEIGNEMENT 1. [Du point de vue de l'enseignant] Séance d'enseignement donnée par un maître, un professeur à une classe, à un auditoire. Synon. mod. conférence, cours.Rien qui sente la leçon, la conférence, le pédantisme (Pailleron, Monde où l'on s'ennuie,1869, II, 1, p. 92).Les leçons n'occuperont que la moitié du temps; le reste étant réservé à des analyses ou à des discussions individuelles ou collectives (Le Figaro,19-20 janv. 1962, p. 9, col. 6). ♦ Faire la leçon. Faire la classe : 1. ... il était entouré des enfants de l'école, à qui son oncle faisait la leçon. Je l'abordai au milieu de sa harangue, et le priai de me dire deux mots.
Musset, Confess. enf. s.,1836, p. 201. ♦ Leçon inaugurale*. ♦ P. méton. Rédaction, partie d'un ouvrage didactique correspondant à cette séance. Quoique je critique ce livre, la leçon de Villemain et le cours de La Harpe, on aurait tort de croire qu'il entre dans ma pensée qu'on dût fermer ces écoles et imposer silence aux professeurs (Delécluze, Journal,1827, p. 399).Savoir si je retirerai de la cinquième leçon, dans le volume, ce qui a trait à l'opuscule ou si au contraire je l'y laisserai (Du Bos, Journal,1927, p. 248). − En partic. ♦ Enseignement pratique et théorique d'une matière. Leçon de cuisine, de danse, de dessin. J'appuie ces impressions rapides sur une étude très longue en compagnie d'Isabelle qui prend depuis longtemps des leçons d'aquarelle (Alain-Fournier, Corresp. [avec Rivière], 1907, p. 105).Myriam sculptait, la fille prenait des leçons de danse, le fils écrivait des poèmes hermétiques (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 307). ♦ Leçon de choses*. ♦ Leçon particulière, absol. leçon. Enseignement donné en particulier à un élève ou à un groupe restreint pour compléter des connaissances ou apprendre une matière, un art ne faisant pas l'objet d'un cours normal. Faire des leçons (vx). Samson, le père de la géographie, allait, à soixante-dix ans, faire des leçons à pied pour vivre (Chamfort, Max. et pens.,1794, p. 74).Donner, prendre, suivre des leçons (particulières) : 2. Non seulement elle a reçu au lycée Fénélon l'enseignement secondaire complet des jeunes filles, mais des leçons particulières lui ont permis de passer les deux parties du baccalauréat classique, lettres et philosophie.
Romains, Hommes bonne vol.,1932, p. 125. − Au fig. Donner des leçons à. Montrer sa supériorité. Synon. fam. en remontrer.On prétend qu'ils [les Anciens] ont voulu donner des leçons à la Nature en créant avec des formes simplifiées une Beauté abstraite qui ne s'adresse qu'à l'esprit (Rodin, Art,1911, p. 61).Ce fut un agent d'une trentaine d'années qui donna une leçon à Maigret en prononçant tranquillement : − C'est les maîtresses d'école qu'il faudrait questionner (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 83). 2. [Du point de vue de l'élève] Ce que l'élève doit apprendre (généralement par cœur). Apprendre, étudier, réciter, revoir sa/ses leçon(s); ne pas savoir sa leçon. Le carnet contient les notes obtenues en leçons et en devoirs, souvent aussi les notes et rangs de composition (Encyclop. éduc.,1960, p. 134): 3. Sans leçons à étudier, sans devoirs à faire, sans punitions à craindre, voici les dernières journées de l'année scolaire. Elles sont si belles qu'on se souvient plus de ce qu'on en a fait.
Larbaud, F. Marquez,1911, p. 207. − P. anal. Il soupira, et, sans quitter ce ton de leçon apprise, qui agaçait tant Antoine, il se lança dans un brillant compte rendu des diverses phases de la guerre depuis l'invasion de la Belgique (Martin du G., Thib., Épil., 1940, p. 808).Après tout, ce n'est qu'une phrase tellement obscure, l'imagination d'un ivrogne agonisant, une leçon répétée peut-être? (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1382). C. − Au fig. 1. Règles de conduite données par une personne à une autre. Mule du pape! Allez-vous me donner des leçons de convenance?... Mêlez-vous de vos affaires et retournez à la maison (Theuriet, Mariage Gérard,1875, p. 208): 4. Il est même inconcevable, quand on veut donner des leçons de morale aux autres et qu'on exige la continence de ses domestiques, qu'on ne dissimule pas mieux les traces de ses manies amoureuses...
Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 110. − En partic. Correction par des paroles ou des coups. Donner, recevoir une bonne leçon. Il se forma un complot, une cabale à mon insu; il fut question de me donner une leçon éclatante. L'explosion devait avoir lieu en public, devant le juge-commissaire (Reybaud, J. Paturot,1842, p. 447). − Locutions ♦ Faire la leçon à qqn Dicter sa conduite à quelqu'un. Madame Beauvisage eut la certitude de n'être pas écoutée, elle jugea nécessaire de faire une petite leçon à Cécile (Balzac, Député d'Arcis,1847, p. 349).Réprimander. Tu me fais un peu mal à la tête, Ô jalouse, ainsi que le soupçon Je ne suis pas toujours à la fête, Quand tu me fais jalouse, la leçon (Verlaine,
Œuvres posth., t. 1, Varia, 1896, p. 104). ♦ N'avoir de leçons à recevoir de personne. Quant aux vains scrupules dont vous me signalez le danger, je crois que, sous ce rapport, je n'ai de leçons à recevoir de personne (Curel, Nouv. idole,1899, II, 5, p. 216). 2. Enseignement profitable que quelqu'un tire ou reçoit de quelque chose. Une grande leçon. Ainsi la notion préalable de l'effort est comme le cadre préparé pour recevoir toutes les leçons précises de l'expérience effective (Blondel, Action,1893, p. 156).La mort de mon père était une leçon (Renard, Journal,1900, p. 568): 5. Demandez à l'historien pourquoi il se consume à découvrir les traces du passé, et dans le naufrage des nations les débris de leur existence : il vous dira que ce sont des exemples, des leçons, des avis salutaires...
Marmontel, Essais sur rom.,1799, p. 287. − Locutions ♦ Servir de leçon. Je m'étends un peu sur l'histoire de ce livre, parce qu'elle peut servir de leçon aux jeunes gens qui ont l'intention de parcourir la carrière des lettres (Delécluze, Journal,1827, p. 371). ♦ Ça lui servira de leçon. Synon. fam. ça lui fera les pieds (Rey-Chantr. Expr. 1979). Prononc. et Orth. : [ləsɔ
̃], fam. [lsɔ
̃]. Comparez : As-tu appris ta leçon [lsɔ
̃] avec : c'est la leçon que nous a laissée Gandhi [ləsɔ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1135 « texte de liturgie lu ou chanté » (Couronnement Louis, 1665 ds T.-L.); 2. ca 1140 « lecture d'un texte » (Geoffroi Gaimar, Hist. des Anglais, éd. A. Bell, 2924); 3. fin xiie« ce qu'un élève doit apprendre, réciter » (Flore et Blancheflor, éd. M. Pelan, 208); 4. 1680 « interprétation d'un texte, offerte par différentes copies ou différents éditeurs » (Rich.). B. 1. Ca 1160 fig. « enseignement donné par un maître » (Enéas, éd. J.-J. Salverda de Grave, II, 8431); 1845 leçon particulière (Flaub., 1reÉduc. sent., 1845, p. 200); 2. 1736 donner des leçons (à qqn) « montrer sa supériorité » (Voltaire, Utile Exam. des 3 dern. ép. du Sieur Rousseau ds
Œuvres, éd. L. Moland, t. 22, p. 240); 3. a) fin xiiefig. (Raoul de Cambrai, éd. P. Meyer et E. Longnon, 3984 : T'aprenderoie ici pesme leçon « je t'apprendrai ici-même une mauvaise leçon » c'est-à-dire « je t'infligerai une sévère punition »); b) ca 1225 « instructions, règles de conduite » (Reclus de Molliens, Charité, 136, 3 ds T.-L.); c) 1588 faire leçon (à qqn) « dicter la conduite » (Montaigne, Essais, éd. A. Thibaudet, III, V, p. 939); 1690 faire sa leçon (à qqn) « réprimander » (Fur.); 1754 faire la leçon (à qqn) « id. » (Poetevin, Dict. Suisse, Français, Allemand); d) 1823 donner une leçon « châtier, corriger » (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, p. 384); 4) 1668 « enseignement qu'on tire d'un événement » (Molière, Georges Dandin, I, 1). Empr. au lat.lectionem, acc. de lectio « cueillette; lecture, texte; choix ». Fréq. abs. littér. : 4 797. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 7 096, b) 6 914; xxes. : a) 6 403, b) 6 789. |