| LANGE, subst. masc. A. − Pièce de tissu qui enveloppe le corps d'un nourrisson de la taille aux pieds. 1. [Sert de vêtement de dessus] a) Pièce de tissu épais en laine, en coton, en molleton servant à tenir l'enfant au chaud. Elle allaita elle-même son enfant, lui fit des langes avec sa couverture, la seule qu'elle eût sur son lit (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 249): 1. Je suis la fille d'une femme qui, vingt fois désespérée de manquer d'argent pour autrui, courut sous la neige fouettée de vent crier de porte en porte, chez des riches, qu'un enfant, près d'un âtre indigent, venait de naître sans langes, nu sur de défaillantes mains nues...
Colette, Naiss. jour,1928, p. 6. b) Pièce de soie, de satin, souvent richement brodée, servant de parure. Le Pape envoyoit des langes bénis au Roi, à la naissance du Dauphin (Ac.1798).Dans un lange de fine batiste était enveloppé un enfant qui venait de naître (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 641). 2. [Sert de vêtement de dessous] Couche, linge appliqué sur le corps d'un enfant. Le bruit de ferraille qu'on faisait à passer réveillait la marmaille sans langes derrière les palissades de fortune (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 73): 2. Dans l'ombre, le garçon, sournois, barbote à deux mains dans le seau où trempent les langes sales. Et, au fond du berceau, pour rappeler l'attention sur lui, le bébé fait une colère, en frappant l'air de ses petits poings.
Martin du G., Vieille Fr.,1933, p. 1101. ♦ (Être) dans les langes. (Être) en bas âge. Elle eut, de son mariage, deux filles et deux garçons qui moururent tous quatre, dans les langes, d'un épanchement au cerveau (France, Génie lat.,1909, p. 265). 3. P. anal. a) Molleton d'une table à repasser. Le linge empesé se repasse toujours sur le lange de laine, de même que les broderies et dentelles (Lar. mén.1926, p. 1046). b) GRAV. [Dans la taille douce] Drap de laine ou de flanelle que l'on met sur la planche à graver recouverte du papier à imprimer pour assouplir et uniformiser l'action de la presse (d'apr. Bég. Estampe 1977). Lorsqu'on passera cette planche, couverte de son papier humide, sous une presse, celle-ci transmettra sa pression par l'intermédiaire de langes de laine (Arts et litt.,1935, p. 2813).Le graveur (...) la recouvre [la plaque gravée] d'une feuille de papier humide, d'un lange de laine ou de feutre destiné à égaliser le foulage, et la fait passer entre deux cylindres, comme dans un laminoir (Dacier1944, p. 6). B. − Au plur. et au fig. 1. Commencements, débuts. Je suis un parvenu, mon cher, je le sais. Je ne veux pas laisser voir mes langes! (Balzac, Rabouill.,1842, p. 569). ♦ (Être) dans les/ses langes. (Être) à ses débuts, dans ses balbutiements. Tant que la physique est restée dans les langes, et que nous n'avions aucun moyen de constater qu'il ne se fait (...) aucune déperdition réelle de substance (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 211).Voici la terre à fin d'usage, l'heure nouvelle dans ses langes, et mon cœur visité d'une étrange voyelle (Saint-John Perse, Exil,1942, p. 236). ♦ Sortir des langes. Sortir de l'enfance. On a pu remarquer avec quelle difficulté (...) elle [la musique] est sortie des langes de la diaphonie (Coussemaker, Hist. harm. Moy.-Âge,1852, p. 40). 2. Obstacles, liens qui entravent et contraignent. Nous déchirerons, s'il se peut, ces langes de police dont il est honteux que le théâtre soit encore emmaillotté au dix-neuvième siècle (Hugo, Hernani,1830, p. v).Il faut y sentir l'effort de la tendre doctrine chrétienne pour faire éclater les étroits langes du sémitisme qui l'enserrent (Gide, Journal,1916, p. 589). Prononc. et Orth. : [lɑ
̃:ʒ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1170 « vêtement de laine » (Béroul, Tristan, éd. E. Muret, 3568); 2. 1538 « morceau d'étoffe de laine dont on enveloppe les enfants au maillot » (Est., s.v. incunabula). Substantivation de l'anc. adj. lange « de laine » (xiiies. ds Gdf. et T.-L.), du lat. laneus, de même sens. Fréq. abs. littér. : 214. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 348, b) 325; xxes. : a) 325, b) 242. |