| LANCE 1, subst. fém. A. − Arme composée d'un long manche terminé par une pointe de fer surtout utilisée par les cavaliers, et que, dans l'Antiquité, on tenait à la main ou jetait devant soi, puis qui était soutenue à hauteur de poitrine par un arrêt ou un crochet de fer (cf. dard1A 1 a). Lance en bronze; la pointe de la lance; lever, manier la lance, tenir la lance en arrêt; à coups de lance. Le futur chevalier, une fois ses études faites, a appris ce qui est proprement de sa profession : monter à cheval, manier la lance et l'épée (Faral, Vie temps st Louis,1942, p. 31): 1. Chaque fois que Joseph montait dans sa voiture et saisissait le volant entre ses mains gantées, il éprouvait un sentiment comparable à celui du chevalier, qui, tout roide en son armure, (...) la lance en arrêt, part pour la conquête du monde...
Duhamel, Passion J. Pasquier,1945, p. 29. 1. Spécialement a) Lance courtoise, lance mousse (Ac. 1798-1878). Lance gracieuse (Littré). Lance dont le fer n'était pas pointu, utilisée dans les joutes. b) MYTH. GR. Lance d'Achille. Lance avec laquelle Achille infligea une blessure qui ne put être guérie qu'avec de la rouille prélevée de cette lance (d'apr. Cass.-Moir. 1979). ♦ P. métaph. Les Français pourront être arrêtés, repoussés, mais jamais humiliés, ni forcés à rien. Les choses changeront, mais le changement s'opérera par eux. C'est la lance d'Achille, elle seule peut guérir les plaies qu'elle a faites (J. de Maistre, Corresp., t. 10, 1807, p. 370). c) RELIG. Sainte lance. ,,Lance dont une tradition légendaire disait qu'elle avait servi au soldat pour percer le côté de Jésus crucifié. Elle était vénérée à Jérusalem aux vieet viiesiècles; elle le fut ensuite à Constantinople`` (Vogüé-Neufville 1971). Le miracle se produisit. Ce fut la découverte de la sainte lance. À la suite d'une vision, un pèlerin provençal, Pierre Barthélemy, l'exhuma le 14 juin sous les dalles d'une des églises d'Antioche (Grousset, Croisades,1939, p. 38). 2. Locutions a) Vieilli. Baisser la lance. S'avouer vaincu. ♦ Au fig., vx. Baisser la lance (Ac. 1798-1935). Céder, s'incliner. b) Briser des lances; rompre une, des lance(s).
α) Se battre. Les champions brisèrent leurs lances (Ac.1798-1935).Il rompit trois lances pour les dames (Ac.1835-1935).
β) Au fig. ♦ Rompre une, des, la lance(s) avec, contre qqn. Soutenir une discussion, une controverse contre quelqu'un. Je ne romprai pas de lances avec les économistes qui veulent à tout prix raisonner sur un univers exempt de toute organisation et de toute prévision (Perroux, Écon. xxes., 1964, p. 501). ♦ Rompre une, des lance(s) pour qqn (Ac. 1798-1935). Défendre quelqu'un contre ceux qui l'attaquent. ♦ Briser des lances (rare). Sa modération lui manqua subitement; il se mit en avant tout entier, il brisa des lances envers et contre tous (...) pour la musique italienne (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 4, 1851, p. 537). c) Loc., vx. (Être venu) à beau pied sans lance (ds Ac. 1798). (Être venu) à pied. 3. Au fig. Ce qui blesse, qui fait mal comme une arme pointue. Le visage piqué par les mille lances de l'inquiétude, fiévreux (Balzac, Lettres Étr., t. 2, 1843, p. 171).Chaque corps que je croiserai, combien médiocre auprès du sien, me donnera le coup de lance d'amour (Montherl., Songe,1922, p. 205).La lance de la solitude vous atteint où que vous soyez (Giono, Poids du ciel,1938, p. 160). B. − [P. anal. de forme] Objet de forme allongée et pointue. 1. Ornement en fer dont on garnit le haut des barreaux d'une grille. Fer* de lance. De chaque côté de la grille, s'étend un saut de loup dont la double crête est garnie des lances et des dards les plus menaçants, de véritables hérissons en fer (Balzac, Paysans,1844-50, p. 6).La jeune fille le vit un moment ainsi de profil, au-dessus des houx, derrière les lances de fer de la clôture (France, Jocaste,1879, p. 9).Il me conduisait depuis la grille aux lances dorées jusqu'à l'escalier monumental (Alain, Propos,1908, p. 42). 2. AGRON. ,,Branche droite; tige effilée garnie de branches`` (Plais. 1969). À gauche, comme un nid de serpents, une maisonnette envahie par les ronces, les jets, les lances, les mille tiges, les épaisses ramures tourmentées comme des ceps (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 105). 3. Instrument, outil présentant une forme allongée et terminé en pointe. On tire la fusée en mettant le feu à sa mèche à l'aide d'une lance à feu fixée à une longue baguette (Chalon, Explosifs mod.,1911, p. 398). − Lance à eau, d'arrosage, d'incendie et, p. ell., lance. Ajutage métallique adapté à l'extrémité d'un tuyau d'arrosage ou de pompe, et qui sert à diriger le jet d'eau. Le pompier d'extrême-droite laissa tomber sa lance, demeura un instant suspendu à l'échelle par un pied, tomba dans le feu (Malraux, Espoir,1937, p. 768): 2. J'ai vu Pierre il y a quinze jours. En arrivant chez lui, je l'ai aperçu dans son jardin petit mais voisin, très voisin, d'arbres gigantesques (pour Paris); il arrosait un gazon à la lance avec bonheur, en redingote.
Valéry, Corresp., [avec Gide], 1903, p. 398. − PÊCHE. Tige longue et pointue, démontable, qui termine la canne à pêche. V. darder I A 1 a ex. Voy. La Pérouse, t. 3, 1797, p. 236. − GÉNIE CIVIL. Tuyau métallique permettant d'injecter de l'air comprimé ou de l'eau à la base d'un pieu pour en faciliter l'enfoncement. Le fluide brûlant [jet de vapeur d'abattage] est amené par des lances creuses (...) assemblées en tridents (Haton de La Goupillière, Exploitation mines,1905, p. 458).Le mélange peut être transporté sec dans l'appareil et humidifié à la sortie de la lance (Béton1976). Prononc. et Orth. : [lɑ
̃:s]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 « arme d'hast » (Roland, éd. J. Bédier, 541); 1367 fer de lance (Prost, Inventaires, t. 1, no646); 2. 1288 [ms.] p. méton. « guerrier armé de la lance » (Roman de Thèbes, ms. B.N. fr. 375, 7024 ds L. Constans, La légende d'Œdipe [...], p. 166); 3. p. anal. de forme 1676 « spatule pour travailler le stuc » (Félibien); 1867 lance à incendie (L. Simonin, La vie souterraine, Paris, Hachette, p. 165). Du lat. lancea « lance, pique ». Fréq. abs. littér. : 1 011. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 893, b) 1 325; xxes. : a) 1 293, b) 1 199. Bbg. Chautard Vie étrange Arg. 1931, p. 223. - Quem. DDL t. 9. - Sain. Arg. 1972 [1907], p. 49, 53, 136. |