| INTERCEPTER, verbe trans. A. − Enlever, dérober au passage ce qui est destiné à quelqu'un d'autre. Intercepter une lettre, un paquet. Les Bleus vont intercepter le courrier (Balzac, Chouans,1829, p. 48).L'une des jeunes filles lui avait envoyé une pièce de vers, que le principal intercepta (Arland, Ordre,1929, p. 77). − Prendre connaissance de ce qui est adressé à quelqu'un d'autre. Nous avions intercepté dans la journée deux radios allemands (Joffre, Mém., t. 1, 1931, p. 319).Elle dut comprendre, intercepter un regard de mon père (Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 45). B. − P. ext. 1. Interrompre la progression de quelqu'un ou de quelque chose. a) Qqn intercepte qqn/qqc.Les chefs du parti patriotique (...) interceptèrent le courrier porteur de cet ordre (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 696).Le trafic est intercepté par trois rangs de mobiles au port d'arme (Céline, Mort à crédit,1936, p. 38): 1. ... l'estimable société, au sortir de la salle de banquet, fut interceptée par les sergents de ville, et conduite en prison comme prévenue de tapage nocturne.
Gautier, Jeunes-Fr.,1833, p. 246. − En partic. Être intercepté avant le temps / avant l'heure. Être emporté par la mort prématurément. Je ne sais trop (...) si l'on peut dire que l'Antiquité grecque et romaine ressemble à un génie mort jeune et intercepté avant le temps (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 10, 1851-62, p. 110). − Spécialement ♦ DÉFENSE. Empêcher (un avion, un navire ennemi) d'atteindre son objectif en s'en emparant ou en le détruisant. Sur toutes les routes on intercepte nos convois, nos courriers et tout ce qui tient à l'armée (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823p. 703).On n'était plus assuré, désormais, que des forces navales suffiraient pour intercepter un raid ennemi (Le Masson, Mar.,1951, p. 25). ♦ SPORTS. [Dans un sport coll.] Contrôler la trajectoire (du ballon, du palet, etc.) ou s'(en) emparer avant l'adversaire à qui il était adressé. Les joueurs, pliés en deux, interceptent les passes (Morand, New-York,1930, p. 183). b) Qqc. intercepte qqc.Faire obstacle à l'avancée, à la pénétration de quelque chose. Le ciel se couvrait de nuages pâles qui interceptaient déjà la lumière (Lamart., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 249).Une double haie de peupliers qui interceptaient la vue du dehors (Ponson du Terr., Rocambole, t. 1, 1859, p. 265): 2. Par les soupiraux des sous-sols, on voyait les vestes blanches des cuisiniers intercepter le flamboiement des fourneaux.
Hamp, Champagne,1909, p. 216. − GÉOM. Intercepter un arc. Couper un arc, avoir une intersection avec lui. Deux parallèles interceptent entre elles, sur la circonférence, des arcs égaux (Hadamard, Géom. plane,1898, p. 55).Deux arcs égaux sont interceptés par des angles au centre égaux (Roux, Miellou, Géom.,1946, p. 14). 2. [Le compl. d'obj. dir. désigne une voie d'accès] Obstruer, boucher. En face de l'Opéra-Comique, je tombe dans une foule interceptant la chaussée et barrant le chemin aux omnibus (Goncourt, Journal,1871, p. 726): 3. Poupardin, entrant suivi de sa fille : Je n'y peux plus tenir!... ce vieillard a une trivialité d'élocution qui me coupe l'appétit et m'intercepte l'œsophage.
Labiche, Deux papas,1845, I, 10, p. 404. Prononc. et Orth. : [ε
̃tε
ʀsεpte], (il) intercepte [ε
̃tε
ʀsεpt]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1528 « prendre au passage (ce qui est destiné à quelqu'un d'autre) » (Correspondance du Cardinal de Granvelle, t. 1, p. 340 ds Fonds Barbier); b) 1780 art milit. « empêcher (un bâtiment) d'arriver à destination » (Raynal, Hist. philos., IV, 20 ds Littré [1reéd. 1770 citée par Lar. Lang. fr.]); c) 1930 sports (Morand, loc. cit.); 2. début xviiies. « arrêter dans son cours, dans sa marche » (Larrey, t. 1, part. II, p. 757 ds Trév. 1721 : nuages, qui intèrcèptérent ses rayons [du soleil]). Formé sur interception*, d'apr. le modèle des couples accepter*/acception*, excepter*/exception*. Fréq. abs. littér. : 298. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 721, b) 515; xxes. : a) 168, b) 271. Bbg. Gohin 1903, p. 358. |