| INHABILE, adj. A. − 1. Vieilli. Inhabile à.Qui n'est pas apte à quelque chose. Synon. inapte (à), incapable (de + inf.).Quel mortel, inhabile à la félicité, Nous vantera jamais sa triste liberté (Chénier, Élégies,1794, p. 94).Qu'est-ce que la force et la vitesse? Notre science est inhabile à le dire (Balzac, Peau chagr.,1831, p. 237). 2. DR. ,,Qui n'a pas la capacité légale d'accomplir un acte juridique : Inhabile à tester`` (Lar. Lang. fr.). Le parlement, inhabile à déléguer au sens propre du mot le pouvoir législatif, était compétent pour « habiliter » l'exécutif à régler par décrets toutes matières (Vedel, Dr. constit.,1949, p. 499). B. − 1. [En parlant d'une pers., ou, p. méton., d'une partie du corps] Qui manque d'habileté, de savoir-faire. Synon. gauche, gourd, maladroit, malhabile.Vous êtes à pied, un cavalier inhabile, montant un cheval fougueux, vous renverse (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 253).Il ferme le volume, le repousse, prend une plume, du papier, et, se substituant à l'inhabile auteur, il écrit fiévreusement le reste du mauvais livre (Renard, Lanterne sourde,1893, p. 277).Il avait les doigts non pas inhabiles, mais lourds et, pour dire juste, insoumis (Duhamel, Jard. bêtes sauv.,1934, p. 26).Emploi subst. N'aurons-nous pas un jour une société assez riche et assez chrétienne pour qu'on ne dise plus aux inhabiles : « Tant pis pour toi, deviens ce que tu pourras! » (Sand, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 145): 1. ... il y a plusieurs espèces d'hommes, les faibles et les forts, les malades et ceux qui se portent bien;
J'ai pitié d'eux; les inhabiles et les bègues, les pauvres d'esprit, et ceux qui demandent qu'on leur donne quelque chose...
Claudel, Tête d'Or,1901, 2epart. p. 223. − Inhabile à ♦ Inhabile à + inf.Elle était inhabile à feindre, inhabile à se maîtriser (Gide, Faux monn.,1925, p. 1095): 2. Parlant peu moi-même et inhabile à profiter des silences ou des reprises d'haleine de mes interlocuteurs pour briser le fil d'une digression dans le taillis d'un soliloque, j'étais encore plus silencieux en présence d'un homme que j'admirais éperdument...
Morand, Visit. du soir,1949, p. 12. ♦ Inhabile à + subst.Elle aussi l'embrassa, appuyant de tout son cœur ses lèvres fraîches, inhabiles aux raffinements des caresses, sur cette joue de son fiancé que la mer avait dorée (Loti, Pêch. Isl.,1886, p. 228).Lui-même, si inhabile jadis aux choses d'intérieur, était religieusement soigneux de ce pauvre petit ménage de mère et de fils (Loti, Matelot,1893, p. 70). 2. [En parlant d'une chose] Maladroit, qui n'est pas réussi. Cette scène de la nuit de noces [dans Th. Raquin] est magnifique, et il eût peut-être suffi de la suppression de cinq ou six phrases inhabiles pour la rendre d'un effet immense (Lapommerayeds Le Bien public,14 juill. 1873ds Zola, Théâtre, t. 2, Paris, Bernouard, 1927, p. 689).Ces récits étaient inhabiles, sans couleur et sans joie (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 139). Prononc. et Orth. : [inabil]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1370-72 inhabile a « qui n'est pas apte à » (Oresme, Éth., III, 25, éd. A. D. Menut, p. 225, note 2); spéc. 1384 dr. inhabiles de tous biens (doc. A. Lille ds Gdf. Compl.); 1611 « maladroit » (Cotgr.). Empr. au lat.inhabilis (de habere) proprement « difficile à manier, incommode », fig. « peu propre à, incapable de ». Fréq. abs. littér. : 125. DÉR. Inhabilement, adv.D'une manière inhabile (supra B). Une affaire bien inhabilement conduite (Ac.1935).Le bateau avait repris le large par la maladresse d'Edward, qui avait inhabilement agité la rame (Karr, Sous tilleuls,1832, p. 86).Une foule d'excellents éphèbes, inhabilement émasculés par Zola et sur le point de rendre leurs âmes (Bloy, Journal,1899, p. 299).− [inabilmɑ
̃]. − 1resattest. a) 1596 « de manière incommode » (Hulsius ds Z. fr. Spr. Lit., t. 23, 2epart., p. 36), b) 1611 « de manière maladroite » (Cotgr.); de inhabile, suff. -ment2*. |