| INFRANCHISSABLE, adj. A. − 1. [En parlant d'un obstacle] Qu'on ne peut franchir. Crique, digue, fossé, jetée, montagne, muraille, obstacle, océan, précipice, ravin, rempart, roc, rocher, savane, torrent infranchissable. Le vaincu se voyait déjà entouré d'un cercle féroce, d'une triple haie infranchissable d'ennemis et sentait de plus en plus sa perte impossible à conjurer (Pergaud, De Goupil,1910, p. 31).Une palissade de bois, improvisée pendant la nuit, entourait la gare d'une clôture infranchissable (Martin du G., Thib., Été 14,1936, p. 636): 1. ... les hommes eurent les mains liées, les femmes restèrent libres; tous furent placés au centre du campement, auquel des brasiers allumés firent une infranchissable barrière de feux.
Verne, Enf. cap. Grant, t. 3, 1868, p. 109. − Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre : 2. Comment sortirait-il de là? Trouverait-il une issue? La trouverait-il à temps? Cette colossale éponge souterraine aux alvéoles de pierre se laisserait-elle pénétrer et percer? Y rencontrerait-on quelque nœud inattendu d'obscurité? Arriverait-on à l'inextricable et à l'infranchissable?
Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 534. 2. [En parlant d'une performance] Qu'on ne peut dépasser, au delà de laquelle on ne peut aller. Il y a un plafond infranchissable aux vitesses et aux températures (Teilhard de Ch., Phénom. hum.,1955, p. 165). B. − Au fig. Qu'on ne peut surmonter, vaincre. Dignité, misère, solitude infranchissable. Vous ne vous souvenez pas assez que je suis femme et que ma carrière est limitée à de certains termes infranchissables. Il fallait me contenter de ce qui fait l'orgueil et la joie des autres femmes (Sand, Lélia,1839, p. 408).Les goûters eux-mêmes que Gilberte offrait à ses amies et qui si longtemps m'avaient paru la plus infranchissable des séparations accumulées entre elle et moi devenaient maintenant une occasion de nous réunir (Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 504): 3. ... les prétendues différences infranchissables qu'on avait voulu établir entre les langues qu'on appelle sémitiques et celles qu'on dérive du sanscrit n'existent pas à une certaine profondeur.
P. Leroux, Humanité, t. 2, 1840, p. 637. − Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. À ces assauts divers que religion, philosophie ou science ont lancés contre ce mur de l'infranchissable s'en ajoute un auquel l'homme a eu aussi recours en tous les temps : et c'est l'art (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 404). REM. Infranchi, infranchie, adj.Qu'on n'a pu franchir. [Le bateau] se voyait retenu devant un cours d'eau, sur ses bords non pas infranchissables, mais infranchis (Verne, Enf. cap. Grant, t. 2, 1868, p. 106).Rouletabille examina ensuite les meubles et ouvrit des portes d'armoires. Puis, ce fut le tour des fenêtres qu'il déclara infranchissables et infranchies (G. Leroux, Myst. ch. jaune,1907, p. 33). Prononc. et Orth. : [ε
̃fʀ
ɑ
̃
ʃisabl̥]. Att. ds Ac. 1878 et 1935. Étymol. et Hist. 1792, 28 sept. « qu'on ne peut franchir » une barrière infranchissable (La Société des Jacobins, Rec. de Documents, éd. F. A. Aulard, IV, 344 ds Z. fr. Spr. Lit. t. 35, p. 138); 1829 fig. un cercle infranchissable d'idées (Cousin, Hist. philos. xviiies., p. 374). Dér. de franchissable*; préf. in-1*. Fréq. abs. littér. : 270. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 209, b) 381; xxes. : a) 473, b) 480. |