| INFLIGER, verbe trans. A. − DR., vx. ,,Prononcer une peine contre quelqu'un, lui imposer une peine pour quelque transgression, quelque crime, quelque faute`` (Ac. 1835, 1878). Infliger une condamnation, la peine de mort à qqn. Le Tsar Pierre Ier, étant à Spithead, voulut savoir ce que c'était que le châtiment de la cale qu'on inflige aux matelots (Chamfort, Caract. et anecd.,1794, p. 91).Vous m'obligez à vous infliger une punition : vous garderez les arrêts huit jours, monsieur (Sue, Atar-Gull,1831, p. 20).Le 30 juin, « l'Ambassade de France » me notifiait l'ordre de me constituer prisonnier à la prison Saint-Michel à Toulouse pour y être jugé par le Conseil de guerre. Celui-ci m'infligeait, d'abord, un mois de prison (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 71): 1. ... il exécuta dès cet instant sur moi la plus affreuse sentence qu'aucun tribunal eût jamais pu m'infliger : un bannissement et une captivité de sept à huit mois, à trois mille lieues de ma famille, de mes intérêts, de mon pays, de mes proches, de toutes mes affections.
Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 557. B. − Faire subir une peine matérielle ou morale à quelqu'un. Ils pensaient très fréquemment aux tortures que la Gestapo infligeait aux Français de la résistance qui tombaient entre leurs mains (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 257).Une humiliation vient de m'être infligée, qui surpasse tout ce qui m'a été infligé depuis que j'existe (Montherl., Malatesta,1946, I, 7, p. 451): 2. Il n'y a pas de jour où, rêvant à ce que j'ai été, je ne revoie en pensée le rocher sur lequel je suis né, la chambre où ma mère m'infligea la vie, la tempête dont le bruit berça mon premier sommeil, le frère infortuné qui me donna un nom que j'ai presque toujours traîné dans le malheur.
Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 29. SYNT. Infliger une amende, une correction, une punition corporelle, de mauvais traitements, un supplice à qqn; infliger des pertes à l'ennemi; infliger un affront, un blâme, une blessure d'amour-propre, un échec, une réprimande, des reproches à qqn. ♦ Expr. Infliger un démenti à qqn. Démentir ce qu'il dit. Christophe (...) acheva de les exaspérer, par le démenti brutal qu'il infligea, peu après, à des assertions que le journal lui avait prêtées (Rolland, J.-Chr., Amies, 1910, p. 1190). − P. ext. Faire subir un dommage, une altération à quelque chose. L'église (...) a subi cette espèce de dévastation soigneuse, méthodique et vernissée que le protestantisme inflige aux églises gothiques (Hugo, Rhin,1842, p. 403).Cette opinion paraît absurde et déraisonnable par suite du traitement que les théologiens ont infligé à ce qu'ils appellent l'Écriture (France, Rôtisserie,1893, p. 142). C. − Imposer une contrainte à quelqu'un, lui faire subir quelque chose ressenti comme désagréable. Infliger sa présence à qqn. Après l'un de ces formidables duos comme en infligent au public les compositeurs modernes (Balzac, Splend. et mis.,1847, p. 549).Elle ne lui infligeait aucune conversation religieuse, aucune suggestion, aucun conseil (Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 438): 3. − Si j'étais un guide raisonnable et patenté, je ne vous aurais pas mené ici. Je vous aurais infligé la promenade classique pour étrangers : Sainte-Sophie, l'Hippodrome, la Sublime Porte et le Grand Bazar.
Farrère, Homme qui assass.,1907, p. 140. − Emploi pronom. S'imposer quelque chose, s'astreindre à quelque chose. S'infliger une besogne, un pensum; s'infliger de cruelles fatigues, des jeûnes excessifs, des pénitences corporelles. Il faut une punition à mon bonheur. Je m'inflige de ne pas vous écrire avant samedi prochain (Montherl., Lépreuses,1939, p. 1433). REM. Infligeur, subst. masc.,rare. Celui qui inflige. Mon record en tant qu'infligeur d'affronts et correcteur d'outrecuidants (Larbaud, Journal,1931, p. 249). Prononc. et Orth. : [ε
̃fliʒe], (il) inflige [ε
̃fli:ʒ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1451 (Coutume de Touraine, 199, D'Espinay ds Delb. Notes mss : Pugnicion corporelle ou publique peut estre infligée); 2. 1807 emploi pronom. (Staël, Corinne, t. 2, p. 135 : il en est beaucoup parmi eux qui s'infligent des pénitences corporelles). Du lat. infligere « heurter, infliger une blessure » d'où à l'époque médiév. ca 1250 « punir » (v. Latham.). Fréq. abs. littér. : 802. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 736, b) 697; xxes. : a) 1 511, b) 1 497. Bbg. Busse (W.). Klasse, Transitivität... München, 1974, p. 19, 211. |