| * Dans l'article "INCONCEVABLE,, adj." INCONCEVABLE, adj. A. − PHILOSOPHIE 1. ,,Ce dont l'esprit ne peut se former aucune représentation parce que les termes qui le désignent enveloppent une impossibilité ou une contradiction`` (Lal. 1968). Institutions, lois inconcevables. En tant que la séparation des pouvoirs morcelle la souveraineté populaire entre divers organes, elle est semblablement inconcevable, puisque le peuple seul est souverain (Vedel, Dr. constit.,1949, p. 232): 1. L'histoire et la légende regorgent de faits où semble intervenir la puissance d'un homme à connaître le passé, le présent et l'avenir par des voies que le profane juge inconcevables parce qu'il les ignore et auxquelles il s'empresse de conférer, comme à tout événement inhabituel et mystérieux, un caractère divin ou démoniaque...
Amadou, Parapsychol.,1954, p. 80. 2. ,,Qui ne peut être représenté comme réel par suite de nos habitudes d'esprit`` (Lal. 1968). Crime, miracle, monstre inconcevable. Ils [les géomètres] construisent des mondes parfaits en eux-mêmes, qui s'éloignent parfois du nôtre au point d'être inconcevables (Valéry, Eupalinos,1923, p. 119): 2. Si rien ne peut se concevoir clairement avant que la vérité, à la fin des temps, ait été mise au jour, toute action est arbitraire, la force finit par régner. « Si la réalité est inconcevable, s'écriait Hegel, il nous faut forger des concepts inconcevables ». Un concept qu'on ne peut concevoir a besoin, en effet, comme l'erreur, d'être forgé.
Camus, Homme rév.,1951, p. 184. 3. Qui est difficile à concevoir intellectuellement. La plus grande gloire n'est-elle point celle des Dieux qui se sont faits inconcevables? (Valéry, Variété III,1936, p. 132). − Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. L'inconcevable s'ébauche à quelques pas de vous avec une netteté spectrale (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 469). B. − Usuel 1. [En parlant de choses] Qu'il est difficile de concevoir, d'expliquer, d'imaginer ou même d'admettre. Appétit, aveuglement, égarement, exploit inconcevable; altération, passion, rêverie, scène, vision inconcevable : 3. Toutes ces évolutions se font, au reste, avec une inconcevable adresse et une merveilleuse rapidité et cela sans que la police se préoccupe le moins du monde d'assigner à chacun son poste ou de tracer à chacun sa route.
Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 528. − Expr. exclamative. C'est inconcevable! Ma foi, si je m'attendais à ce que le fameux Adrien Sixte ressemblât à ça... C'est inconcevable! (Bourget, Disciple,1889, p. 45). 2. Rare. [En parlant de pers.] Que l'on ne peut comprendre. Femme inconcevable : 4. Ma sœur est quelquefois inconcevable. J'aime beaucoup l'Adrienne; j'aime bien madame de Bérenger; j'ai aimé passionnément madame de Monchy, mais ma sœur n'a-t-elle pas une place tout à part, où elle règne sans trouble et sans rivale?
Chateaubr., Corresp., t. 1, 1815, p. 285. − Emploi subst. fém., HIST. Femme élégante de la période de la Convention et du Directoire, dont la toilette était la reproduction de celle de l'antiquité grecque ou romaine. On eut les « merveilleuses », et au delà des merveilleuses, les inconcevables (Hugo, Quatre-vingt-treize,1874, p. 121). REM. 1. Inconcevabilité, subst. fém.Qualité de ce qui n'est pas concevable. Ce qui revient à dire que concevabilité et inconcevabilité n'ont rien à voir en pareille affaire (Bergson, Évol. créatr.,1907, p. 80).L'inconcevabilité de la non-existence de Dieu n'a de sens que dans la perspective chrétienne où Dieu s'identifie avec l'être et où, par conséquent, il devient contradictoire de prétendre qu'on le pense et qu'on le pense comme n'existant pas (Gilson, Espr. philos. médiév.,1931, p. 63). 2. Inconcevablement, adv.De manière inconcevable. Ici le mathématicien apparaît, en ces planètes de dimensions inconcevablement petites (Gds cour. pensée math.,1948, p. 189). Prononc. et Orth. : [ε
̃kɔ
̃səvabl̥] ou [-kɔ
̃svabl̥]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1584 « dont l'esprit ne peut se faire aucune représentation » (J. de Barraud, Epistres dorées, trad. de Guevarre, IV, 1b d'apr. H. Vaganay ds Rom. Forsch. t. 32, p. 84); 2. 1641 « impossible à saisir pleinement par l'esprit » (Descartes, Réponses aux secondes objections ds
Œuvres philosophiques, éd. F. Alquié, t. 2, p. 563); 3. 1664 « impossible ou difficile à comprendre, à expliquer, à imaginer, à croire » (Mmede Sévigné, Lettre du 21 déc. ds Corresp., éd. R. Duchêne, t. 1, p. 78). Dér. de concevable*; préf. in-1*. Fréq. abs. littér. : 658. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 365, b) 404; xxes. : a) 749, b) 965. |