| IMPATIENCE, subst. fém. A. − Manque de patience; incapacité de se contenir, considérée comme un trait de caractère. Synon. fougue, impétuosité, pétulance; anton. indolence, nonchalance.Chez les sujets fort sensibles, (...) une disposition singulière à l'impatience et à l'emportement (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 2, 1808, p. 33).Le trait le plus saillant de son caractère était une impatience chronique, un mécontentement perpétuel qui devenait de la rage à la plus légère contradiction (Bloy, Femme pauvre,1897, p. 201) : 1. Les deux principaux facteurs de l'impatience sont l'émotivité et la primarité. Les plus impatients des impatients sont donc les EP [émotifs primaires]. Les mêmes chez qui la liaison est immédiate et rapide de la pensée à l'acte ne savent pas attendre l'exécution des ordres qu'ils donnent. L'impatience se liquide par des manifestations émotives...
Mounier, Traité caract.,1946, p. 424. B. − En partic. 1. Vieilli ou littér. Manque de résignation. Synon. révolte; anton. soumission.Fils obéissant de l'Église, je suis, néanmoins, en communion d'impatience avec tous les révoltés, tous les déçus (Bloy, Désesp.,1886, p. 150). 2. Manque de patience pour supporter quelqu'un ou quelque chose. Synon. agacement, colère, énervement, exaspération, irritation.Non monsieur... Vous vous êtes montré jusqu'à présent trop sensible, trop équitable pour vouloir commettre une injustice aussi révoltante... Ici le baron fait un mouvement d'impatience (Guilbert de Pixér., Victor,1798, II, 7, p. 36).Le compagnon habituel de Cayrouse (...) manifestait très vite l'impatience que lui causait le bavardage d'André (Martin du G., Devenir,1909, p. 88) : 2. − C'est donc le président qui te déplaît, là-bas? Séverine, qui, jusque-là, répondait lentement, d'une voix égale, fut reprise d'impatience. − Lui, quelle idée! Et elle continua, en petites phrases nerveuses.
Zola, Bête hum.,1890, p. 14. − [Suivi d'un compl. déterminatif à valeur objective] L'impatience de ma situation me ressaisissait par fréquents et soudains assauts (Sainte-Beuve, Volupté, t. 1, 1834, p. 94).Emportée par la violence de son caractère et par son impatience de toute contradiction (Sue, Myst. Paris, t. 5, 1843, p. 143). 3. Manque de patience pour attendre quelqu'un ou quelque chose. Synon. avidité, désir, empressement, fièvre; anton. calme, placidité, sérénité.Tu sais avec quelle impatience j'attends ton essai (Rivière, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1907, p. 274). − L'impatience de + inf.L'impatience d'embrasser maman m'ôtait le sommeil. Près de deux mois passés sans la voir! (Loti, Rom. enf.,1890, p. 89). C. − P. méton., au plur. 1. Vieilli. Manifestation de l'impatience, irritation nerveuse qu'elle produit. Avoir des impatiences. Quoi de plus odieux, par exemple, que ces inopportunes impatiences du peuple, ce défilé de pétitions impossibles dont ils viennent de m'accabler! Quelle avidité de jouir! Quelles prétentions subversives! (Renan, Drames philos., Caliban, 1878, III, 3, p. 413).J'ai cru devoir la ménager moi-même et souffrir ses impatiences (A. France, Bonnard,1881, p. 489) : 3. ... Jean-Michel était devenu légendaire (...) par ses accès de colère. (...) son sang l'emportait : il voyait rouge; et il était pris brusquement par des impatiences folles, non seulement aux répétitions de l'orchestre, mais en plein concert, où il lui était arrivé, devant le prince, de jeter son bâton avec rage et de trépigner comme un possédé, en apostrophant un de ses musiciens, d'une voix furieuse et bredouillante.
Rolland, J.-Chr., Aube, 1904, p. 28. 2. Irritation nerveuse (le plus souvent dans les jambes) se traduisant par une agitation motrice et des fourmillements. Ses doigts éprouvaient des impatiences qui lui devinrent bientôt très importunes (A. France, Dieux ont soif,1912, p. 183) : 4. Ces conditions communes (...) tendent à ajouter au caractère de fond de chacun une résonance nerveuse qui porte sur l'ensemble du comportement ou sur quelque secteur de l'activité. Parfois elle ne s'exprime que dans des phénomènes marginaux; tics, impatiences fugitives, loquacité, acuité de sensation ou vivacité de jugement.
Mounier, Traité caract.,1946, p. 86. − Au fig., fam. Avoir des impatiences dans les jambes; des impatiences lui fourmillent dans les jambes. Éprouver le besoin de marcher, ne pouvoir rester en place. Synon. avoir des fourmis dans les jambes.Des impatiences nous fourmillaient dans les genoux (Dorgelès, Croix bois,1919, p. 67). Prononc. et Orth. : [ε
̃pasjɑ
̃:s]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Fin xiies. impacience (Sermons St Bernard, éd. W. Foerster, 116, 34); 1585 plur. « mouvements d'impatience » (N. du Fail, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, II, p. 212); 1764 « irritations nerveuses, surtout dans les muscles » (Poinsinet, Soirée à la mode, sc. 8 ds Brunot t. 6, 2, p. 1110 : Des impatiences de fibres). Empr. au lat.impatientia « inaptitude à supporter quelque chose, manque de fermeté ». Fréq. abs. littér. : 2 745. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 3 996, b) 4 262; xxes. : a) 3 463, b) 3 896. |