| IMMENSITÉ, subst. fém. A. − [En parlant de Dieu ou de l'espace] Caractère immense, illimité; grandeur sans bornes ni mesures. Nous ne dirons même plus de notre corps qu'il soit perdu dans l'immensité de l'univers (Bergson, Deux sources,1932, p. 275).L'immensité du ciel au-dessus de nos têtes produisait en moi une espèce d'enivrement (Green, Journal,1941, p. 129).Sous quelle forme (...) l'immensité divine se manifeste-t-elle, s'applique-t-elle à l'humanité? (Teilhard de Ch., Milieu divin,1955, p. 147) : 1. « ... maintenant tu es digne d'être mon époux; je jure de n'en avoir jamais d'autre que toi, je jure à ce Dieu qui en ce moment remplit de son immensité et de sa toute-puissance, et ce désert et ton cœur...! »
Cottin, Mathilde, t. 1, 1805, p. 359. − Absol., littér. Espace infini. Se perdre dans l'immensité. Et à l'occident, distingues-tu ce nuage sombre qui n'est encore qu'un point dans l'immensité? (Dumas père, Henri III,1829, IV, 3, p. 179) : 2. Par delà les confins des sphères étoilées,
Mon esprit, tu te meus avec agilité,
Et comme un bon nageur qui se pâme dans l'onde,
Tu sillonnes gaîment l'immensité profonde.
Baudel., Fl. Mal,1857, p. 16. ♦ Au plur. Ses naseaux énormes [du colosse d'airain] se dilataient, le grand jour l'animait, lui donnait un air terrible et impatient, comme s'il avait voulu bondir au dehors pour se mêler avec l'astre, le dieu, et parcourir ensemble les immensités (Flaub., Salammbô, t. 1, 1863, p. 133). B. − P. ext. 1. Étendue si vaste qu'elle semble illimitée. Il semblait que l'ennemi se fût dispersé et comme fondu dans l'immensité des campagnes (Saint-Exup., Pilote guerre,1942, p. 341).Alors, soudain, pareille à une immensité d'azur, sans une voile, sans une fumée, la mer de faïence bleu-tendre s'étendait à l'infini (Duhamel, Passion J. Pasquier,1945, p. 28). − Littér., au plur. Ce départ, par une nuit noire et pluvieuse, sur une route semée de dangers, à travers les immensités inconnues d'un désert, eût impressionné un cœur moins ferme que celui du matelot (Verne, Enf. cap. Grant, t. 2, 1868, p. 234). 2. P. exagér. Grandeur inhabituelle, considérablement plus importante que la normale. Plusieurs cohortes défilèrent somptueuses par les habits dorés, par les éclairs des armes, par l'immensité de leurs plumages versicolores (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 14).− Mais, Oriane, pas ce soir! vous regarderez cela demain, implora le duc qui m'avait déjà adressé des signes d'épouvante en voyant l'immensité de la photographie (Proust, Guermantes 2,1921, p. 593).L'immensité du cortège, la force et la joie dans l'expression des sentiments, marquent le triomphe (Jouve, Scène capit.,1935, p. 80). 3. P. méton. Une immensité de. Une multitude de. Cette convergence régulière et continue d'une immensité d'individus (Comte, Philos. posit., t. 4, 1839-42, p. 470).C'était une immensité confuse de toits, de murs, (...) de cheminées, de bâtiments difformes (Duhamel, Notaire Havre,1933, p. 53). C. − Au fig. 1. Caractère illimité, sans bornes ni mesures. Tout ce qu'on a pu dire de l'immensité des douleurs humaines n'est rien peut-être au prix des déceptions, des trahisons, des abjections du plaisir (Blondel, Action,1893, p. 24). 2. Caractère très grand, très vaste. Ce Mendès a une conversation qui surprend par l'immensité de ses lectures françaises et étrangères (Goncourt, Journal,1890, p. 1263).L'immensité vague de ma tâche m'a découragé d'avance (Arnoux, Calendr. Fl.,1946, p. 127). Prononc. et Orth. : [im(m)ɑ
̃site]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1374 immansité (J. Goulain, Trad. du Ration. de G. Durant, B.N. 437, fo236b ds Gdf. Compl.); 1377 immensité (Oresme, Livre du ciel et du monde, éd. A. D. Menut, 200c, p. 722). Empr. au lat.immensitas de même sens, dér. de immensus, v. immense. Fréq. abs. littér. : 1 195. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 923, b) 1 905; xxes. : a) 1 639, b) 1 433. |