| IMMANENT, -ENTE, adj. Qui est présent à. A. − THÉOL. [P. oppos. à transcendant] Qui réside dans. Dieu est immanent dans ses créatures; il est leur principe de vie suprême, la source du mouvement, la base de leur existence, dit saint Paul; mais il est distinct de leur vie, de leur mouvement, de leur âme (Huysmans, Là-bas, t. 2, 1891, p. 194) : 1. ... Malebranche semble aussi sous-entendre que Dieu ne peut vouloir aucun événement qui ne soit selon l'ordre des lois générales de la nature, ce qui signifierait que Dieu est immanent à la nature et que les lois naturelles sont l'expression de son essence, comme l'entend Spinoza − postulat incompatible avec l'idée de Dieu créateur, libre et transcendant.
Massis, Jugements,1923, p. 79. − P. ext. : 2. Il propose comme immanent à l'histoire un idéal manifestement trans-historique, un idéal tellement au-dessus de l'homme qu'il ne réclame pas seulement une médiation continue, mais l'intervention abrupte d'un médiateur.
Lacroix, Marxisme, existent., personn.,1949, p. 44. B. − PHILOS. [En parlant d'un principe, d'une cause] Qui est impliqué dans. Immanent à la matière, à la nature, au sujet, aux phénomènes; monde immanent au sujet; force immanente à la vie, à la conscience; durée immanente au tout de l'univers; finalité immanente à la vie. Les individus qui s'en remettent aux juges du soin de trancher un différend y sont obscurément encouragés par l'instinct de discipline immanent à la société close (Bergson, Deux sources,1932, p. 306). − [P. oppos. à activité transitive] Mouvement, activité immanent(e). Opération de l'esprit dont la caractéristique est de s'achever au sein du principe d'où elle émane. L'action morale est une activité immanente parce qu'elle procède de la libre décision du sujet et vise à l'amélioration de celui-ci (Thinès-Lemp.1975) : 3. La vérité est que ce n'est pas à la science de régler notre vie, mais à la sagesse; et que l'œuvre suprême de la civilisation n'est pas de l'ordre de l'activité transitive, mais de l'activité immanente...
Maritain, Human. intégr.,1936, p. 208. − P. ext. Justice immanente. Justice dont la sanction est impliquée dans l'acte qui encourt la réprobation : 4. Quelle sottise que ce qu'on nomme la justice immanente! et quelle puérilité d'estimer que le monde se charge de récompenser les vertus naturelles, même dans l'étroite enceinte où se meut l'égoïsme empirique...
Blondel, Action,1893, p. 282. Prononc. et Orth. : [im(m)anɑ
̃], fém. [-ɑ
̃:t]. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. Ca 1370 « qui demeure dans la pensée » (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, livre VI, chap. 16, p. 356, note 3 : Et teles operacions sont immanentes; c'est a dire que il demeurent en l'ententement et en la pensee), attest. isolée; 1570 immanens et imminens (Gentian Hervet, Cité de Dieu, I, 27 ds Delb. Notes mss); 1. 1690 philos. et théol. « qui demeure dans le sujet agissant et n'a pas d'effet à l'extérieur » actions... immanentes (Fur.); 2. 1800 « permanent, constant » (Boiste). Empr. au lat. scolast.immanens, ca 1300 (ds Latham) part. prés. du lat. immanere « demeurer dans » (de in « dans » et manere « demeurer »), surtout utilisé par les auteurs chrétiens. Fréq. abs. littér. : 271. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 89, b) 31; xxes. : a) 508, b) 753. Bbg. Gohin (Y.). Sur l'emploi des mots immanent et immanence chez Victor Hugo. Paris, 1968, 55 p. - Seebacher (J.). R. Hist. litt. Fr. 1970, t. 70, pp. 1085-1086. |