| HÉSITER, verbe A. − Emploi trans. indir. [L'action n'est pas commencée] Être dans un état d'indétermination, d'incertitude qui empêche d'agir, de prendre parti, ne pas se décider à. 1. Hésiter + prép. + inf. − Hésiter à.S'il hésitait à lui rendre ce service, elle saurait bien l'y contraindre en rappelant d'un seul clin d'œil leur amour perdu (Flaub., MmeBovary, t. 2, 1857, p. 162) : 1. ... Wilhem arriva; il rapportait une lettre; l'étranger hésita à l'ouvrir, comme un homme qui craint de perdre sa dernière espérance; puis brusquement fit sauter le cachet et lut rapidement.
Karr, Sous tilleuls,1832, p. 162. − Hésiter de (vieilli).Mais quels sont les éléments de l'art? Seconde question à laquelle j'hésitai pendant plusieurs mois de répondre (Bertrand, Gaspard,1841, p. 46) : 2. ... il me sembla voir un fantôme blanchâtre, enveloppé d'une draperie immense, tel que l'on peint les spectres sortant des tombeaux. Je frissonnai; (...) ému d'effroi j'hésitais de fuir ou de m'assurer de l'objet...
Volney, Ruines,1791, p. 17. − Hésiter pour (vieilli).Madame la marquise de T... hésitait pour acheter un meuble sur lequel enchérissait Madame D... (Dumas fils, Dame cam.,1848, p. 18). 2. Hésiter + prép. + subst. − Hésiter dans.Hésiter dans les affaires (Ac. 1835, 1878). Ferme sur ses théories, jamais il n'hésite dans l'application (Lemaitre, Contemp.,1885, p. 219). − Hésiter entre.Hésiter entre diverses suppositions. Aussitôt après la maison d'école, il hésita entre deux routes et crut se rappeler qu'il fallait tourner à gauche pour aller à Vierzon (Alain-Fournier, Meaulnes,1913, p. 56).Un personnage de Franz Hellens, voulant offrir un cadeau à sa fille hésite entre un fichu de soie ou une petite boîte en laque du Japon (Bachelard, Poét. espace,1957, p. 86). − Hésiter sur.Courbés, tendant le dos à la rafale, ils marchaient très-vite, suivant Top, qui n'hésitait pas sur la direction à prendre (Verne, Île myst.,1874, p. 60).Après dîner, j'hésitai sur ce que je ferais. J'eus envie d'entrer dans un théâtre; et puis l'idée me vint d'aller en pèlerinage au Quartier Latin, où j'avais fait mon droit jadis (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Ermite, 1886, p. 1055). 3. Hésiter si.[En interr. indir.; le verbe de la sub. est soit à l'ind., soit au cond.] Se demander. Il hésitait donc s'il lirait, en ce moment, la lettre qui venait de lui être remise (Châteaubriant, Lourdines,1911, p. 71).C'est ce que j'ai appris en rentrant, dit Olivier, que le voussoiement d'Edouard consternait. Il hésita s'il n'allait pas le lui dire (Gide, Faux-monn.,1925, p. 1171). 4. Absolument : 3. Brisson a obéi : à regret, je voudrais croire. Maintenant il est chef de son propre gouvernement. Il tâtonne, il hésite. Il ne peut se décider à libérer Picquart...
Clemenceau, Vers réparation,1899, p. 157. B. − Emploi intrans. [L'action est interrompue] Manifester son incertitude ou son embarras par un temps d'arrêt. Manuel ouvrit la porte, hésita une seconde, comme si refermer cette porte eût été rabattre le couvercle d'un cercueil sur le blessé. Enfin, il la laissa entr'ouverte (Malraux, Espoir,1937, p. 511).Le vieux remue la bouche pour répondre, puis lui tourne le dos, en silence. Sur le seuil, il hésite encore, et s'en va lentement, le plus lentement qu'il peut, la tête penchée, prêtant l'oreille (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1458). − En partic. Marquer un temps d'arrêt dans son élocution, s'arrêter de parler. J'ai vu... Il hésita un moment, baissa la tête, puis la releva. − J'ai cru voir... J'ai vu le trou (Peisson, Parti Liverpool,1932, p. 198) : 4. − Je n'abandonnerai pas votre... (elle hésite une seconde peut-être, juste le temps de prendre le regard de Philippe dans son regard pâle) − Michelle, ajoute-t-elle si naturellement, si simplement qu'il ne trouve rien à répondre, hausse les épaules.
Bernanos, M. Ouine,1943p. 1444. Prononc. et Orth. : [ezite], (il) hésite [ezit]. Le verbe est att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. xves. « être dans un état d'incertitude, d'irrésolution » (Passion de Roman, 486 ds Passion d'Autun, éd. G. Frank, p. 193 : Puisque de mors vous ecytés); ca 1535 hesiter (G. de Selve, Vies de Plutarque ds DG); 2. 1611 spéc., en parlant (Cotgr. to stammer [bégayer]). Empr. au lat.haesitare « être embarrassé, empêché; éprouver une gêne; bégayer; hésiter, balancer ». Fréq. abs. littér. : 5 076. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 4 454, b) 6 413; xxes. : a) 7 767, b) 9 678. |