| HÉRITIER, -IÈRE, subst. A. − DR. Parent (légitime ou naturel) appelé par la loi à recueillir la succession d'un défunt. Synon. hoir (vx); synon. partiels ayant-cause, ayant-droit.Qualité, titre d'héritier; héritier direct, testamentaire; faire acte d'héritier. L'héritage est une chose ou un ensemble de choses sur lesquelles les héritiers et les légataires ont un droit réel, que celui-ci soit acquis ipso facto par le décès du propriétaire, ou bien qu'il ne s'ouvre qu'à la suite d'un acte judiciaire, comme il arrive pour les héritiers indirects et les légataires à titre particulier (Durkheim, Division trav.,1893, p. 86).Dans les successions, il suffit qu'un des héritiers fasse la demande de vendre l'hoirie pour qu'elle se vende (Ramuz, A. Pache,1911, p. 273) : 1. À défaut d'héritier naturel et légitime ou d'héritier adoptif de Napoléon Bonaparte, la dignité impériale est dévolue et déférée à Joseph Bonaparte et à ses descendants naturels et légitimes, par ordre de primogéniture, et de mâle en mâle, à l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance.
Sénatus-consulte organique,1804ds Recueils textes hist., p. 132. − Héritier apparent. ,,Personne qui est en possession d'une hérédité et passe pour héritier aux yeux de tous, alors qu'il est ultérieurement établi que cette succession revient à une autre personne`` (Cap. 1936). − Héritier bénéficiaire. ,,Personne qui n'accepte une succession que sous bénéfice d'inventaire et n'est tenu des dettes que jusqu'à concurrence de ce qu'il a recueilli`` (Bach.-Dez. 1882). L'héritier bénéficiaire est chargé d'administrer les biens de la succession, et doit rendre compte de son administration aux créanciers et aux légataires (Code civil,1804, art. 803, p. 147). − Héritier présomptif. ,,Parent le plus proche, et qui, par cette raison, est présumé devoir hériter`` (Bach.Dez. 1882). Le duc n'attendait qu'une lubie, un moment où il penserait sérieusement à l'avenir, pour avancer à son Otto le titre d'héritier présomptif qui lui transmettrait le duché (Bourges, Crépusc. dieux,1884, p. 6). − Héritier pur et simple. ,,Personne qui a accepté une succession, et qui est tenu indéfiniment des dettes de cette succession`` (Bach.-Dez 1882). − Héritier réservataire. ,,Personne appelée par la loi à une succession et que le défunt ne peut, par testament, priver de la totalité de ses biens`` (Lemeunier 1969). Ce droit [droit pécuniaire] est exercé pendant cette période [de 50 ans] par la personne physique ou morale au profit de qui l'auteur en aura disposé, sous la réserve des droits des héritiers réservataires (Civilis. écr.,1939, p. 16-11). − DR. ROMAIN. Héritier nécessaire. Celui qui ne pouvait renoncer à la succession. Avant les Douze-Tables nous n'avons aucun texte de loi qui interdise ou qui permette le testament. Mais la langue conservait le souvenir d'un temps où il n'était pas connu; car elle appelait le fils héritier sien et nécessaire (Fustel de Coul., Cité antique,1864, p. 96). B. − Cour. [La pers. dont on hérite ou les biens hérités peuvent ou non être spécifiés; s'ils le sont, le compl. est introd. par la prép. de] 1. a) Personne qui hérite ou héritera, qui reçoit en héritage tout ou partie des biens d'un défunt. Vous êtes l'héritier principal des biens et des titres que je puis avoir. Un boulet espagnol peut vous mettre, par hasard, avant peu, dans la position de me succéder (Adam, Enfant Aust.,1902, p. 491).J'ai trouvé (...) dans un tiroir, un acte de propriété, qui n'est pas mentionné dans les dispositions testamentaires. Mais comme vous êtes le seul héritier de votre cousin, il va de soi que, de plein droit, cette possession vous revient (Bosco, Mas Théot.,1945, p. 232) : 2. Pousse mon lit près de la fenêtre (...). J'adore voir passer les enterrements, on y apprend toujours quelque chose. (...) regarde, regarde la grande idiote de fille, (...) elle pleure toutes les larmes de son corps (...). Derrière elle, c'est ce que j'appelle les gueules d'héritiers. Oh! Ces figures! Il y a des jours où je me félicite de ne pas vous laisser un sou.
Colette, Mais. Cl.,1922, p. 204. − Emploi apposé avec valeur d'adj. Prince héritier. Cette partie de la jeunesse héritière, ce millier de jeunes messieurs de bonne famille (Guéhenno, Journal homme 40 ans,1934, p. 124).Une grande toile (...) occupait tout un panneau du salon (...), où se tenaient la mère du petit bébé, la princesse héritière, et sa grand-mère, la reine (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 121). SYNT. Héritier de grande famille; héritier de la branche aînée, des premières maisons de France; héritier d'une affaire, d'un château, d'un domaine, d'une fortune, d'une propriété; héritier de la couronne, du royaume, du trône; désigner, instituer qqn (comme) son héritier. b) Personne qui possède une qualité, un trait physique, moral ou intellectuel, transmis directement par les ancêtres, les parents. Les enfants sont héritiers des vices et des maladies de leurs parents (Champfl., Avent. MlleMariette,1853, p. 148).MmeLamberdesc mère, jadis très belle, mais déformée par une grossesse difficile, était devenue un objet d'horreur pour son mari qui avait reporté toutes ses extravagances de cœur sur ce fils, héritier de la beauté maternelle (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 35). c) Personne qui perpétue l'œuvre d'une autre personne, les traditions, les idées des générations précédentes; qui se situe dans la même filiation spirituelle qu'une autre personne. Synon. continuateur, successeur.Héritier d'une civilisation, d'une culture, de traditions. Gide a écrit un essai sur Montaigne. Il serait peut-être dans la famille des essayistes l'héritier le plus direct de Montaigne (Arts et litt.,1936, p. 38-14).Marx, au lieu qu'il soit, comme le veulent les marxistes désordonnés de notre temps, le commencement et la fin, participe au contraire de l'humaine nature : il est héritier avant d'être précurseur (Camus, Homme rév.,1951, p. 244) : 3. Pour moi, je la trouve adorable dans tous ses emplois, depuis la fille de joie des quais de Marseille, héritière de l'obscénité primitive, venue en droite ligne de Babylone, avec sa grosse lèvre et son rire libertin, jusqu'à la mère vénérable de la primitive tribu aryenne...
Renan, Drames philos., Eau jouvence, 1881, V, 4, p. 514. − P. ext. [Désignant un système, un pays considéré quant à sa population] La civilisation dont l'Europe moderne est l'héritière finale, s'est nourrie à l'origine d'une foule de foyers distincts, a absorbé la substance d'un grand nombre de milieux locaux (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum.,1921, p. 214).La Grèce parle une langue qui est l'héritière directe du grec ancien (Arts et litt.,1936, p. 52-3). − Emploi adj. Nul (...) plus que lui n'aura contribué à faire apprécier des générations héritières et de l'avenir les quelques idées immortelles de ce génie solitaire et taciturne (Sainte-Beuve, Portr. contemp., t. 5, 1846-69, p. 254). 2. P. ext., fam. Enfant; plus partic., fils. Désirer un héritier. L'oncle d'Esther (...) souhaitait se retirer des affaires et n'avait pas d'héritier (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 47).Signora Rosa (...) était encore une fois enceinte, (...) espérant, cette fois, pondre un héritier (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 116). 3. Subst. fém. Jeune fille qui doit hériter d'une importante succession. Riche héritière; courir l'héritière; chercher, trouver une héritière (à marier). C'est aujourd'hui que lord Mewill épouse cette riche héritière sur la dot de laquelle il compte pour refaire sa fortune (Dumas père, Kean,1836, I, 3, p. 100).La cérémonie fut digne et de bon goût. L'héritière est campagnarde. Son château − toute maison est château pour une héritière − est situé sur un sommet verdoyant qui domine Autun (Estaunié, Empreinte,1896, p. 323). Prononc. et Orth. : [eʀitje], fém. [-tjε:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1135 eritier « personne qui est appelée à succéder, qui reçoit des biens en héritage » (Couronnement Louis, éd. E. Langlois, 243). Réfection de *heretier, du lat. hereditarius « héréditaire, d'héritage, reçu par héritage » après substantivation, en lat. médiév. « héritier » (1012-18 ds Nierm.), dér. de hereditas, v hérédité, d'apr. erité, v. hériter. Fréq. abs. littér. : 1 792. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 4 390, b) 2 064; xxes. : a) 1 823, b) 1 671. |