| HYPOCRISIE, subst. fém. A. − 1. Caractère d'une personne qui dissimule sa véritable personnalité et affecte, le plus souvent par intérêt, des opinions, des sentiments ou des qualités qu'elle ne possède pas. Synon. dissimulation, duplicité, fausseté, fourberie, patelinage (vx).Je n'accuse pas ces messieurs d'hypocrisie, je les crois sincères (Bernanos, Journal curé camp.,1936, p. 1061) : 1. ... je déteste l'hypocrisie et la déloyauté. Or postuler le ministère comme gagne-pain et sans piété, tricher la vertu quand on monte en chaire pour la défendre, être incrédule quand on se porte gardien de la foi, donner un honteux exemple quand on fait vœu d'être en exemple, n'est-ce pas faillir à l'honneur?
Amiel, Journal,1866, p. 434. ♦ Loc. verb. l'hypocrisie de + inf.En Allemagne, nous avons l'hypocrisie de parler toujours d'idéalisme, en poursuivant toujours notre intérêt (Rolland, J.-Chr., Foire, 1908, p. 719).Il n'avait jamais admis que l'on pût avoir la lâcheté et l'hypocrisie de décorer du nom de devoir social la poltronnerie d'une bourgeoisie incapable de se défendre (Sorel, Réflex. violence,1908, p. 98). − En partic., vx. Affectation d'une extrême piété, fausse dévotion. Synon. bigoterie, bigotisme; cagoterie, cagotisme; papelardise (vx), pharisaïsme, tartuf(f)erie.Hypocrisie des Pharisiens, de Tartuffe. Dans une pensée d'avenir, Valérie avait ajouté l'hypocrisie religieuse à son hypocrisie sociale. Exacte aux offices le dimanche, elle eut tous les honneurs de la piété (Balzac, Cous. Bette,1847, p. 142).Molière est assurément partial dans Tartuffe et prend hardiment parti contre l'hypocrisie religieuse (Vigny, Journ. poète,1842, p. 1173). 2. Caractère de ce qui manque de sincérité, de ce qui est empreint d'affectation et/ou de duplicité. Hypocrisie d'une attitude, d'une promesse; hypocrisie d'un regard, d'un sourire. Il sentait chez Leonhard l'hypocrisie de ce renoncement (Rolland, J.-Chr., Adolesc., 1905, p. 248).L'hypocrisie des compliments adroits qu'on débite lorsqu'on a un peu d'expérience (Green, Journal,1945, p. 215).L'hypocrisie doucereuse de ce texte, les confusions qu'on feint d'y faire et les fausses justifications qu'on y fournit, en font peut-être le chef-d'œuvre de la casuistique vichyssoise (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 152). − En partic., péj. Caractère (d'une institution) qui reflète la mauvaise foi des personnes qui en sont à l'origine et/ou qui l'approuvent; caractère qui tend à masquer la réalité. Hypocrisie des lois. M. Mauclair écrit des pages pleines de verve sur l'hypocrisie du mariage bourgeois (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 69). B. − P. méton., gén. au plur. Manifestation de ce caractère; acte, parole empreint(e) d'affectation et/ou de duplicité. Synon. mascarade, momerie, simagrées.Nouvelles perfidies, mensonges, hypocrisies et minauderies de Juliette (Constant, Journaux,1815, p. 452).On n'en a jamais fini avec les hypocrisies de la moralité bourgeoise (Bourget, Actes suivent,1926, p. 150) : 2. Antoine souriait, sans s'occuper de Jacques. − « ... Au point de vue moral... », disait-il. « Antoine parle, il n'y en a que pour lui!... » songea Jacques. Et tout à coup l'amabilité mondaine de son frère, ce « point de vue moral », surtout après les confidences licencieuses qu'Antoine venait de lui faire, l'offensèrent comme une impardonnable hypocrisie.
Martin du G., Thib., Belle sais., 1923, p. 919. Prononc. et Orth. : [ipɔkʀizi]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1168-91 ypocrisye (Chr. de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 30). Empr. au b. lat.hypocrisis « hypocrisie », sens issu de celui de « mimique; imitation de la manière de parler et des gestes de qqn », gr. υ
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ς « rôle (sur scène) »; « hypocrisie » Fréq. abs. littér. : 928. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 470, b) 1 166; xxes. : a) 1 123, b) 1 391. |