| HUSSARD, subst. masc. I. A. − Dans le domaine militaire 1. HISTOIRE a) Cavalier de l'armée hongroise (d'apr. Bouillet 1859). b) P. ext. Cavalier (de l'armée polonaise). Chargés de lourdes cuirasses, et s'appuyant sur leurs longues lances, les hussards polonais cheminaient péniblement (Mérimée, Cosaques d'autrefois,1865, p. 45). 2. Soldat d'un corps de cavalerie légère (dans diverses armées françaises) dont l'uniforme rappelait celui des cavaliers hongrois; soldat d'un régiment blindé (mod.). Il ne semblait plus un farouche guerrier, sinon par les brandebourgs de son uniforme de hussard, qui collait aux plus belles formes viriles qu'on pût voir (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 88) : ... il y a beau jour qu'à son âge mon cœur avait parlé... C'était un hussard, moi! oui, bleu et argent! superbe!... Il était bête comme son sabre! mais à cet âge-là!... Un cœur neuf, c'est comme une maison neuve, ce ne sont pas les vrais locataires qui essuient les plâtres!...
Pailleron, Monde où l'on s'ennuie,1869, I, 10, p. 40. − Emploi adj., p. méton. Il est vêtu d'une capote ancien modèle, bleu foncé, avec une grande poche rapportée, d'un joli bleu hussard (Dorgelès, Croix de bois,1919, p. 65). ♦ P. ell. [Précédé d'un adj. numéral] En 1824, j'étais un petit sous-lieutenant de hussards (...). Mon régiment, qui était le deuxième hussard, était cantonné à Barcelone (Ponson du Terr., Rocambole, t. 1, 1859, p. 91). SYNT. Hussard de la Garde (impériale), de la mort; hussard bleu, noir; hussard autrichien, prussien; bonnet, dolman, pelisse, sabre, sabretache, shako, talpack de hussard; capitaine, colonel, officier de hussard; charge, escadron, régiment de hussards; servir dans les hussards. − En partic., arg. Hussard, houzard à quatre roues. Soldat du train des équipages. Qu'est-ce que tu réclames, mauvais houzard à quatre roues, puisque tu étais trop vilain soldat pour rester dans le train (Vidal, Delmart, Caserne,1833, p. 359). − Hussard de la guillotine, de la veuve. Gendarme. C'est pour aujourd'hui, les hussards de la veuve (autre nom, nom terrible de la mécanique!) sont commandés (Balzac, Splend. et mis.,1847, p. 552).Ils ont bien pris leur temps, ces hussards de la guillotine, ils sont venus un jour de fête (Balzac, Paysans,1850, p. 343Id., Paysans, 1850, p. 343). B. − P. anal. [Avec une partie de l'uniforme de hussard; avec les manières rudes et viriles traditionnellement attribuées aux hussards] 1. Personne dont les manières sont brusques, qui manque de délicatesse, de distinction. Jean Chouart était bonhomme (...) le voilà revenu d'Allemagne ou d'Angleterre, espèce de hussard en soutane, dont le hardi regard fait rougir nos jeunes filles, et dont la langue sème le trouble et la discorde (Courier, Pamphlets pol., Au réd. « Censeur », 1819, p. 26).Mon hussard féminin est si capable d'enthousiasme : voyons-le dans ses beaux moments (Taine, Notes Paris,1867, p. 209). − Emploi adj. Ce n'est point une fille digne d'un traitement aussi hussard (Borel, Champavert,1833, p. 14).Toujours mon manque d'aplomb, jamais assez hussard! (Léautaud, Journal littér., t. 1, 1905, p. 202). 2. À la hussarde a) Loc. adj. À la manière des hussards. Manteau à la hussarde; cheval équipé à la hussarde. Les belles dames qu'on y voyait [dans l'album de la Mode] en déshabillé à la montauciel (...) ou bien encore casaquin à la hussarde et chapeau à la roi de Prusse répondaient aux doux noms de Zémire et de Thénisdore (Lorrain, Contes chandelle,1897, p. 163). ♦ Pantalon à la hussarde. Pantalon ample aux cuisses et étroit aux chevilles. La forme de ses chapeaux [de Flaubert], la coupe de ses pantalons à la hussarde (...) rappelaient (...) le je ne sais quoi d'un peu théâtral (Bourget, Essais psychol.,1883, p. 99). Rem. Pantalon housard. Même sens. Il avait des pantalons housards comme ceux de son nouveau métier [terrassier] (Giono, Triomphe vie, 1941, p. 190). ♦ Bottes à la hussarde. Bottes dont la tige monte en s'évasant. Une femme (...) donnant la main à un jeune enfant en pantalon collant et en bottes à la hussarde (Goncourt, Man. Salomon,1867, p. 289). ♦ Danse à la hussarde, ou p. ell. hussarde. Danse d'origine hongroise. (Dict. xixeet xxes.). b) Loc. adv., au fig. Avec brutalité et précipitation; sans raffinements ni délicatesses. Synon. à la dragonne*.Aimer à la hussarde. Il [le président Périvier] pourrait obtenir la succession de M. Manau s'il voulait présider la cour d'assises à la hussarde et serrer la vis à Me Labori (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 324).Maintenant, viens que je te baise à la hussarde, comme ils disent, ces cochons de Français (L. Daudet, Ciel de feu,1934, p. 77). II. − ,,Grains de malt dont la plumule dépasse le grain lui-même`` (Clem. Alim. 1978). De nombreux praticiens (...) reprochent [aux arrosages des couches d'orge] (...) de pousser à la formation de hussards (Boullanger, Malt., brass.,1934, p. 132). Prononc. et Orth. : [ysa:ʀ] init. asp. Houssard, housard ds Ac. 1718-1878 (à côté de hussard). V. houssard, hussard ds Littré. Docum., cf. Stendhal, Corresp., 1809, p. 347 et Giono, loc. cit.). Ces var. sont considérées comme vieillies ds Ac. 1935. Elles sont encore attestées ds Rob. (sans mention) et ds Lar. Lang. fr. (à titre hist.). Houzard également vieilli (cf. Vidal, Delmart, loc. cit.). Étymol. et Hist. A. Masc. 1. a) [1532 houssari plur. « cavalier de l'armée hongroise » (Lettre reçue de Venise in Mél. Dauzat, p. 26 empr. à l'ital.)]; 1605 hussard (Palma Cayet, Chronologie septenaire, p. 19-20, ibid., p. 27); b) 1718 « soldat de la cavalerie légère, dans diverses armées » (Ac.). B. Fém. 1. a) 1718 couper les crins des chevaux à la Hussarde (ibid.); b) 1798, janv. à la hussarde « à la manière des hussards » (Pièces d'Orgères, I, 89-235, no3); c) 1815 à la housarde « sans retenue ni délicatesse » (Courier, Lettres Fr. et Ital., p. 870); 2. 1721 hussarde « sorte de danse hongroise » (Trév.). Empr., A prob. par l'intermédiaire de l'all.Husar, Husser « cavalier de l'armée hongroise » (1remoitié du xvies. ds Mod. Lang. Notes, t. 39, p. 253 et Schultz, Deutsches Fremdwörterbuch), au hongr. huszar, proprement « le vingtième ». Le sens de « cavalier de l'armée hongroise », qui apparaît au début du xvies. en hongr., vient de ce que lors de l'invasion des Turcs en Hongrie (en 1458), le gouvernement de ce pays ordonna la levée d'un homme sur vingt pour former un corps de cavalerie légère. Le mot fut connu en France avec ce sens au moment de la Guerre de Trente Ans, lorsque quelques compagnies de hussards hongrois vinrent servir comme troupes auxiliaires dans l'armée française. Le sens A 1 b est dû à la formation en France (en 1691) d'un régiment de hussards. L'alternance vocalique [y] et [u] correspond d'une part à un empr. à la lang. écrite, d'autre part à un empr. à la langue orale et les var. phonét. [z] et [s], à l'all. Husar à côté de Husser. Fréq. abs. littér. : 505 (hussarde : 15). Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 637, b) 1 817; xxes. : a) 614, b) 259. DÉR. Hussarder, verbe intrans.Agir avec hardiesse, promptitude. Les gens (...) qui hussardent, les pléthoriques, les beaux sanguins, les solides mâles qui dédaignent les entrées et les épisodes et se ruent, en perdant aussitôt la tête, ceux-là se complaisent, pour la plupart, aux lueurs éclatantes des jaunes et des rouges, aux coups de cymbales (Huysmans, À rebours,1884, p. 20).En partic. Faire l'amour rapidement, sans s'embarrasser des préliminaires. J'ai été un imbécile. J'aurais dû hussarder, ne pas m'arrêter à ses supplications et à ses leurres; j'aurais dû lui violenter la bouche, lui faire sauter les seins (Huysmans, Là-bas, t. 1, 1891, p. 250).− [ysaʀde] init. asp., (il) hussarde [ysaʀd]. − 1resattest. a) 1765 « se battre à la manière des hussards » (Encyclop. t. 8); b) 1884 « agir avec hardiesse, promptitude et violence, particulièrement dans les entreprises galantes » (Huysmans, loc. cit.); de hussard, dés. -er. BBG. − Arveiller (R.). Mots orientaux, notes lexicol. Mél. Dauzat (A.) 1951, p. 26; R. Ling. rom. 1976, t. 40, p. 456. - Boulan 1934, p. 172. - Colomb. 1952/53, pp. 367-369. - Grégoire (H.), Orgels (P.). Qu'est-ce qu'un hussard? In : [Mél. Boisacq (É.)]. Bruxelles, 1937/38, t. 1, pp. 443-451. - Quem. DDL t. 2, 7. - Vidos 1939, p. 335. |