| GÎTE1, subst. masc. A. − [Comme habitat d'un animé] 1. [D'une pers.] . Vieilli et littér. Endroit où l'on couche, réside, temporairement ou habituellement. Bon, mauvais gîte; chercher, trouver, atteindre un gîte; être sans gîte; le gîte et le couvert. Le délabrement dans lequel il [l'hôtel de SaintQuentin] était me fit espérer d'y rencontrer un gîte peu coûteux (Balzac, Peau chagr.,1831, p. 101).Trochut habitait vers le sud (...) Raboliot juste à l'opposé (...). Cela lui permettait de regagner son gîte sans traverser les rues dangereuses (Genevoix, Raboliot,1925, p. 54) : Un quart d'heure plus tard, nous étions attablés dans mon appartement. Elle dit en entrant : « Ah! on est bien ici ». Et elle regarda autour d'elle avec la satisfaction visible d'avoir trouvé la table et le gîte en cette nuit glaciale.
Maupass., Contes et nouv., t. 1, Nuit Noël, 1882, p. 864. − Spécialement ♦ HIST. Droit de gîte. Privilège royal (puis seigneurial) donnant droit à être nourri et logé gratuitement (par les sujets ou les vassaux). Le roi (...) pouvait bien exercer son droit de gîte et se faire héberger, lui et sa suite, dans ses nombreux déplacements, aux frais de ses sujets (Faral, Vie temps st Louis,1942, p. 29). ♦ ART MILIT. (aux xviiieet xixes.). Gîtes d'étapes. Localités séparées les unes des autres par une journée de marche, et permettant aux troupes de se ravitailler et d'établir leur cantonnement. De quel droit refuserez-vous le gîte de l'étape au 8erégiment de hussards, criait son colonel (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 84).P. ext. Endroit pour manger et dormir entre deux étapes (d'un voyage). Misérable village, gîte d'étape plus misérable encore dont il faut bien se contenter (Gide, Voy. Congo,1927, p. 790).Fournir un gîte d'étape conçu en fonction des goûts de la clientèle aisée (Jocard, Tour. action État,1966, p. 114). ♦ TOUR. Gîte rural (mod.). Logement sommairement aménagé, situé à la campagne, habituellement dans une ferme, que le propriétaire loue (à des vacanciers) sous certaines conditions. Ce régime de prêts est étendu aux formes complémentaires d'hébergement : (...) gîtes ruraux et chambres d'hôtels, auberges de jeunesse, auberges de campagne, etc. (Jocard, Tour. action État,1966p. 190).Aide à la constitution d'établissements d'accueil modestes (gîtes ruraux, centres familiaux de vacances, etc.) (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr.,1967, p. 379). 2. Abri, lieu de repos (du lièvre). Il avait vu un vieux lièvre, poursuivi par les chiens, forcer à coup de pattes un autre lièvre à sortir du gîte, pour donner le change (A. France, Lys rouge,1894, p. 255).Je passe des journées à ma table comme un lièvre au gîte (Renard, Journal,1906, p. 1094). − En partic. ♦ Tirer au gîte. Faire feu (sur l'animal) au moment où il est encore dans son gîte. J'étais bon à tirer comme un lièvre au gîte (Pourrat, Gaspard,1925, p. 160).P. anal. Un de ces maudits tirailleurs qui, j'en suis sûr, s'embusquent dans leurs buissons, et nous tirent au gîte comme des lapins (Bayard, Fille régim.,1840, I, 3, p. 295). ♦ [P. allus. au proverbe : Un lièvre va toujours mourir au gîte] Au fig. On finit toujours par rentrer au pays. Jean n'était pas homme à mourir hors du gîte (Mauriac, Baiser Lépreux,1922, p. 201). ♦ [P. allus. à La Fontaine, II, 14 ,,Un lièvre en son gîte songeait (Car que faire en un gîte, à moins que l'on ne songe?)``] Il croyait bien être sûr que décidément le ruisseau serait son gîte, et que faire en un gîte à moins que l'on ne songe? (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 90). ♦ ART CULIN. Lièvre au gîte, p. ell. gîte. Pâté de lièvre servi dans une terrine. Orlowski qui chasse maintenant si diligemment vous donne-t-il du gibier, afin qu'on puisse manger pâtés de lièvre, civets, gîtes (Flaub., Corresp.,1843, p. 29). − P. ext. [En tant qu'abri d'un autre animal] Le colombier reçoit un pauvre pigeon blessé qui se traîne péniblement jusqu'au gîte (Bordeaux, Fort de Vaux,1916, p. 228).Une mère chatte qui déplace le gîte de son petit (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 47). B. − [Comme lieu d'une chose] Endroit où se trouve (caché ou enfoui) quelque chose. Qui sait le gîte et la culée d'atterrissage des maîtres câbles sous-marins (Saint-John Perse, Exil,1942, p. 224). − Emplois spéc. 1. ART CULIN., BOUCH. Gîte ou gîte-gîte. Partie inférieure de la cuisse du bœuf (cf. Esn. 1966). ♦ Gîte à la noix. ,,Partie de la cuisse du bœuf, placée entre quasi, culotte et tranche grasse`` (Clém. Alim. 1978). Un berger ou un mouton (...) diminuait l'entrecôte ou renforçait le gîte à la noix (Reybaud, J. Paturot,1842, p. 418).Ce sont les muscles les plus épais et les mieux infiltrés de graisse (culotte, gîte à la noix, aloyau, etc.) (R. Lalanne, Alim. hum.,1942, p. 70). 2. CONSTR. ,,Chacune des lambourdes qui soutiennent un plancher`` (Lar. Lang. fr.). 3. MINES ET CARR., vieilli. Dépôt (de minerai). Synon. plus fréq. gisement.Gîte aurifère, métallifère. Des gîtes de minerais qui sont restés intacts ou qui n'ont été que superficiellement exploités (Say, Écon. pol.,1832, p. 341).Les gîtes cuivreux contenus dans les roches de cette chaîne (Élie de Beaumont, B. Sté géol. Fr., t. 4, 1847, p. 35).Les minerais, inappréciables dans leurs gîtes et dans leurs filons, prennent leur importance au soleil, et par les travaux de la surface (Valéry, Variété [I], 1924, p. 190). − P. anal. Synon. nappe.Gîte aquifère (cf. Colas-Cab. 1968, Lemaire Envir. 1975). 4. TECHNOL., vx. Celle des deux meules d'un moulin qui est immobile. Synon. meule gisante.La meule tournante et le gîte (Ac.). REM. Gîtage, subst. masc.,rare. [Correspond à supra B spéc. 2] . ,,Poutraison qui supporte les solives d'un plancher`` (Constr. métall. 1975). Dans l'enchevêtrement inaccessible des gitages [sic] on discernait des sortes de hardes pendantes (Van der Meersch, Empreinte dieu,1936, p. 116). Prononc. et Orth. : [ʒit]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) 1176-81 son giste « lieu où l'on peut trouver à se coucher, à loger » (Chr. de Troyes, Ch. au Lion, éd. M. Roques, 670); b) 1376 « lieu où s'abritent les animaux sauvages, le gibier [ici la loutre] » (Modus, 53, 66 ds T.-L.); p. ext. 2. 1393 bouch. (Ménagier, II, 86, ibid.); 3. fin xives. « poutre sur laquelle reposent les assiettes d'un pont » (Froissart, Chron., éd. G.T. Diller, livre I, CCXII, 50); 4. 1811 mines (Mozin-Biber : gîte de métal..., de sel fossile..., de minerai). Anc. part. passé subst. de gésir*. |