| GUITARE, subst. fém. I. − MUSIQUE A. − Instrument à cordes pincées, muni d'un manche à chevillier plan et recouvert d'une plaque de touches divisée par des filets, à caisse de résonance ovale, légèrement étranglée sur les côtés, dont le fond et la table, percée d'une rosace, sont plats. En votre qualité d'Espagnol, vous êtes tenu de savoir pincer de la guitare (Mérimée, Théâtre C. Gazul,1825, p. 64).Des musiciens, des guitares sous leurs capes, donnent des sérénades (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 63) : 1. C'est un grand mystère que la profusion d'harmonies qu'un musicien espagnol peut tirer d'une guitare. Il semble que les cordes se multiplient à l'infini tant elles portent de nuances et d'éclat. Il n'est pas jusqu'au bois de la caisse qui ne donne une cadence marquée par les ongles.
T'Serstevens, Itinér. esp.,1933, p. 106. SYNT. Pincer, gratter les cordes d'une guitare; jouer de la guitare; gratter, racler, accorder une guitare; tirer des chants de la guitare; s'accompagner sur/à la guitare; prendre, donner des leçons de guitare; chant, bourdonnement, son boiseux de la guitare. ♦ P. métaph. Tout cet ensemble de choses calmes, rassurantes, hospitalières ne détendait point les nerfs d'Isabelle, frémissants comme les cordes d'une guitare qu'on vient de pincer (Gautier, Fracasse,1863, p. 376).V. guimbarde ex. − P. méton. Joueur de guitare. Il y avait un guitariste qui voyagea longtemps avec Paganini (...). Tous deux, violon et guitare, donnaient des concerts partout où ils passaient (Baudel., Paradis artif.,1860, p. 330).On poussait les tables vers les murs, et la guitare s'asseyait près de l'accordéon (Jouve, Scène capit.,1935, p. 15). − P. ext. Tout instrument à cordes pincées ressemblant plus ou moins à la guitare. Guitare arabe, cosaque. L'un tenait une guitare légère (...); l'autre une sorte de rebec (Gobineau, Nouv. asiat.,1876, p. 48) : 2. On entend frissonner et vibrer mollement,
Communiquant aux bois son doux frémissement,
La guitare des monts d'Inspruck, reconnaissable
Au grelot de son manche où sonne un grain de sable...
Hugo, Légende, t. 1, 1859, p. 363. ♦ Guitare hawaïenne. ,,Instrument dont la vibration caractéristique est obtenue par le glissement sur le manche d'un bloc de métal`` (Lar. 20e). Les inflexions à la Armstrong se transforment sur cet instrument [la guitare] en glissandos qui rappellent fâcheusement la guitare hawaïenne (Panassié, Jazz hot,1934, p. 166). ♦ Guitare électrique. Guitare sans caisse de résonance et dont le son est amplifié électriquement (cf. Rob., Lar. Lang. fr.). Anton. fam. guitare sèche. B. − Au fig., vieilli. ,,Rengaine, théorie banale ou maxime rebattue`` (Larch. 1858, p. 558). Autre guitare! C'est la même guitare (Ac. 1932). Une autre guitare qu'il serait temps aussi de reléguer parmi les vieilles lunes (...) c'est l'Inspiration (Verlaine,
Œuvres posth., t. 2, Baudel., 1865, p. 18).Ah ça, tu crois donc que j'écoute toutes les guitares que tu me grattes depuis une heure? (Huysmans, Marthe,1876, p. 97).Dans les Ballades, Victor Hugo s'amuse en grand virtuose, mais la Fiancée du Timbalier est devenue une guitare (Thibaudet, Hist. litt. fr.,1936, p. 158) : 3. ... elle n'a fait que me dire sa joie d'avoir ce volume sur lequel a prié ce grand soldat, ce grand croyant. Enfin, elle m'a joué toute la guitare des convictions héroïques.
Bourget, Cosmopolis,1893, p. 18. II. − CHARPENT. ,,Assemblage de charpente composé surtout de pièces courbes, qui est employé pour soutenir les toits en saillie des lucarnes ou pour empêcher la pluie poussée par le vent de pénétrer par une fenêtre`` (Chabat 1881). REM. 1. Guitariser, verbe intrans.Jouer de la guitare. P. métaph. Les domestiques chantaient dans les voitures qui suivaient celles de leurs maîtres, répondaient à l'appel du coucou, imitaient les premières notes de la chevêche, guitarisaient (Morand, Flagell. Séville,1951, p. 77). 2. Guitaronne, subst. fém.Guitare de grandes dimensions (cf. Hist. de la mus., Paris, Larousse, 1965). La Sérénade. Un luth, une guitaronne et un hautbois. Symphonie discordante et ridicule. MmeLaure à son balcon, derrière une jalousie (Bertrand, Gaspard,1841, p. 105). Prononc. et Orth. : [gita:ʀ]. Att. ds Ac. 1694-1932; ds 1694 et 1718, s.v. guitarre; ds 1740, s.v. guittare (cf. aussi Fér. 1768). Étymol. et Hist. 1. Mus. 1275-80 quitarre (J. de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 21001); 2. id. 1349 guitare moresche (Comptes de l'hôtel de Jean, duc de Normandie in Wright ds Quem. DDL t. 9); 1360 guitarre (Inv. du duc d'Anjou, no119 ds Gay); 3. 1866 archit. (Littré). Empr. à l'esp.guitarra, attesté dep. ca 1330 (J. Ruiz d'apr. Cor.; la guitarra morisca est déjà représentée dans l'iconogr. esp. dans la 2emoitié du xiies., Cantigas de Santa Maria d'Alphonse X le Sage, v. Mus.), empr. à l'ar. kitâra (káiṭâra dans un texte d'Espagne du xies. d'apr. Cor.), lui-même empr. au gr. κ
ι
θ
α
́
ρ
α « cithare »; 1 représente une autre adaptation du mot esp. avec assourdissement de la consonne initiale (v. FEW t. 2, p. 719a). Fréq. abs. littér. : 336. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 428, b) 730; xxes. : a) 395, b) 433. Bbg. Archit. 1972, p. 213. - George (K.E.M.). Arg. jouer du violon. Romania. 1969, t. 90, pp. 538-545. - Hotier (H.). Le Vocab. du cirque et du music-hall en France. Paris, 1973, p. 112. - Kidman (J.). Les Empr. lexicol. du fr. à l'esp. des orig. jusqu'à la fin du 15es. Paris, 1969, pp. 119-124. - Reinh. 1963, p. 272. |