| GUEULER, verbe A. − Emploi intrans. 1. [Le suj. désigne certains animaux] Pousser des hurlements. Clara se rappelle que l'on va chasser le lièvre (...). Les courants gueulent dans la cour (Jammes, Rom. du lièvre, C. d'Elléb., 1899, p. 116) : 1. ... mais de ces deux-là, l'un, fort, large des épaules, la tête grosse, les yeux enfoncés et comme remplis de sang, riait en serrant ses lèvres, on aurait dit un lion entouré de misérables chiens qui gueulent et s'excitent pour tomber dessus...
Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 303. − P. métaph. On allait pas d'ordinaire devant des polissons de canons qui gueulaient et vomissaient des régiments de boulets, sans dire gare (Balzac, Méd. camp.,1833, p. 180). 2. Pop. [Le suj. désigne une pers.] a) Crier, vociférer : 2. Il est 2 h du matin, je croyais qu'il était minuit. Je suis exténué d'avoir gueulé [it. ds le texte] toute la soirée en écrivant. C'est une page qui sera bonne, mais qui ne l'est pas.
Flaub., Corresp.,1853, p. 126. Gueuler comme un putois. Gueuler comme un cochon qu'on saigne (cf. G. Frison, Les Aventures du colonel Ronchonot,1885, p. 614 ds Quem. DDL t. 17).Rem. Dans ce sens, l'emploi pronom. est possible. Et puis, très souvent, son rythme, à Flaubert, n'est que pour lui seul, il nous échappe. Il se gueule ça à lui-même (Goncourt, Journal, 1862, p. 1031). b) Réclamer avec force; revendiquer, protester bruyamment. Je viens de gueuler. Meyer vient de me donner 500 francs d'acompte. Je vais me coucher. Je vais ce qui s'appelle ronfler. − À bientôt misérable (Villiers de L'I.-A., Corresp.,1880, p. 285). 3. [Le suj. désigne un appareil émettant des sons] Faire du bruit; faire entendre des sons assourdissants. La radio gueule. Tout cela faisait un joli charivari. Les appareils gueulaient à qui mieux mieux (Cendrars, Dan Yack, Plan de l'Aiguille, 1929, p. 85). 4. [Le suj. désigne des couleurs, des teintes violentes] Produire un effet éclatant. Rideaux et papiers peints prennent des tons qui gueulent; Quant à mes vieux portraits, on dirait qu'ils m'en veulent (Rollinat, Névroses,1883, p. 304). B. − Emploi trans. 1. Pop. Dire, crier, chanter de toutes ses forces. Je me précipite, et qu'est-ce que je vois? (...) la chanteuse debout, consolée et superbe, enroulée dans un des drapeaux et gueulant la Marseillaise (A. Daudet, Sapho,1884, p. 256) : 3. Tandis que ces manœuvres qui maniaient des pièces de bois ou des pierres de taille, qui gueulaient des mots orduriers à pleine bouche, ils empoignaient la vie à cru, se choquaient avec elle.
Aymé, Brûlebois,1926, p. 133. 2. CHASSE. Saisir avec la gueule. Ce chien gueule très bien le lièvre (Littré). Prononc. et Orth. : [gœle], (il) gueule [gœl]. Att. ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. [1648 ds Bl.-W.1-5] 1. 1660 « crier fort » (Oudin Fr.-Esp.); 2. 1762 chasse (Ac. : Gueuler... se dit d'Un lévrier qui saisit bien le lièvre avec sa gueule). Dér. de gueule*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 481. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 73, b) 571; xxes. : a) 981, b) 875. Bbg. Quem. DDL t. 17. |