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GUETTER, verbe trans.
A. − Qqn guette qqn/qqc.
1. [Le suj. désigne une pers. ou un animal; l'obj. désigne un animé ou un inanimé] Attendre patiemment et très attentivement, tous les sens en éveil, en surveillant les alentours. Guetter un bruit; guetter l'ennemi; le chat guette la souris. À l'affût derrière un pin (...) il guettait les pies (Mauriac, Baiser Lépreux,1922, p. 173).Nous revenions de l'école, un jour du mois de mai. Maman, comme de coutume, nous guettait, du haut du balcon (Duhamel, Notaire Havre,1933, p. 79) :
1. Il est allé guetter le renard. Ça se fait avec beaucoup de silence et peu de gestes. On se cache en colline et on écoute. Si on sait lire dans les bruits de l'air on apprend qu'il couche là (...). Après, caler le piège, c'est un jeu. Giono, Regain,1930, p. 99.
Emploi abs. L'homme entendit du bruit dans l'égout. Très surpris, il se blottit, et guetta (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 721).Passé minuit, j'attendais et je guettais. Jamais mon oreille n'avait perçu tant de bruits, distingué de sons si ténus (Camus, Étranger,1942, p. 1203).
Emploi pronom. réciproque. Les deux châteaux ennemis se guettent et semblent se jeter des coups d'œils foudroyants à travers le paysage (Hugo, Rhin,1842, p. 134).Pas un coup de feu; les deux lignes, face à face, se guettaient, haineuses et résignées (Dorgelès, Croix de bois,1919, p. 269).
SYNT. Guetter du coin de l'œil, des yeux, sans cesse; guetter une proie; guetter à la porte, à la fenêtre, à la sortie, au tournant.
2. [L'obj. désigne un animé] Attendre le passage de quelqu'un. Guetter le facteur. Le préfet, qui le guettait, le prit au passage et le força d'écouter la lecture de toutes les lettres (Stendhal, L. Leuwen, t. 3, 1835, p. 91).Il se mit à examiner les personnes qui débouchaient sur le trottoir de la rue Mazarine. Il guettait Thérèse (Zola, T. Raquin,1867, p. 216) :
2. Il fallut, à ce moment, des gens de bonne volonté, pour aller à l'entrée du grand chemin voisin guetter les derniers arrivants et leur indiquer où nous étions. Je m'offris aussitôt; Meaulnes me suivit, et nous allâmes nous poster près du pont suspendu... Alain-Fournier, Meaulnes,1913, p. 258.
Emploi abs. Sur le point d'entrer dans ma chambre, je suis arrêté par mon voisin qui guettait devant sa porte (Gide, Journal,1931, p. 1038).
3. [L'obj. désigne un inanimé] Attendre avec impatience pour se saisir de, pour ne pas laisser échapper (une circonstance favorable). Guetter une occasion, un moment, un instant, un signal, un signe; guetter le départ, l'arrivée, le retour, la sortie de qqn. Le préfet guettait un gigot. Il allongea la main, au bon moment, dans une éclaircie d'épaules (Zola, Curée,1872, p. 558) :
3. L'un d'eux se baissa comme pour ajuster sa galoche, guetta le moment où nos sentinelles allaient tourner le dos, et prestement nous lança par-dessus le grillage un petit paquet qu'il avait sorti de sa chaussette. Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 182.
B. − Au fig. [L'obj. désigne une pers.] Qqc. guette qqn.Menacer (d'arriver). Maladie, mort, dangers, périls qui guette(nt) qqn. Et l'on renvoyait le berger aux prés, sans souci des tentations qui l'y guettaient (Aymé, Jument,1933, p. 148).Les catastrophes qui guettaient les Français au Tonkin (Daniel-Rops, Mort,1934, p. 20) :
4. Mmede Fontanin regagna sa chambre, et, prise de vertige, s'assit, sans même retirer ses gants. Est-ce que la fièvre la guettait, elle aussi? Martin du G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 602.
Emploi abs. Après trois jours de piètre nourriture la défaillance guettait (Queffelec, Recteur,1944, p. 124).
REM.
Guettoir, subst. masc.Abri d'où l'on guette. Synon. guette1. Il [le garde-côte] me dit qu'il m'avait vue au milieu d'eux [des bohémiens], du haut de son guettoir (Sand, Corresp., t. 5, 1867, p. 203).
Prononc. et Orth. : [gεte] ou [ge-] (il) guette [gεt]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. a) Ca 1100 guaitier « veiller (un mort) » (Roland, éd. J. Bédier, 3731); ca 1130-40 gaitier « garder, surveiller (des personnes, pour les protéger) » (Wace, Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, 464); b) ca 1135 guaitier « épier, observer quelqu'un (avec de mauvaises intentions) » (Couronnement Louis, éd. E. Langlois, 2129); c) 1160-74 gaitier « surveiller patiemment pour surprendre quelqu'un ou quelque chose » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, Chron. ascendante, 959). De l'a. b. frq. *wahtôn « surveiller » (cf. a. h. all. wahten « faire le guet », m. néerl. wachten « surveiller »), dér. de *wahta (v. guette). Guetter au sens de « surveiller » a été concurrencé par garder*, d'où l'évolution sém. vers b et c, appuyée sur le fait que guetter désignait plutôt la surveillance en cachette (cf. DEAF, col. 62). Fréq. abs. littér. : 1 745. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 636, b) 2 165; xxes. : a) 4 134, b) 3 227.