| GRISETTE, subst. fém. A. − TEXT., vx. Étoffe commune de teinte grise; p. ext. vêtement fait de cette étoffe que portaient les hommes et les femmes du commun. Dans sa carmagnole et sa culotte de grisette (Erckm.-Chatr., Hist. paysan., t. 1, 1870, p. 173).Des gilets de grisette et des chemises en grosse toile blanche (Ramuz, A. Pache,1911, p. 295). ♦ En emploi adj. L'extravagance ingénue de sa robe grisette (Arène, Calanque,1896, p. 13). ♦ P. méton., fam. Jeune fille ou jeune femme de médiocre condition, ouvrière ou employée de maison de couture, de modes, etc... Sous le titre de Grisette, nous nous permettons de comprendre indifféremment couturières, modistes, fleuristes ou lingères, enfin tous ces gentils minois en cheveux, chapeaux, bonnets, tabliers à poches, et situés en magasins (Balzac,
Œuvres div., t. 2, 1831, p. 277).Quand la grisette assise, une aiguille à la main, Soupire, et de côté regardant le chemin, Voudrait aller cueillir des fleurs au lieu de coudre (Hugo, Châtim.,1853, p. 347) : 1. ... quand elle en était encore réduite aux robes d'indienne imprimée, aux petits bonnets à pompons et aux souliers de peau de chèvre, elle portait à ravir ce pauvre et simple uniforme des grisettes. Ces jolies filles moitié abeilles, moitié cigales, qui travaillaient en chantant toute la semaine, ne demandaient à Dieu qu'un peu de soleil le dimanche, faisaient vulgairement l'amour avec le cœur, et se jetaient quelquefois par la fenêtre.
Murger, Scènes vie boh.,1851, p. 234. ♦ En partic., péj. Jeune ouvrière coquette et se laissant facilement courtiser. Synon. lorette.Je n'avais pas entendu qu'il lui fallait une grisette. Me prends-tu pour un partisan des amours légères (Flaub., Corresp.,1853, p. 304).Une petite figure de cocotte et de grisette en liberté de campagne et de dimanche (Goncourt, Journal,1868, p. 429).V. aussi guinguette, ex. : 2. Quelques coups de canif dans les mariages, et un assez grand nombre de grisettes; rien d'autre. Encore la grisette doit rester ouvrière; une femme obligée de prouver qu'elle a un métier ou une fortune. Un jeune homme qui veut avoir chez lui sa maîtresse doit l'inscrire comme sa servante.
Taine, Notes Paris,1867, p. 303. B. − BOTANIQUE 1. Nom vulgaire de deux variétés d'agaric : l'agaric élevé et l'agaric vaginé, de couleur grise. Voir A.P. de Candolle, Essai sur les propriétés méd. des plantes, 1816 ds Quem. DDL t. 12. 2. Nom d'une maladie du tronc et des branches du chêne provenant de la fermentation de la sève au contact de l'air par suite d'une blessure. Ils connaissaient les trois maladies [du bois] : la carie, (...) la grisette et la jaunisse qui le tavellent [le bois] (La Varende, Tourville,1943, p. 80). C. − ZOOL. (entomol. et ornith.). ,,Nom vulgaire d'une espèce de fauvette, d'une alouette, d'un canard, de plusieurs papillons, d'une espèce de charançon`` (Ac. Compl. 1842; v. aussi Besch., Lar. 19e). Fauvette grisette (...) appelée aussi grisette (...) Elle a l'habitude de s'élever en l'air en chantant, de tourner et pirouetter (Coupin, Animaux de nos pays, 1909, p. 152). REM. Griset, subst. masc.,vieilli, rare. [En parlant d'un homme] Vingt grisets en blouse et tête nue (Cladel, Ompdrailles,1879, p. 186).Dans les dépôts (...) on voyait hier encore (...) les novices, les printaniers, les grisets aux lèvres encore humides de la fontaine de Jouvence (D'Esparbès, Ceux de l'an 14!1917, p. 10). Prononc. et Orth. : [gʀizεt]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1306 griset subst. masc. « drap de couleur grise » (G. Guiart, Royaux Lignages, éd. De Wailly et Delisle, 11427); b) 1651 grisette subst. fém. « étoffe grise de peu de valeur » (P. Scarron, Virgile Travesti, VI ds
Œuvres, éd. 1786, IV, 361); c) 1664 « jeune fille de condition modeste et de mœurs faciles » (J. de La Fontaine, Contes, I, 1, 326 ds
Œuvres, éd. A. Regnier, t. 4, p. 47); 2. 1721 ornith. (Trév.). Dér. de gris1*; suff. dimin. -et*, puis -ette*. 1 du contenant (a et b) le terme a passé au contenu (c), sans doute parce que ce type de jeunes filles portaient des vêtements taillés dans une étoffe grise de peu de valeur (FEW t. 16, p. 84, note 15); 2 ainsi nommé en raison de sa couleur grise (cf. griset sens 2 et grison sens 1). Fréq. abs. littér. : 258. Fréq. rel. littér. : xixes.: a) 553, b) 865; xxes. : a) 219, b) 29. Bbg. Klein (J.R.). Le Vocab. des mœurs de la « Vie parisienne » sous le second Empire. Louvain, 1976, pp. 68-69. - Le Breton Grandmaison. Le Monde de la limonade. Vie Lang. 1971, p. 548. - Quem. DDL t. 12. |