| * Dans l'article "GRIFFONNER,, verbe trans." GRIFFONNER, verbe trans. A. − 1. Qqn griffonne qqc. (sur qqc.).Tracer rapidement ou sans soin, de façon maladroite ou confuse, des caractères d'écriture, un dessin. Synon. gribouiller.La sœur avait griffonné des chiffres sur un morceau de peau que l'autre attachait, sur le paquet, avec une aiguillée de fil (E. de Goncourt, Élisa,1877, p. 167).Il écrit sur des feuilles volantes et, sur les marges, griffonne des dessins, dont quelques-uns, dit MmeRostand, sont, ma foi, très jolis (Renard, Journal,1896, p. 318) : 1. La pile était usée et la lampe faiblissait vite. Pour ne pas être pris de court, et comme je voulais me délivrer de mon acte dans l'instant même, je pris une enveloppe et rédigeai l'adresse. Au moment où je me préparais à reprendre ma lettre, l'obscurité se fit, je ne pus que griffonner à l'aveuglette le mot « amitiés » et signer.
Abellio, Pacifiques,1946, p. 178. − Absolument a) Écrire de façon peu lisible. Griffonner comme un chat. Je griffonne trop sur ce papier transparent pour écrire davantage; tenez-le dédoublé pour lire (E. de Guérin, Lettres,1841, p. 415).Je griffonne en hâte, car la poste va partir (Hugo, Corresp.,1868, p. 124). b) Tracer des signes quelconques. De même que les enfants crayonnent pour crayonner et font des dessins informes qui parlent à leur imagination, de même les primitifs auraient griffonné pour le plaisir de griffonner, puis pour concrétiser leur pensée, pour conserver l'image de choses vues (S. Blanc, Init. préhist.,1932, p. 44). 2. Noter, rédiger rapidement ou sans souci de la forme. Griffonner une lettre, quelques mots, des notes. Ce livre sur lequel je griffonne tout ce que je sens, tout ce qui me passe par la tête, est mon ami, mon consolateur, mon support (Delécluze, Journal,1825, p. 230).Avec le sans-façon de l'habitué d'estaminet, du reporter qui griffonne son fait-divers en face d'une chope, le journaliste tira son portefeuille bourré de notes (A. Daudet, Nabab,1877, p. 34). − En partic. [Pour qualifier de façon dépréciative ou iron. la forme ou le contenu d'un texte] Je n'ai pas aujourd'hui écrit une ligne, ou plutôt j'en ai bien griffonné cent! (Flaub., Corresp.,1853, p. 338).La géométrie n'avait point de charmes pour un enfant qui déjà griffonnait des vers (Mérimée, Portr. hist. et littér.,1870, p. 119) : 2. Morano, le 9 mars 1806. Bataille! mes amis, bataille! Je n'ai guère envie de vous la conter. J'aimerais mieux manger que t'écrire; mais le général Reynier, en descendant de cheval, demande son écritoire. On oublie qu'on meurt de faim : les voilà tous à griffonner l'histoire d'aujourd'hui; je fais comme eux en enrageant.
Courier, Lettres Fr. et Ital.,1806, p. 700. ♦ Absol. [Pour qualifier de façon dépréc. ou iron. l'activité d'un écrivain, de celui qui écrit dans l'exercice de sa profession] Non, non, point d'écrivassiers! Tant qu'il y aura des Arouet, il y aura des Marat. Tant qu'il y aura des grimauds qui griffonnent, il y aura des gredins qui assassinent (Hugo, Quatre-vingt-treize,1874, p. 226).Il se tourna vers le bâtiment de la Trésorerie, où toute la journée griffonnaient une cinquantaine d'hommes, parmi des monceaux de paperasses, dans une tiédeur douce (Benjamin, Gaspard,1915, p. 121). B. − Qqn griffonne qqc. à qqn.Écrire à (quelqu'un) en griffonnant (au sens A supra). Je lui griffonne sur un papier calque tout ce que je peux et je lance la boulette (...) par terre, dans l'allée qui sépare les deux rangées de tables; et Luce pose son pied dessus, lestement (Colette, Cl. école,1900, p. 202).Une pudeur instinctive lui faisait serrer les brouillons de lettres qu'il griffonnait à Otto, et les réponses de celui-ci (Rolland, J.-Chr., Matin, 1904, p. 171). ♦ [Constr. avec une prop. complétive] Sur la carte qu'on me remit, Mmede Cambremer avait griffonné qu'elle donnait une matinée le surlendemain (Proust, Sodome,1922, p. 767). ♦ [Employé pour introduire un discours au style dir.] Je griffonne sur un bloc-notes : « Courrier non arrivé. Est-ce faux départ? Stop. Confirmez heure décollage. » − Passez-leur ça (Saint-Exup.., Courr. Sud,1928, p. 58). REM. 1. Griffonnailler, verbe trans.Synon. de écrivailler.Allé vers onze heures et demie chez Ap où j'ai commencé (et avec succès) ma double et ténébreuse œuvre de séduction, − Va benissimo! − Revenu par une pluie battante. − Griffonnaillé ceci et couché (Barb. d'Aurev., Mémor. 2,1838, p. 369). 2. Griffonnement, subst. masc.Action de griffonner. Sa voix basse, coupée et si peu intelligible que les griffonnements du greffier la couvrent (Barrès, Leurs fig.,1901, p. 61). 3. Griffonnis, subst. masc.,B.-A. Pochade exécutée à la plume; gravure qui a l'aspect d'une pochade à la plume. Il ne faut pas chercher dans ces griffonnis et ces pochades [de Hugo] la précision et la rigueur du trait de Méryon (Réau, Art. romant.,1830, p. 144). Prononc. et Orth. : [gʀifɔne], (il) griffonne [gʀifɔn]. Fér. Crit. t. 2 1787 propose d'écrire grifoner. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1555 griffonné « ébauché, dessiné grossièrement, confusément » (Belon, Histoire de la nature des oyseaux, p. 82); b) 1610 « écrire quelque chose d'une manière confuse, peu lisible » (P. Coton, Institution catholique, t. 1, p. 429 ds R. Philol. fr. t. 43, p. 126); 2. 1643 « rédiger avec précipitation et négligence » (Scarron, Recueil de quelques vers burlesques, p. 41). Dér. de griffe1*; suff. -onner*. Fréq. abs. littér. : 314. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 467, b) 514; xxes. : a) 373, b) 433. Bbg. Ritter (E.). Les Quatre dict. fr. B. de l'Inst. nat. genevois. 1905, t. 36, pp. 291-533. |