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GIVRE, subst. masc.
A. − Fins cristaux de glace apparaissant au contact des gouttelettes d'eau en surfusion avec un corps solide, sur lequel ils forment comme une couche de poudre blanche et brillante. Couvert, blanc de givre; cristaux de givre. Les longues allées de peupliers courbés sous le givre (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 1, 1870, p. 437).Le givre lui fait des glaçons dans sa barbe (Péguy, Myst.,1911, p. 179).Le dépôt de givre est plus épais que la couche de glace formée lors du frimas ou de la gelée blanche, mais plus léger que le verglas (Villen.,1974) :
1. Le brouillard, que le vent glaçait, couvrait de givre mon manteau, mes gants, les cils blonds du cocher et la queue du cheval qui semblait une plume d'autruche énorme... Gide, Journal,1912, p. 361.
P. métaph. Le givre de la vieillesse recouvre ma route (Camus, Possédés,1959, 3epart., 15etabl., p. 1081).
P. méton. Gouttelettes d'eau en surfusion, avant leur mise en contact avec un corps solide. Une rafale de givre les enveloppe (Flaub., Tentation,1874, p. 159) :
2. Par intervalles un nuage de givre, venu des profondeurs de la banquise infinie, fendait l'air de son coup de hache, tombait en sifflant sur la plaine, et c'était à travers la route gelée, aussi dure qu'une enclume, comme le claquement de dix mille sabots, une fuite immense... Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1379.
B. − [P. anal. de forme et de couleur; accompagné d'un déterm. adj. ou subst. prép. de] Fine substance qui rappelle l'apparence du givre. [Les fenêtres] n'étaient pas lisses, mais toutes froncées d'un givre artificiel et démodé (Proust, Prisonn.,1922, p. 11).À peine séchés, nos bras et nos jambes se couvraient d'un givre de sel fin (Colette, Naiss. jour,1928, p. 64).
Prononc. et Orth. : [ʒi:vʀ ̥]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. [Début xives. geuvrieuse « couverte de givre » (Ovide moralisé, éd. C. de Boer, III, 1180) d'où *geuvre (ibid., 1177, cf. cependant var. III, 1177 et 1180)]; 1. xves. joivre (De quaillot lay Fondue, ms. Epinal 189, Bull. A. T. 1876, p. 104 ds Gdf. Compl.); 2. 1611 givre (Cotgr.). La répartition géogr. du mot dans la Romania (cf. FEW t. 4, p. 130b) s'accorde bien avec une base pré-lat. *gev(e)ro (d'où 1, partic. représenté en fr. -prov. mod. et aussi dans tout le quart sud-est du domaine d'oïl) et *givro (d'où 2 qui paraît venir du domaine d'oc), d'orig. inc. Pour la réfutation d'une orig. francique ou gaul., v. FEW, loc. cit. Tend progressivement à évincer frimas*. Fréq. abs. littér. : 223. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 194, b) 508; xxes. : a) 452, b) 238. Bbg. Jud (J.). Zur Geschichte der romanischen Reliktwörter in den Alpenmundarten der deutschen Schweiz. Vox rom. 1945/46, t. 8, p. 56.