| GERMER, verbe intrans. A. − 1. [Le suj. désigne une graine, un bulbe, un tubercule] Faire apparaître son germe. La nature elle-même prépare toujours le plus pour obtenir le moins. De mille graines, une seule germera (Senancour, Obermann, t. 1, 1840, p. 209).S'il lui montrait une fleur, elle lui demandait pourquoi cette fleur ferait une graine, pourquoi cette graine germerait (Zola, Dr Pascal,1893, p. 83) : 1. Des graines de luzerne, de blé ou de moutarde sont desséchées, après décortication (...). Quand, après tout cela, on leur fournit des conditions favorables, elles germent régulièrement pour donner des plantes normales.
J. Rostand, La Vie et ses probl.,1939, p. 103. 2. P. ext. [Le suj. désigne une plante] Avoir un germe qui commence à se développer. La rive occidentale était un amoncellement de rochers de toutes formes, où de maigres végétations ont germé parmi les cailloux (Du Camp, Nil,1854, p. 180). − P. anal. et p. métaph. : 2. Elle dit encore au bout d'un moment : − Je serai bonne nourrice, je sens mes seins qui germent. Puis : − Ça me laisse parfois là, desséchée comme une écorce.
Giono, Regain,1930, p. 238. − Emploi trans., vx, littér. Faire germer, produire. Vite! dépouillez-moi de ces haillons tout entier! que je me montre comme au jour où l'habitation maternelle a germé son mâle! (Claudel, Tête d'Or,1890, p. 144).Je ne suis jamais si belle que sous mes rosées; ni si douce qu'au printemps en germant mes feuilles et mes fleurs (Pesquidoux, Livre raison,1932, p. 121). 3. Faire germer. [Correspond à A 1 et 2] Le maltage est le premier traitement industriel que subit l'orge. Il a pour but de faire germer le grain en lui fournissant l'humidité nécessaire (Industr. fr. brasserie,1955, p. 4) : 3. ... le sol est constamment labouré, même lorsqu'il n'est pas semé; l'évaporation est ainsi réduite, et l'humidité conservée dans la terre suffit à faire germer et mûrir une bonne récolte de blé...
Brunhes, Géogr. hum.,1942, p. 133. B. − Au fig. et p. métaph. Commencer à exister, à se développer, à s'implanter. Une foule de petites villes marchandes germèrent, à l'imitation de Coblentz sur la Moselle (Hugo, Rhin,1842, p. 119). − [Le suj. désigne une notion abstr. ou un affect] Rien n'est plus curieux que de voir avec quelle force les idées du nord ont germé dans ces têtes méridionales (Delécluze, Journal,1825, p. 119).Elle ne riait plus; elle souriait seulement en me regardant de ses grands yeux fixes, où germaient de nouveaux désirs (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Marroca, 1882, p. 793).Dès 1812, l'idée de la neuvième commençait à germer... (Rolland, Beethoven, t. 1, 1937, p. 94). − P. métaph. La semence de gaîté que j'avais apportée dans la maison germait maintenant toute seule (Duhamel, Confess. min.,1920, p. 67). − Faire germer. Ces yeux, ces yeux créés par quelques coups de pinceau, cachaient en eux le mystère de ce qui semble être et qui n'existe pas, de ce qui peut apparaître en un regard de femme, de ce qui fait germer l'amour en nous (Maupass., Contes et nouv., Portrait, 1888, p. 630) : 4. − Peut-être que je vous aime encore. Quelques semaines plus tôt, je me serais emparée avidement de cette phrase, j'aurais tenté d'en faire germer un espoir; mais elle n'eut pas d'écho en moi.
Beauvoir, Mandarins,1954, p. 537. REM. 1. Germant, -ante, part. prés. et adj.Qui germe, qui est en état de germination. G. Bonnier a montré par exemple qu'un kilogramme d'orge germant produit par heure 3,5 calories (Plantefol, Bot. et biol. végét., t. 1, 1931, p. 292).Au fig. Qui se développe. Bien des fois, les ambitions de Gianni s'étaient persuadées toucher à leur but, bien des fois il avait cru entrevoir la réalisation de l'idée soudainement germante (E. de Goncourt, Zemganno,1879, p. 165). 2. Germé, -ée, part. passé et adj.Dont la radicule commence à pousser. Je le reconnus encore à ce qu'il ne chantait pas la chanson vraiment inchantable de l'assemblée qui formait le cercle autour d'un tas de pommes de terre germées (Vercel, Cap. Conan,1934, p. 192).On peut (...) consommer le blé germé cru, assaisonné avec sel, citron, ou bien miel, confiture (R. Lalanne, L'Alim. hum.,1942, p. 103).Extraits de malt préparés à partir du malt ou orge germé (Brunerie, Industr. alim., 1949, p. 23). Prononc. et Orth. : [ʒ
ε
ʀme], (il) germe [ʒ
ε
ʀm̥]. Ds Ac. 1694-1932 Étymol. et Hist. 1. 1120 intrans. « commencer à faire apparaître son germe [en parlant d'une plante, d'une graine] » (Psautier d'Oxford, éd. F. Michel, 64, 11 : en ses gutieres esledecerat germant); 1165 fig. (Benoit de Ste-Maure, Troie, 24 ds T.-L.); 2. 1174-76 trans. (Guernes de Pont-Ste-Maxence, La vie de Saint Thomas Becket, éd. E. Walberg, 1319). Empr. au lat.germinare « germer ». Fréq. abs. littér. : 681. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 145, b) 975, xxes. : a) 995, b) 794. Bbg. Gohin 1903, p. 366. |