| GAUCHISSEMENT, subst. masc. Action de gauchir; résultat de cette action. A. − [En parlant d'un obj.] Déformation par rapport à une ligne ou à un plan de référence. On n'a rien (...) obtenu si [les pièces] ne sortent pas du four de cuisson sans (...) gauchissement (Al. Brongniart, Arts cérém., t. 1, 1844, p. 144).L'involontaire frémissement des cils, le gauchissement du sourire, étaient flagrants (Martin du G., Thib., Belle sais., 1923, p. 1022).Mettre les livres à l'abri de la lumière, de la poussière, du gauchissement et des éraflures (Cain, Transform. B.N.,1959, p. 41). − En partic. Gauchissement d'une aile (d'oiseau, d'avion). Déformation momentanée destinée à infléchir le vol. Organes de gauchissement (d'un avion). Le regard avait peine à saisir le gauchissement imperceptible de ses puissantes ailes [du goëland] déployées, le déclic de son cou neigeux (Genevoix, Laframboise, Match à Vancouver, 1942, p. 205). B. − Au fig. 1. Déformation, altération, dégradation. Gauchissement de la réalité, de la vérité : 1. Je me croyais très peu « patriote »; aussi bien n'est-ce point tant de la défaite que je souffre, que du fléchissement et du gauchissement des vertus qui formaient la figure française...
Gide, Journal,1942, p. 133. 2. Déviation, détournement. La pensée s'enferme dans l'image et l'image se donne comme adéquate à la pensée. De là un gauchissement − possible à tout instant − du cours ultérieur de la connaissance (Sartre, Imaginaire,1940, p. 151). − [Avec compl. prép. indiquant une direction] :
2. La joie de l'évolution, la découverte de la nature méditerranéenne, le grand succès, enfin, mondain et international, amènent un gauchissement de Matisse vers un art plus aimable.
Dorival, Peintres xxes., 1957, p. 69. REM. 1. Gauchissage, subst. masc.,rare, synon. supra A.[Le moulage à la housse] évite (...) le gauchissage (Al. Brongniart, Arts céram., t. 1, 1844, p. 138). 2. Gauchissure, subst. fém.,littér. synon. supra B 1.Que ce soit le grossissement de microscope que Proust apporte dans l'expérience humaine ou, au contraire, la ténuité absurde que le roman américain donne à ses personnages, la réalité est en quelque sorte forcée. La création, la fécondité de la révolte sont dans cette gauchissure qui figure le style et le ton d'une œuvre (Camus, Homme rév.,1951, p. 335). Prononc. et Orth. : [goʃismɑ
̃]. Ds Ac. 1762-1932. Étymol. et Hist. a) 1547 gauchissement « fléchissement » (Vitruve, 119b ds Z. rom. Philol. t. 28, p. 719); b) 1700 « action de gauchir, son résultat » (Dodart, Acad. 1700, Mém., p. 55 ds Trév. 1771); c) 1910 aviat. (A. Berget in Almanach Hachette pour 1911, p. 31). Dér. de gauchir*; suff. -(isse)ment1*. |