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GARGOUILLE, subst. fém.
A. − Partie saillante d'une gouttière destinée à faire écouler les eaux de pluie à une certaine distance des murs, et qui est souvent ornée d'une figure animale ou humaine généralement monstrueuse. Des gargouilles, au pied des arcs-boutants, déversaient les eaux des toitures (Zola, Rêve,1888, p. 59).Le chéneau se dégorge par une gargouille à l'angle du toit, et l'eau choit avec un glou-glou hoquetant (Pourrat, Gaspard,1922, p. 204).
P. méton. Figure sculptée représentant le plus souvent un animal monstrueux, une chimère, etc. Une monstrueuse gargouille; une gargouille grimaçante; une grimace, une pose de gargouille :
Notre-Dame. Les gargouilles sont généralement des animaux : poissons, béliers, corbeaux, où la brutalité est fortement marquée par une longue oreille, portée en arrière. Michelet, Journal,1833, p. 113.
[Dans la tradition pop.] Dragon. La gargouille de Rouen. Serpent monstrueux qui, selon la légende, terrorisait la ville de Rouen et ses alentours, et qui fut tué par l'évêque saint Romain, aidé d'un condamné à mort. Le crocodile de l'île de Batz, lié par l'étole du saint breton, comme le fut plus tard la gargouille de Rouen par celle de saint Romain (Flaub., Champs et grèves,1848, p. 354).
B. − P. ext.
1. Conduit, tuyau servant à l'écoulement des eaux de pluie. Vatard se délecta à écouter le chant plaintif d'une gargouille, le haut-de-cœur d'un tuyau mal soudé à un autre (Huysmans, Sœurs Vatard,1879, p. 39).
,,Nom qu'on donne aux trous des petits canaux pratiqués sur les corniches des bâtiments pour l'écoulement des eaux`` (Littré). Un chéneau percé de gargouilles reçoit les eaux de la terrasse, et les rejette dans la cour (Viollet-Le-Duc, Archit.,1872, p. 193).
P. anal. ,,Conduit qui amène les produits de la combustion dans la cheminée`` (Ac. 1932).
2. Caniveau, dalle creusée pour l'écoulement des eaux usées. À gauche de la fontaine, les pots de fleurs fanées de l'étalage achevaient d'agoniser, le long de la gargouille où l'on jetait les eaux grasses (Zola, Ventre Paris,1873, p. 653).
Prononc. et Orth. : [gaʀguj]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1294 gargoule « conduit pour l'écoulement des eaux » (Fabrique de St Lazare d'Autun ds R. archéol. t. 14, 1, p. 179); fin 1313 gargouille (cité par J.M. Richard, Une petite-nièce de St Louis, Mahaut comtesse d'Artois, p. 269). Gargoule est prob. composé de la racine onomat. garg- et de l'a.fr. goule, v. gueule. Cette racine, qui apparaît dans le vocab. de différentes langues (notamment : gr., v. gargariser, gargarisme; b.lat. garga[ri]la, nom de la trachée-artère, Oribase ds TLL; langues romanes et germaniques), évoque le bruit d'un liquide qui bout, bouillonne ou passe dans la gorge de celui qui avale gloutonnement, d'où la désignation de la gorge elle-même et des organes avoisinants, v. aussi gargantua, gargamelle, gargote. Le maintien de garg- s'explique par le caractère onomat. de la racine qui n'aurait plus été perçu dans *jarg-, résultat de l'évolution phonét. rég. Le type gargouille, prob. par croisement avec jargoillier, gargouiller. (Cf. FEW t. 5, pp. 60b-62b et DEAF col. 254-55). Fréq. abs. littér. : 94.