| FÉTIDE, adj. A.− 1. [En parlant d'un élément liquide, gén. épais, sale et souvent stagnant] Qui exhale une odeur forte et répugnante. Boue, bourbier, fange fétide. Synon. infect, nauséabond, puant; anton. suave.La mer est basse et sans grandeur. Elle a laissé derrière elle une vase immense et fétide, sur laquelle les vaisseaux restent tristement échoués (Michelet, Chemins Europe,1874, p. 8): 1. Noir torrent à fleur de sol, pressé, rapide, fangeux, putride, cinglé des larges gouttes de la pluie, moucheté de bulles, moiré de pétrole et d'huile, si puant, si gras, si fétide que la pluie semblait s'efforcer vainement à le laver. On se précipita dans cette fange.
Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 340. − En partic. [En parlant d'une plaie qui suppure] Plaie fétide; pustules fétides. Teigne maligne qui suinte en sanie fétide et corrosive (Voy. La Pérouse,t. 4, 1797, p. 15). 2. [En parlant de l'odeur elle-même] Qui est nauséabond, écœurant. Les marais qui répandent de fétides exhalaisons (Karr, Sous tilleuls,1832, p. 278).L'air était rempli du bruit continu des pioches, et d'émanations fétides provenant des carcasses d'animaux qui pourrissaient sur le sol (Verne, Enf. Cap. Grant,t. 2, 1868, p. 154): 2. Et ce parfum d'un autre monde, dont je m'enivrais avec une sensibilité perfectionnée, hélas! il est remplacé par une fétide odeur de tabac mêlée à je ne sais quelle nauséabonde moisissure. On respire ici maintenant le ranci de la désolation.
Baudel., Poèmes prose,1867, p. 28. − En partic. a) [En parlant de l'haleine d'une pers.] C'était le vrai Romagné, mais bien différent de lui-même! sale, abruti, hideux, l'œil éteint, l'haleine fétide, puant le vin et le tabac, rouge de la tête aux pieds comme un homard cuit (About, Nez notaire,1862, p. 141). b) [En parlant de l'air qu'on respire dans un lieu gén. chaud et humide] Madame Vauquer respire l'air chaudement fétide sans en être écœurée (Balzac, Goriot,1835, p. 13).Au ras de la fenêtre, le plomb soufflait une humidité fétide, dont la puanteur se mêlait à l'âcreté de l'oignon cuit (Zola, Assommoir,1877, p. 422). B.− Au fig. Qui provoque une répugnance morale. Synon. abominable, ignoble, immonde, sordide. 1. [En parlant d'une pers. ou de son attitude] Quiconque a trempé dans le journalisme, ou y trempe encore, est dans la nécessité cruelle de saluer les hommes qu'il méprise, de sourire à son meilleur ennemi, de pactiser avec les plus fétides bassesses, de se salir les doigts en voulant payer ses agresseurs avec leur monnaie (Balzac,Splend. et mis.,1844,p. 14).19 janvier. − Nous sommes enfin débarrassés de cette odieuse crapule de Combes. Par quel scélérat fétide va-t-il être remplacé? (Bloy, Journal,1905, p. 250).Il monte de mon âme une vapeur d'égout où fument des chagrins et des gaîtés fétides (Romains, Vie unan.,1908, p. 146). 2. [En parlant d'une époque] Je suis fâché de ne pas savoir ce qui se passera dans deux cents ans, mais je ne voudrais pas naître maintenant et être élevé dans une si fétide époque (Flaub., Corresp.,1852, p. 40). REM. 1. Fétidement, adv.,rare. Avec des matières fétides. Les fleurs de rhétorique étaient embaumées par les fleurs avortées de ce jardin mal soigné, mais fétidement arrosé. (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 289) 2. Fétider, verbe intrans.,rare. Dégager une odeur fétide. C'est effrayant ce qui est là, sur des tréteaux, ce qui attend là, dans l'église (...). Du purin qui fétide, des gaz qui émigrent, de la viande qui tourne, c'est tout ce qui reste! (Huysmans, En route,t. 1, 1895, p. 27) Prononc. et Orth. : [fetid]. Ds Ac. 1762-1932. Étymol. et Hist. 1464 (J. Chart., Chron. de Ch. VII, II, 185, Vallet de Viriville ds Gdf. Compl.). Empr. au lat. class. fœtidus « qui sent mauvais, sale, dégoûtant ». Fréq. abs. littér. : 216. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 294, b) 381; xxes. : a) 417, b) 212. |